L’employeur a une obligation générale de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés. Le code du travail prévoit donc que l’employeur « prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (art. L 4121-1 du code du travail).
Dans ce cadre, l’employeur doit « planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel » (art. L 4121-2 du code du travail).
Ainsi, l’obligation de sécurité de résultat qui incombe à l’employeur trouve à s’appliquer en matière de harcèlement moral au travail. En effet, l’article L 1152-4 du code du travail dispose que : « L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral ».
En conséquence, afin de protéger la victime du harcèlement, l’employeur peut, voire doit, utiliser son pouvoir disciplinaire pour sanctionner l’auteur du harcèlement (art. L 1152-5 du code du travail).
Si l’employeur ne réagit pas face à une situation de harcèlement, sa responsabilité pourrait être engagée, quand bien même il ne serait pas lui-même auteur de l’acte (Cass. soc., 10-5-01, n°99-40059 ; Cass. soc., 1-3-11, n°09-69616).
De plus, dès lors que le salarié prouve que l’employeur n’a pas pris toutes les mesures nécessaires pour prévenir les agissements de harcèlement moral et qu’un préjudice distinct en a découlé, l’employeur doit verser au salarié une indemnisation (Cass. soc., 6-6-12, n°10-27694 ; Cass. soc., 17-10-12, n°11-18884).
Ainsi, au regard de cette jurisprudence a priori très lourde de conséquences pour l’employeur, ce dernier peut estimer que le maintien dans l’entreprise de l’auteur du harcèlement est devenu impossible et ainsi procéder à son licenciement.
Toutefois, la Cour de cassation, le 22 octobre 2014 (n°13-18862) est venue préciser que l’employeur ne peut pas systématiquement licencier pour faute grave l’auteur présumé du harcèlement. En effet, les Hauts magistrats considèrent que : « l’obligation faite à l’employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser les agissements de harcèlement moral n’implique pas par elle-même la rupture immédiate du contrat de travail d’un salarié à l’origine d’une situation susceptible de caractériser ou dégénérer en harcèlement moral ».
Dans cette hypothèse, l’automaticité du recours au motif de la faute grave, privatif des indemnités de préavis et de licenciement, est impossible.
Il faut donc prendre en compte le contexte dans lequel les agissements susceptibles de conduire à une situation de harcèlement se produisent.
Ainsi, la faute grave n’avait déjà pas été retenue lorsque le salarié, licencié pour avoir adopté envers ses salariés un management constitutif de harcèlement moral, n’avait jamais été sensibilisé aux difficultés d’exercice de ses fonctions d’encadrement et était lui-même victime de harcèlement moral (Cass. soc., 29-1-13, n°11-23944).
Dans l’affaire du 22 octobre 2014, il était reproché à la salariée d’avoir fait « preuve d’autoritarisme et d’une agressivité non justifiée à l’égard des salariés placés sous sa subordination, à l’origine d’un climat détestable ayant notamment provoqué le placement d’une salariée en arrêt de travail pour cause d’anxiété réactionnelle liée au travail ».
A titre d’exemple, la salariée imposait des places précises pour les réunions durant lesquelles il leur était interdit d’échanger le moindre mot.
Puis, cette salariée interdisait aux autres salariés, tout contact avec le directeur des ventes, ce qui aboutissait corrélativement à isoler ce dernier. Enfin, elle imposait aux salariés de réaliser un rapport d’activité quotidien, alors que la direction de l’entreprise n’exigeait pas un tel rapport, sous peine de recevoir de nombreuses relances au ton sec.
Pour autant, en l’espèce, la qualification de harcèlement moral n’a pas été retenue.
Néanmoins, il a été admis que l’attitude autoritaire et inappropriée de la salariée constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement. Ainsi, en raison de la requalification de son licenciement pour cause réelle et sérieuse, et non plus pour faute grave, la salariée a obtenu un rappel d’indemnité de préavis et d’indemnité conventionnelle de licenciement. (Cass. soc. 22-10-14, n°13-18862).