Chaque jour compte et sans le versement du prêt garanti par l’État ou sans offre ferme de But dans les prochains jours, Conforama va se trouver en état de cessation de paiement, mettant en danger plus de 9000 emplois directs et 20 000 emplois indirects
, alerte l’intersyndicale de Conforama, comptant FO, dans un communiqué daté du 2 juin.
Presqu’un an après l’annonce d’un plan de restructuration prévoyant 32 fermetures de magasins et 1900 suppressions de postes, les salariés de l’enseigne d’ameublement sont de nouveau plongés dans l’angoisse et l’incertitude quant à leur avenir. Ces derniers mois, l’entreprise commençait à sortir de l’ornière où l’avaient plongée les malversations comptables de son actionnaire, le groupe sud-africain Steinhoff. L’entreprise était parvenue à respecter les objectifs financiers fixés avec ses créanciers et à retrouver une situation de trésorerie positive. Les deux mois de confinement liés à la crise sanitaire ont stoppé net cette embellie.
A court de rentrées financières, Conforama a sollicité le 18 mars un prêt garanti par l’État (PGE) d’un montant de 320 millions d’euros auprès du Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri). Ce dispositif permet aux entreprises de traverser la crise liée au Covid-19 et de préserver les emplois. Deux mois et demi plus tard, la réponse se fait toujours attendre.
Des ventes qui cartonnent
Il y a énormément d’incertitudes, ça ne peut plus durer, les salariés n’en peuvent plus
, prévient Jacques Mossé-Biaggini, délégué central FO, deuxième organisation syndicale de l’enseigne. On ne sait pas si les salaires de juillet pourront être payés.
Même si les ventes redécollent depuis la levée du confinement, la survie de l’enseigne est menacée. Les magasins ont quasiment tous rouvert et selon le P-DG ça cartonne, les chiffres sont même meilleurs que les années précédentes à la même période, poursuit le délégué central FO. Le problème c’est qu’on ne fait que vider les stocks, on ne peut pas faire appel aux fournisseurs.
L’intersyndicale demande au ministre de l’Economie de sortir de son silence. Elle revendique l’obtention sans délais du PGE et que la lumière soit faite « sur les autres solutions pérennes examinées ». La presse a révélé que Bercy appuyait une reprise de Conforama par But.
L’appel des représentants du personnel a été entendu. Le Ciri va organiser dans la matinée du 5 juin une conférence téléphonique avec le CSE central, les délégués syndicaux centraux et le directeur général de Conforama. On espère qu’il en sortira quelque chose de concret et d’acceptable, sinon on se battra jusqu’au bout
, prévient Jacques Mossé-Biaggini.
Des indemnités de licenciement au minimum légal ?
Jusqu’à présent, les informations tombent au compte-goutte pour les représentants du personnel. Et elles sont parfois contradictoires, ajoute le délégué central FO. Le 22 mai, le Ciri nous a confirmé en visioconférence que Conforama était éligible au PGE. L’État a accepté de porter son taux de garantie pour le prêt à 90%. Mais BNP et HSBC, deux des quatre banques sollicitées, se montrent réticentes. Or ces deux banques sont importantes pour But. Et si But se dit intéressée dans les médias par un rachat, aucune offre ferme n’est encore parvenue à la direction de Conforama.
D’où l’interrogation de l’intersyndicale : Un dépôt de bilan de Conforama profiterait-il à un potentiel repreneur avec l’assentiment de l’État ?
Le délégué central FO ne se montre pas opposé à une reprise par Mobilux, actionnaire de But. On ne peut pas rester dans l’orbite Steinhoff, explique-t-il. Si But apporte les garanties qu’il n’y aura pas un PSE bis, ce serait acceptable, même si nous avons pointé un certain nombre de risques.
Une autre incertitude concerne la mise en œuvre du PSE, qui avait fait l’objet d’un accord signé en novembre 2019 par trois organisations syndicales dont FO. Seuls 400 salariés sont partis à ce jour pour 1900 postes supprimés. La direction de Conforama n’a pas les moyens financiers de verser les indemnités supra-légales que nous avions négociées, s’inquiète Jacques Mossé-Biaggini. Elle avait souscrit pour cela un emprunt de 110 millions d’euros, mais les créanciers refusent de le financer sans le PGE, c’est un cercle infernal. Sans l’octroi du PGE, les 1500 salariés qui restent à licencier risquent d’être indemnisés par les AGS, avec seulement le minimum légal.