L’espèce humaine se fait entendre à Montreuil

Théâtre par Michel Pourcelot

Porté à la scène, l’ouvrage de l’écrivain Robert Antelme, résistant et déporté, est présenté, du 24 février au 6 mars, à « La Parole errante » à Montreuil, en banlieue parisienne. Une œuvre vitale sur la résistance à toutes les formes de déshumanisation.

« Il n’y a pas des espèces humaines, il y a une espèce humaine ». Certaines choses sont parfois à réaffirmer. Cette phrase est extraite de L’espèce humaine, l’ouvrage de Robert Antelme, présenté du 24 février au 6 mars à « La parole errante », à Montreuil, haut-lieu de création, mis sur pied vers 1986 par, entre autres, Armand Gatti et Hélène Châtelain, un endroit aujourd’hui menacé par les baisses de subventions du ministère de la Culture.

Paru en 1947, L’espèce humaine est le livre d’un homme face à la déshumanisation. Celui de son expérience dans un camp de concentration où il a été déporté en 1944 pour avoir appartenu à la résistance. « Plus une dictature, un ordre, quel qu’il soit, s’acharne à nier l’humanité de l’homme, plus il la met en évidence », souligne Maylis Isabelle Bouffartigue, qui a mis le texte en scène, ou plus exactement « en plateau », tout en ombres et lumières. Elle en est aussi interprète aux côtés de Diogène Ntarindwa, un comédien d’origine rwandaise. C’est à elle que l’on doit, il y a peu, La mise en procès, une création à propos du Code noir, du Code de l’indigénat et du Code des étrangers.

« La mise en question de la qualité d’homme provoque une revendication presque biologique d’appartenance à l’espèce humaine. Elle sert ensuite à méditer sur les limites de cette espèce, sur sa distance à la nature et sa relation avec elle, sur une certaine solitude de l’espèce donc, et pour finir, surtout à concevoir une vue claire de son unité indivisible » écrivait Robert Antelme, qui s’engagera notamment contre la guerre en Algérie, signant le manifeste des 121 en 1960. Par la suite exclu du Parti communiste français, il dénonce, dès 1949, les camps staliniens, quelque peu poussé par David Rousset (1912-1997), qui a également témoigné sur les camps nazis. Et de demander à ce dernier, dans une lettre (éd. Léo Scheer), d’étendre son enquête à « tout système susceptible de recourir à la déportation et à la concentration de masse. Et aux conditions d’exploitation par le travail en système capitaliste ».


L’espèce humaine . Mise en scène de Maylis Isabelle Bouffartigue. Dramaturgie, extraits choisis de L’espèce humaine de Robert Antelme : Olivier Le Cour Grandmaison et Maylis Isabelle Bouffartigue. Interprétation : Diogène Ntarindwa et Maylis Isabelle Bouffartigue.
Du 24 février au 6 mars, à La parole errante, 9, rue François Debergue 93100 Montreuil. M° Croix-de-Chavaux. A 20h30 du mardi au samedi et à 16h les dimanches (relâche le lundi 29 février).
Durée : 80 mn. Rencontre-débat à l’issue de chaque représentation. Tous publics à partir de 12 ans.
Tarif : 10€
Réservations : 01 48 70 00 76

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante

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