Depuis 1995, l’étiquetage énergétique de l’Union Européenne a fait ses preuves : 85 % des consommateurs européens en tiennent compte lors de leurs achats. Ce système a également favorisé l’innovation industrielle, la plupart des produits se situant aujourd’hui dans les classes les plus élevées (A+++, A++, A+) au détriment des autres catégories, désormais vides (parfois même la classe A). Cette médaille a toutefois son revers, car il est désormais difficile pour les consommateurs de repérer les produits les plus performants : ils peuvent penser qu’en achetant un produit de la classe A+ ils achètent l’un des plus performants sur le marché, alors qu’en réalité, c’est parfois l’un des moins performants.
Les « notes » énergétiques étant devenues un argument de vente, la tentation peut être grande pour les fabricants de présenter un bilan flatteur, voire déloyal, d’autant que la législation européenne leur laisse le soin de tester eux-mêmes leurs appareils en faisant appel à des laboratoires qu’ils rémunèrent et dont l’indépendance peut être à ce titre, sujette à caution.
Une récente actualité, en matière automobile, outre-Rhin, doit appeler à davantage de vigilance sur la réalité des données avancées par les fabricants. Cela est vrai également pour les produits de consommation courante, tels que l’électroménager.
La réglementation
La réglementation européenne sur l’étiquetage énergétique, mise en place en 1992, a été modifiée par la directive 2010/30/UE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 2010 concernant l’indication, par voie d’étiquetage et d’informations uniformes relatives aux produits, de la consommation en énergie et en autres ressources des produits liés à l’énergie.
Cette réglementation vise à encourager les économies d’énergie tout en favorisant la circulation des produits sur le marché intérieur s’il le fallait. À ce jour, 16 catégories de produits sont soumis à la réglementation européenne relative à l’étiquetage énergétique : réfrigérateurs, lave-linge, lave-vaisselle, chaudières, pompes à chaleur, chauffe-eau, éclairage (domestique et tertiaire). Il est donc essentiel de veiller à la fiabilité des informations afin de préserver la confiance des consommateurs et d’obtenir les résultats attendus en matière d’économies d’énergie.
Les contrôles
Les contrôles de l’étiquetage énergétique relèvent des services du ministère de l’économie : direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) au niveau national, directions départementales de la protection des populations (DDPP) au niveau local.
L’étiquetage énergétique fait l’objet d’un plan annuel de contrôle de la DGCCRF depuis 2013, reconduit chaque année depuis lors. Le taux d’anomalies relevé en 2014 s’élevait globalement à 20 % environ, avec de forts écarts entre familles de produits : 50 % pour les lampes et luminaires, 10 % pour les lave-linge. Toutefois, alors que près de 50 % des établissements contrôlés présentaient au moins une anomalie en matière d’étiquetage énergétique et d’information sur les prix des équipements électriques, seuls 5 % ont donné lieu à un procès-verbal. L’absence de données plus précises communiquées par la DGCCRF, malgré nos demandes réitérées, ne permet pas de caractériser les manquements contraventionnels.
Mais l’initiative MarketWatch (initiative d’ONG européennes qui vise à une meilleure surveillance du marché en ce qui concerne les étiquettes énergie) permet d’avoir des résultats plus précis. Et si les magasins physiques ont un taux de non-conformité global de 30 %, les sites de vente en ligne tutoient les 90%. Les non conformités sont plus souvent caractérisés par l’absence ou la difficulté de trouver ou de lire l’étiquette énergie ; plus rarement correspondent-ils à une erreur de classement dans l’échelle de A à G (18 % des produits toutefois affichent une consommation énergétique réelle supérieure à celle indiquée). Quant à l’achat en ligne, l’information est majoritairement absente.
On rappellera par ailleurs que l’étiquetage énergétique est défini par les fabricants sur la base de tests qu’ils réalisent, avec un laboratoire interne s’ils en sont équipés. Ce système d’auto-déclaration est prévu par le droit européen et un État membre n’a pas le droit d’imposer une certification du produit par tierce partie. Il convient de rappeler que ce système d’auto-déclaration est le droit commun européen en matière de mise sur le marché de produits : c’est entre autres le cas pour des enjeux de sécurité des consommateurs ou des enfants (par exemple pour la sécurité des produits électriques ou des jouets). La certification reste l’exception…
Quelles évolutions ?
La directive 2010/30/UE est actuellement en cours de révision. Pour informer plus clairement le consommateur sur l’efficacité énergétique des produits, qui sont actuellement classés selon des échelles différentes (de A à G, de A+++ à D, etc.), et améliorer le respect des règles par les producteurs et les détaillants, la Commission européenne propose un système d’étiquetage énergétique révisé comprenant :
- une échelle d’étiquetage énergétique unique étalonnée de « A à G » : la Commission propose de revenir au système éprouvé de l’échelle de « A à G », bien connu des consommateurs, pour l’étiquetage des produits économes en énergie, assorti d’une procédure permettant le remaniement ultérieur des étiquettes existantes ;
- une base de données numérique sur les nouveaux produits économes en énergie : la Commission propose que tous les nouveaux produits mis sur le marché de l’UE soient enregistrés dans une base de données en ligne, qui offrira une transparence accrue et facilitera la surveillance du marché par les autorités nationales.
L’avantage économique pour les consommateurs de ce projet de révision a été quantifié : il leur permettrait de réaliser une économie supplémentaire de 15 euros par an qui s’ajoute aux 465 euros par an déjà économisés actuellement, pour atteindre un montant de 480 euros par an et par ménage.
Comment expliquer alors que malgré des gains d’efficacité, la facture finale augmente à prix d’énergie égal ? C’est simple : un plus fort équipement des ménages et des usages plus fréquents entraînent une hausse de la consommation électrique en Europe. Le développement de la domotique, de la maison connectée ainsi que des comportements paradoxaux (« mon ampoule consomme moins, donc je laisse la lumière plus longtemps ») ou la recherche de confort (la climatisation) constitue un phénomène prégnant ; ainsi la consommation d’électricité des ménages a augmenté de 31,92 % entre 1990 et 2010.