Handicap : FO toujours plus investie en faveur de l’emploi

InFO militante par Elie Hiesse, L’inFO militante

© F. BLANC

Avec près de 140 participants, la journée annuelle FO dédiée au travail et au handicap a fait salle comble le 28 novembre. Au menu, un sujet souvent invisibilisé – les femmes en situation de handicap – ainsi qu’un levier d’accès et de maintien dans l’emploi par trop méconnu : l’obligation l’obligation des employeurs d’un aménagement raisonnable permettant l’emploi des travailleurs handicapés.

Plus de 120 référents Handicap FO issus des fédérations et des unions départementales, dont celles de territoires ultra-marins, ainsi qu’une quinzaine d’intervenants, internes ou externes à l’organisation : la journée annuelle FO dédiée au travail et au handicap a fait salle comble le 28 novembre. Cela illustre la mobilisation des militants pour l’emploi des personnes en situation de handicap. Une nécessité. Le handicap est toujours le premier motif de saisine du Défenseur des droits, pour discrimination, particulièrement dans l’emploi (16% des réclamations concernent le secteur privé ; 21%, le secteur public, ndlr), a pointé le secrétaire général Frédéric Souillot, rappelant la mobilisation de l’organisation pour passer de l’égalité prescrite à l’égalité réelle pour les travailleurs handicapés.

Ce combat reste à mener. L’atteste le taux de chômage élevé des personnes en situation de handicap : 12% en 2023, contre 7,5 % pour l’ensemble de la population active. L’attestent encore les difficultés inchangées d’intégration, et de maintien, dans l’emploi : en 2023, le taux d’emploi direct des travailleurs handicapés stagnait à 3,5% dans le secteur privé, à 5,66% dans la fonction publique. En témoigne aussi l’actualité récente. Force est de constater que la liesse vécue lors des Jeux paralympiques Paris 2024 n’avait pas trouvé, cet automne, de traduction en termes de politique publique. Bien, au contraire, dans le projet de loi des Finances 2025 (désormais mis à l’arrêt), le budget de l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées), qui œuvre pour un monde du travail plus inclusif, était initialement ponctionné de 20%. Ce que FO avait aussitôt dénoncé.

Femmes en situation de handicap : la nécessité de statistiques genrées

Dans ce contexte, et parce cette journée annuelle est pensée depuis sa création (en 2000, ndlr) pour nourrir, de manière très pragmatique, les connaissances et les actions, ainsi que l’a précisé Anne Baltazar, conseillère confédérale chargée du handicap, le focus a d’abord été mis sur un sujet souvent invisibilisé : les femmes en situation de handicap. Elles subissent en effet, dans l’accès à l’emploi et dans leur parcours professionnel, des discriminations multiples et renforcées : à la fois, parce qu’elles sont femmes, parce qu’elles sont en situation de handicap mais aussi parce qu’elles sont femmes et en situation de handicap. L’approche intersectionnelle handicap et genre commençant tout juste à émerger, les études manquent sur le sujet.

Pour agir, les statistiques genrées sont nécessaires, a plaidé dans une intervention vibrante Bernadette Pilloy, pilote de la délégation « Egalité entre les femmes et les hommes » au Conseil national consultatif des personnes handicapées, présente en visio-conférence faute d’aidant(e) pour l’accompagner à la journée FO. Sa position a été partagée par nombre d’intervenants. Comme l’ergonome Camille Vogel, responsable SSCT (santé, sécurité, conditions de travail) du cabinet d’experts-comptables Legrand. Il a ainsi rappelé l’obligation faite aux employeurs de fournir des données précises et différenciant les genres dans la BDES (base de données économiques, sociales et environnementales) à disposition des représentants du personnel et pour le DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels). Il est important de genrer les taux d’accident du travail et de maladies professionnelles. Les hommes et les femmes ne sont pas exposés aux mêmes risques professionnels. Selon les genres, il y a des impacts différenciés qui doivent appeler des réponses spécifiques, a-t-elle souligné.

Méconnaissance des outils d’aménagements

Toujours pour mieux outiller les militants, la seconde partie de journée a été consacrée à un autre sujet méconnu : l’obligation d’aménagement raisonnable qui est faite depuis 2005 aux employeurs, publics comme privés, en faveur des travailleurs handicapés. Pour que ces derniers accèdent à un emploi répondant à leurs qualifications, l’exercent, y progressent et/ou s’y forment, il est imposé aux employeurs de prendre les mesures appropriées. A moins que ceux-ci ne démontrent que ces aménagements sont une charge (d’investissement, ndlr) disproportionnée. Pendant près de deux heures, médecin du travail, inspecteur du travail, juriste ont expliqué comment faire de cette obligation un outil au service de l’égalité de traitement dans l’emploi, et quels sont les obstacles aujourd’hui rencontrés.

Vadim Hosejka, inspecteur du travail FO, a constaté deux difficultés : la première, d’application dans les petites entreprises et la seconde liée, dans toutes les entreprises, à la méconnaissance des outils d’aménagement de postes (aménagements matériels, organisationnels ou compensations au poste de travail, avec par exemple des logiciels adaptés, ndlr). Les aménagements sont plus faciles dans le tertiaire que dans l’industrie, a jugé Lara Illyine, responsable du département Qualité de vie au travail et conditions de travail chez AG2R La Mondiale. Cependant, a appuyé l’ergonome, la majorité des salariés en situation de handicap n’ont pas besoin d’aménagement de postes. Autre idée reçue selon elle : le coût des aménagements qui serait trop élevé (les dépenses peuvent être financées, en partie ou totalement, par l’Agefiph ou la FIPHFP, ndlr). Dans le groupe mutualiste, par exemple, le coût d’un aménagement de poste, pour un salarié en situation de handicap, varie de 85 euros à 30 000 euros, la moyenne se situant entre 2 500 et 5 000 euros.

Conseillère experte handicap auprès de la Défenseure des droits, Fabienne Jégu a reconnu la complexité de la notion d’aménagement raisonnable, tout en jugeant que celle-ci pousse les employeurs à aller plus loin et à se poser des questions sur le maintien en emploi. «  Les employeurs sont tenus de prendre les mesures appropriées et cela, en fonction des besoins dans une situation concrète. Cela signifie qu’ils doivent se situer au-delà des mesures d’adaptation au poste : il s’agit de cousu-main. De la même manière, la notion de charge disproportionnée », qui pourrait être opposée par les employeurs, sera appréciée au cas par cas.

Fin 2025, 100% des UD FO auront un référent Handicap

A l’issue de cette journée annuelle FO dédiée au travail et au handicap, la dernière organisée par la conseillère confédérale Anne Baltazar (qui fera valoir prochainement ses droits à la retraite après plus de douze ans à la tête de la Mission Handicap de FO), celle-ci a rappelé l’importance de mobiliser le réseau des référents Handicap FO sur le sujet des aménagements raisonnables. D’autant, a rappelé la militante, que FO est reconnue comme le syndicat le plus structuré en interprofessionnel sur le sujet du handicap.

En 2023, la confédération comptait 109 référents Handicap dans les unions départementales (+ 17% par rapport à 2022) et 24 référents Handicap (+4%) dans les fédérations professionnelles, tous étant en contact avec les représentants FO dans les entreprises et dans la fonction publique. De quoi mesurer le chemin parcouru... Il se poursuivra en 2025. Laure Beyret, qui va succéder à Anne Baltazar, a déjà fixé un objectif ambitieux : 100% des 104 UD FO devront avoir nommé un référent Handicap d’ici fin 2025. Aujourd’hui, elles sont 79 à l’avoir fait.

En attendant, pour agir au quotidien, tous les participants sont repartis avec l’édition 2025 du Guide pratique FO Travail et Handicap, fort de 158 pages.

 

JN Travail Handicap 2024-053

Elie Hiesse Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération