L’ombre des drones plane sur le monde du travail

Robotique par Clarisse Josselin

Drone de surveillance des ouvrages d’art de la SNCF. ©Ian HANNING/REA

Depuis l’autorisation, en mai 2012, d’utiliser des drones civils dans le ciel aérien français, ces petits appareils commencent à être expérimentés dans divers secteurs professionnels : énergie, transports, agriculture, bâtiment… Un progrès technologique mais aussi un risque pour l’emploi des salariés.

Le dispositif de sécurité de la conférence sur le climat Cop21, qui se tiendra début décembre à Paris avec une centaine de chefs d’État, intégrera des drones pilotés par les forces de l’ordre.

Ces robots commencent à s’imposer dans plusieurs secteurs professionnels avec trois atouts : précision, rapidité d’intervention et coût réduit. Équipés d’appareils photo HD, de caméras thermiques ou de lasers, ils permettent notamment la modélisation en 3D et des relevés topographiques d’une extrême précision.

En agriculture, ils servent à suivre les animaux ou la croissance des plantes. ERDF les utilise pour inspecter les lignes électriques.

Le conseil départemental des Alpes-Maritimes acquerra son premier drone en 2016 pour surveiller l’état des ponts et barrages, ou inspecter les falaises afin d’éviter les éboulements. Avec 2 500 euros par jour, le coût sera quatre fois inférieur à celui des hélicoptères utilisés jusqu’à présent.

La SNCF possède déjà une équipe dédiée de quinze personnes. Les drones sont utilisés pour surveiller les voies et leurs abords : végétation, intrusions, diagnostics post-tempête… « Le développement des drones est à mettre en relation avec les nouveaux modes de production de plus en plus automatisés à la SNCF, dans une logique de rentabilité, réagit Christophe Jocquel, secrétaire fédéral FO Cheminots. Contre le vandalisme, c’est un plus, on ne peut pas tout surveiller. Mais nous sommes circonspects sur d’autres applications. Le défaut qui a conduit à l’accident de Brétigny n’aurait pas été détecté par un drone, ni par un système électronique. Pour la maintenance, rien ne remplace l’inspection humaine. »

Robotisation : FO prône le principe de précaution

Dans le bâtiment en revanche, le drone prend déjà des allures de « Big Brother ». Sur un chantier de Sacramento, en Californie, des promoteurs ont utilisé des drones pour relever d’éventuels retards dans l’avancée des travaux et ont pu identifier les équipes responsables, selon Technology Review.

Au Japon, selon le site Futura Sciences, la société Komatsu a recours à des pelleteuses et des bulldozers sans chauffeurs. Les engins se déplacent d’après une modélisation en 3D transmise par des drones, sous la surveillance tout de même d’un opérateur.

Dans ses « Réflexions sur l’impact du numérique sur le travail », parues en septembre dernier, la confédération FO prône le principe de précaution. Si la robotisation peut « permettre d’améliorer les conditions de travail et d’en réduire la pénibilité », elle se doit d’être « maîtrisée, encadrée, puis évaluée », pour éviter la destruction des emplois, la suppression des qualifications, la réduction des rémunérations et surtout « l’anéantissement de l’identité même du salarié ». 


Zoom : Vers une réglementation de l’usage des drones civils
La France compte près de 200 000 drones de loisir, mais la législation reste quasi inexistante. Inquiet de la hausse des survols de zones sensibles par des appareils malveillants, le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) a rendu un rapport au Parlement le 21 octobre dernier.
Il préconise notamment l’enregistrement des drones de plus de un kilo, l’installation de balises et de lumières pour faciliter leur repérage et l’obligation pour les pilotes de suivre une formation.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante