G20 australien : les profits des entreprises mis à l’honneur – les droits des travailleurs ignorés

La lettre électronique @ ctualités Europe – International n°24 par Secteur International Europe

Le G20 s’est tenu du 16 au 18 novembre 2014 à Brisbane en Australie. Les organisations syndicales des pays du G20, réunies au sein du L20 (organisations des pays membres du G20 affiliées au TUAC et à la CSI) revendiquaient la hausse des salaires pour favoriser la reprise. Ils exigeaient également que l’ordre du jour du sommet du G20 tienne compte des inégalités.

Or, les organisations syndicales sont allées de déception en cruelle déception. Les résultats du G20 sont en effet loin des attentes des travailleurs et les recommandations émises par les dirigeants portent en elles des conséquences désastreuses pour l’emploi, la croissance des inégalités et les conditions de vie des travailleurs.

En effet, le communiqué final annonce un Plan d’Action regroupant 800 recommandations à décliner au niveau national et se basant essentiellement sur des réformes structurelles. Le G20 australien n’a donc en aucun cas décidé de rompre avec la logique d’austérité amorcée lors du G20 de Toronto en 2010, malgré les conséquences économiques et sociales que l’on sait aujourd’hui.

Le G20 australien a également été marqué par une mise à l’honneur des intérêts des entreprises en les incitant à tirer pleinement partie des accords commerciaux pourtant fortement décriés aujourd’hui, notamment dans le cadre des négociations des accords UE- Canada (Ceta), transatlantique UE-EU (TTIP), sur le commerce des services (Tisa) et transpacifique (TPP). Le communiqué incite également à augmenter les profits économiques des chaînes de valeur.

Coup bas pour le dialogue social également puisque les organisations syndicales n’ont été ni conviées à s’exprimer devant le sommet des chefs d’États et de gouvernements, contrairement aux représentants patronaux du B20, ni invités à rencontrer en délégations bilatérales des chefs d’États et de gouvernements.

Le communiqué final a aussi été « nettoyé » des références à la liberté syndicale et à la négociation collective. Si la protection sociale est abordée, aucune mesure concrète de mise en œuvre et de financement n’a été avancée. Les références sociales, aux normes fondamentales et à la protection sociale étaient pourtant présentes dans les engagements du G20 depuis Cannes en 2011. Certains engagements en termes de régulation financière ont également disparu de la déclaration finale avant même d’avoir été mis en œuvre dans les pays du G20. Ce qui pose clairement la question de l’évaluation des politiques mises en œuvre au sein des pays du G20, évaluation dont l’Organisation Internationale du Travail est soigneusement mise à l’écart.

Les syndicats comptaient également sur le sommet du G20 pour arracher un soutien à un accord ambitieux sur le climat pour la COP 21 qui aura lieu à Paris en septembre 2015. Là encore, la déception était de mise puisque les négociations sur le climat et les conséquences sur les travailleurs ont été supprimées de l’ordre du jour et la question n’a surgi qu’après l’accord sur le climat conclu entre la Chine et les États-Unis.

La taskforce sur l’emploi devient à partir de ce G20 un groupe de travail permanent. Après les questions de chômage des jeunes, ce groupe de travail, auquel le L20 participe, se penchera sur les questions de santé et sécurité au travail, en cohérence avec les discussions qui auront lieu sur le sujet à l’OIT en 2016.

Le L20 se tourne maintenant vers la future présidence, turque cette fois, qui débutera le 15 décembre 2014. Le prochain sommet aura lieu les 15 et 16 novembre 2015 à Antalya. Le L20 revendique pour ce futur sommet une institutionnalisation du sommet du L20, un retour au dialogue social et à un rééquilibrage en faveur des syndicats, une réunion conjointe aux ministres du travail et des finances afin de donner plus de cohérences aux mesures et engagements décidés au sein de cette instance internationale, une prise en compte de la question des inégalités croissantes, de la nécessité d’augmenter les salaires pour favoriser la reprise, un travail sur la santé et la sécurité au travail, un focus sur la mise en œuvre et le financement de la protection sociale.

La Turquie n’est pourtant aujourd’hui pas un modèle de dialogue social. Elle est pointée chaque année lors de la Conférence Internationale du Travail au sein de la Commission des Normes de l’OIT pour non-respect des conventions 87 et 98 sur la liberté syndicale et la négociation collective. Les récentes déclarations du Président Erdogan sur le rôle et la place des femmes dans la société ne vont pas non plus dans le sens des conventions fondamentales 100 et 111 sur les discriminations.

Alors que les droits du travail sont sérieusement attaqués dans toutes les régions du monde, que les entreprises tirent parti de la chaîne d’approvisionnement pour augmenter leurs profits au détriment des droits des travailleurs et de l’Homme, que les inégalités explosent, il est urgent que les chefs d’États et de gouvernement envoient un signe politique fort en faveur de la cohésion sociale et du respect des valeurs démocratiques.

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