L’économie collaborative est-elle le nouveau nom du travail déguisé ?

Statut par Mathieu Lapprand

Il n’y a pas que le transport de personnes à être bousculé par l’économie collaborative. Dans le secteur de la livraison de repas à domicile, les auto-entrepreneurs concurrencent les salariés. Mais le mythe du « libre auto-entrepreneur » ne dissimule-t-il pas un salarié déguisé et privé de statut ?

Les coursiers (tous auto-entrepreneurs) de Take Eat Easy livrent à vélo des plats de restaurateurs clients de la start-up. © Sebastien ORTOLA / REA

Le secrétaire général de FO et le président de l’UPA ont publié début février une tribune dénonçant la volonté du gouvernement de faciliter le recours aux micro-entreprises. Ils y déploraient le « nombre croissant d’auto-entrepreneurs économiquement dépendants, soumis à la commande d’une ou plusieurs entreprises, ces dernières y trouvant leur intérêt car elles évitent ainsi toutes les obligations liées au statut de salarié ».

Un lien de subordination évident

C’est dans la livraison à domicile de repas que s’illustrent aujourd’hui ces dérives avec leurs flottes de livreurs sous le statut d’auto-entrepreneurs, comme Take Eat Easy ou Deliveroo. Or le lien de subordination est aujourd’hui défini « par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner le manquement de son subordonné ».

Les livreurs de ces entreprises pouvant subir la sanction de ne plus être sollicités, étant sous contrôle constant par GPS de leur donneur d’ordre et recevant des directives spécifiques quant aux modalités d’exécution de leur mission, la requalification de la relation en contrat de travail est à la portée d’une cour prud’homale. Les 16 millions d’euros levés en 2015 par la start-up Take Eat Easy y suffiront-ils ? 

Mathieu Lapprand Journaliste à L’inFO militante

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