C onvoyeur de fonds depuis près de trente ans, John Monfray peut témoigner de l’importante évolution de son métier. Né en Belgique et arrivé en France à l’adolescence, il est entré chez Securipost en 1994, dans l’agence de Marseille, à l’issue de son service militaire. Depuis, l’entreprise a changé plusieurs fois de nom, elle s’est fait racheter par Securitas en 2005, mais lui n’en a jamais bougé.
Loomis, filiale de Securitas dédiée au transport de fonds, compte près de 3 200 salariés répartis en trois grands métiers : les convoyeurs qui transportent les fonds, les caissiers qui comptent les valeurs et les dabistes qui approvisionnent les distributeurs de billets.
C’est en 2000 que John Monfray se rapproche de FO, à l’occasion d’une grève historique dans le secteur. Après plusieurs braquages meurtriers, l’ensemble des salariés cessent le travail durant trois semaines pour réclamer plus de sécurité, de reconnaissance et un meilleur salaire. À l’époque, nous n’avions ni treizième mois, ni prime de risque, et il fallait faire beaucoup d’heures supplémentaires pour s’en sortir
, raconte-t-il. Grâce à cette mobilisation, la dangerosité du métier est enfin reconnue et la sécurité s’améliore. Le port du gilet pare-balles et la valise sécurisée deviennent obligatoires. Les convoyeurs perçoivent une prime de risque mensuelle.
Un délégué FO proche de la retraite lui propose de prendre sa succession. L’engagement syndical m’intéressait, j’ai relevé le challenge et ça a changé ma vie,
Dès ses premières élections, l’agence de Marseille, bastion historique de la CGT, bascule chez FO. Aujourd’hui, 85 % des 120 salariés de la cité phocéenne y sont syndiqués. Au niveau national aussi FO est numéro un, avec 31,58 % des voix.
Un métier menacé par la baisse des paiements en cash
En janvier, une intersyndicale a appelé les salariés à faire grève pour les salaires et une meilleure reconnaissance. « Après deux ans sans augmentation ni prime Covid alors que nous étions un métier de la deuxième ligne, l’ambiance était explosive », ajoute le militant, devenu délégué central.
À l’issue de cinq jours de mobilisation massive, les syndicats ont obtenu une augmentation générale de 80 euros brut pour tous. Avec le report sur l’ancienneté et le treizième mois, on arrive aux 95 euros brut que nous revendiquions, soit une hausse de 4,5 % à 5 % pour les salaires moyens, c’est du jamais vu
, se félicite-t-il.
Autre combat de John Monfray, l’amélioration des conditions de travail pour ces métiers dont la pénibilité est reconnue. On a un taux très élevé d’arrêts maladie et d’inaptitudes,
Une problématique sociétale pèse sur l’avenir du métier, la baisse inexorable des paiements en argent liquide. La réduction des volumes traités (- 12 % depuis 2019) se répercute sur les effectifs, qui sont passés de 3 500 à 3 180 salariés en trois ans. Il y a une réelle inquiétude, l’entreprise tente de diversifier son activité en installant des distributeurs ou des caisses sécurisées dans les commerces, mais c’est beaucoup moins rentable, ça nous permet juste de maintenir l’activité à flots.