Inaptitude professionnelle : quand l’employeur doit-il appliquer les règles protectrices en la matière ?

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© Richard DAMORET/REA

Les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle (consultation du CSE, indemnité spécifique de licenciement, période de protection contre le licenciement…) s’appliquent, dès lors que l’employeur a connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

La protection des victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle s’applique lorsque la qualification finale de l’accident est incertaine. C’est le cas lorsque la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) :

  ne s’est pas encore prononcée ;
  a refusé, par une décision faisant l’objet d’un recours, la prise en charge de l’accident au titre de la législation des accidents du travail ;
  a informé l’employeur d’un refus de prise en charge au titre du régime des accidents du travail, avant le licenciement, dès lors que l’employeur a connaissance de l’origine professionnelle de l’accident au moment du licenciement.

Le licenciement intervenu sans respecter la législation des accidents du travail est alors frappé de nullité.

C’est à la date de la rupture du contrat de travail qu’il faut se placer pour savoir si l’employeur pouvait avoir connaissance de l’origine professionnelle de l’inaptitude au travail.

L’application du régime de l’inaptitude professionnelle n’est pas subordonnée à la reconnaissance par la CPAM du lien de causalité entre l’accident du travail et l’inaptitude (Cass. soc., 22-11-17, n°16-12729) :

Les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement ; que cette application n’est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d’assurance maladie du caractère professionnel d’un accident.

La question de l’origine professionnelle de l’inaptitude doit être distinguée de la question de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie par le TASS (désormais pôle social du TGI).

Pour savoir si l’employeur est tenu à l’application des règles protectrices sur l’accident du travail ou la maladie professionnelle, le juge ne peut statuer par référence à la seule décision de la CPAM. L’avis de la CPAM ne lie pas le juge prud’homal.

En d’autres termes, ce n’est pas parce que la CPAM a refusé de reconnaître le caractère professionnel de l’accident que l’employeur n’est pas tenu d’appliquer les règles protectrices prévues par le code du travail. Le juge prud’homal doit apprécier lui-même l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude, en recherchant s’il existe un lien de causalité entre l’accident et l’inaptitude de la salariée (Cass. soc., 5-10-11, n°08-42909 ; Cass. soc., 3-7-19, n°18-16718). C’est au salarié de rapporter la preuve du lien de causalité entre l’accident et l’inaptitude.

Le juge prud’homal n’a pas à sursoir à statuer dans l’attente de la décision du TASS, en cas recours contre la décision de la CPAM portant sur la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie.

Autrement dit, le juge prud’homal n’a pas à sursoir à statuer dans l’attente de la qualification par le TASS du caractère professionnel de la maladie. Il lui revient de se prononcer lui-même sur l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude pour l’application des règles protectrices prévues par le code du travail.

Morale de l’histoire : une procédure n’engage pas l’autre… !

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