La CJUE précise que tout travailleur, qu’il ait été absent à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie de quelque nature qu’elle soit, doit avoir droit à un congé annuel payé d’au moins 4 semaines (CJUE, 24-1-12, aff. C-282/10, Dominguez).
En d’autres termes, la CJUE reconnaît que le salarié en maladie non professionnelle acquiert des jours de congés payés dans la limite de 4 semaines.
Dans une décision du 13 mars 2013 (n°11-2285), la Cour de cassation avait précisé que la directive communautaire n’avait pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers (c’est-à-dire entre deux personnes de droit privé).
Cela signifie que la directive n°2003/88/CE ne peut permettre, dans un tel litige, d’écarter les effets d’une disposition de droit national contraire. En effet, en droit français, l’article L 3141-5 du code du travail refuse d’assimiler à un temps de travail effectif la période de suspension pour maladie non professionnelle.
Par contre, les absences pour accident de trajet, accident du travail et maladie professionnelle ouvrent droit, dans la limite d’une durée d’un an, à des congés payés (Cass. soc., 3-7-12, n°08-44834).
Cette limitation à un an est également contraire au droit communautaire mais en l’absence d’effet direct de la directive CE entre particuliers, les salariés de droit privé ne peuvent que se retourner contre l’État pour transposition incorrecte de la directive (TA Clermont Ferrand, 1re ch., 6 avril 2016, n°1500608).
Comme nous l’indiquions dans nos InFOjuridiques (Voir InFOjuridiques, n°77, mars/mai 2012), lorsque le litige oppose un particulier à l’État, la disposition d’une directive communautaire claire, précise et inconditionnelle produit un effet direct.
En l’espèce, l’article 7 § 1 de la directive 2003/88/CE satisfait à ces critères.
La CJUE reconnaît la qualité d’État de manière très extensive.
A la qualité d’État « tout organisme, quelle que soit sa forme juridique, qui a été chargé, en vertu d’un acte de l’autorité publique et sous le contrôle de cette dernière, d’accomplir un service d’intérêt public et qui dispose à cet effet de pouvoirs exorbitants par rapport aux règles applicables dans les relations entre particuliers » (CJCE, 19-4-07, Farrell, C-356/05, point 40 ; CJCE, 12-7-90, C-188/89, Foster, point 20).
Dans une décision du 22 juin 2016 (n°15-2011), la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler avec force ce principe.
Dans cette affaire, le litige opposait un salarié avec une entreprise privée délégataire d’un réseau de transports en commun, qui assurait un service public dont l’étendue, les modalités et les tarifs étaient fixés par l’autorité publique organisatrice et dont les agents du réseau de transports publics étaient habilités par la loi et le règlement à constater les contraventions afférentes.
L’employeur pouvait donc être assimilé à l’État.
Dès lors, la directive communautaire pouvait produire un effet direct en droit interne.
Par conséquent, la Cour de cassation a considéré que le salarié était en droit de prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de congés payés pour la période d’absence pour accident du travail au-delà d’un an (limite normalement fixée par l’article L 3141-5 du code du travail).
Toutefois, en l’espèce, l’arrêt de la cour d’appel a été cassé dans la mesure où il avait accordé des droits supérieurs aux 4 semaines de congés payés, garanties par le droit communautaire.
Enfin, la Cour de cassation relève que « si des dispositions ou pratiques nationales peuvent limiter le cumul des droits au congé annuel payé d’un travailleur en incapacité de travail pendant plusieurs périodes de référence consécutives au moyen d’une période de report à l’expiration de laquelle le droit au congé annuel payé s’éteint, dès lors que cette période de report dépasse substantiellement la durée de la période de référence pour laquelle elle est accordée, l’article L 3141-5-5° du code du travail a pour objet de limiter à un an la période pendant laquelle un salarié en arrêt de maladie pour cause d’accident de travail ou de maladie professionnelle peut acquérir des droits à congés payés et non d’organiser la perte de droits acquis qui n’auraient pas été exercés au terme d’un délai de report ».
On ne peut que saluer cet effort de la Cour de cassation qui, dans cet arrêt à une importante publicité (au rapport annuel et sur internet) trouve un moyen détourné de sanctionner la non-conformité du droit national à celui de l’Union.