« La conférence sur le climat doit intégrer une dimension sociale forte et ambitieuse »

Jean-Claude Mailly, Secrétaire général de Force Ouvrière par Evelyne Salamero, Jean-Claude Mailly

F. Blanc / FO Hebdo - CC BY-NC 2.0
Article publié dans l’action Dossier Climat

Des exemples concrets, sur tous les continents, montrent qu’il est grand temps de s’occuper des impacts sociaux du réchauffement climatique et les évolutions nécessaires pour ne pas amplifier le phénomène exigent des formations spécifiques et de nouvelles qualifications, souligne le secrétaire général de FO.


Sharan Burrow
Secrétaire générale de la CSI (Confédération syndicale internationale). F. Blanc / FO Hebdo - CC BY-NC 2.0

Lire interview de Sharan Burrow : « L’action climatique est une affaire syndicale car il n’y a pas d’emplois sur une planète morte »


FO Hebdo : Quelles sont les principales revendications que FO voudraient voir prises en compte par la COP 21 de décembre ?

Jean-Claude Mailly : Comme la Confédération syndicale internationale, FO considère que cette COP doit être « la COP du social ». Les dernières conférences n’ont traité que des questions climatiques et de leurs effets sur l’environnement et l’économie. Il est désormais indispensable d’appréhender les conséquences sociales et celles sur les salariés (dégradation des conditions de travail, délocalisations des lieux de travail par exemple du fait de la chaleur ou de la montée des eaux, adaptations horaires du fait de la chaleur et obligation de travailler la nuit, etc). Des exemples concrets, sur tous les continents, montrent qu’il est temps de s’occuper de ces impacts sociaux qui ne cessent de s’aggraver. Par ailleurs, ces évolutions imposées ou celles nécessaires pour ne pas amplifier le phénomène de réchauffement exigent des formations spécifiques, de nouvelles qualifications , car il va souvent devoir « faire autrement » et des mesures en termes d’organisation et de condition de travail pour les salariés concernés. Comme FO le revendique, il faut donc que la partie « décisionnelle » du texte de l’accord issu de la COP intègre une dimension sociale forte et ambitieuse. Avec des mesures financées.


FO Hebdo : Comment selon FO investissements publics et privés doivent-ils s’articuler ?

Jean-Claude Mailly : Pour FO, la priorité est l’intervention et l’investissement des États et des collectivités. Cette action publique doit être mondiale et massive, bien au-delà de la constitution (nécessaire) d’un Fonds vert ou des aides aux pays en voie de développement dont les populations sont plus impactées par le réchauffement climatique. FO a défendu que les solutions techniques ou innovantes qui pourraient voir le jour à l’échelle mondiale ou d’un continent ou d’un État fassent l’objet d’un investissement public type « grands projets ». Cela permettrait des réalisations concrètes tout en créant de l’emploi et sans doute de nouvelles qualifications. L’investissement public peut alors servir « d’effet levier » pour permettre aux investisseurs privés d’abonder le financement de ces grands chantiers publics. Mais pour FO, en aucun cas il ne peut s’agir de procédure type « Partenariat Public-Privé ». Enfin, c’est aux entreprises de financer une bonne partie des adaptations évoquées précédemment et les indispensables compensations et aides à accorder aux salariés pour faire face aux conséquences et évolutions professionnelles liées au réchauffement climatique.


FO Hebdo : Comment FO va-t-elle décliner la campagne de mobilisation internationale en faveur d’une « transition juste » lancée par la CSI ?

Jean-Claude Mailly : Tout d’abord, il faut préciser que nous avons toujours travaillé avec la CSI dans les COP précédentes et bien entendu en préparation de celle de Paris. Cette question de transition juste sociale comporte une immensité d’aspects qui vont, de fait, se retrouver dans des sujets de négociation collective en particulier au niveau interprofessionnel et dans les branches. Le fait de « devoir faire autrement » ou celui de créer des formations et qualifications nouvelles s’appliquent déjà, par exemple dans les champs du BTP. Les syndicats FO auront un rôle à jouer dans l’appréhension, la traduction de ces évolutions professionnelles mais aussi dans l’établissement de revendications spécifiques, sectorielles ou générales pour donner aux salariés les moyens (et les salaires !) de ces changements. De plus, recenser les nouveaux besoins collectifs des salariés pour faire face à cette situation permettra de revendiquer de nouveaux droits.

Evelyne Salamero Ex-Journaliste à L’inFO militante

Jean-Claude Mailly Ex-Secrétaire général de Force Ouvrière