La liberté d’expression des salariés sur Internet sous haute protection

Vos droits par Evelyne Salamero

La Cour de cassation a tranché en faveur d’un salarié licencié pour faute grave pour avoir critiqué sur un site Internet (Miroir social) le motif de licenciement d’un de ses collègues. Les propos en cause étaient les suivants : « Cet électricien […] est sanctionné pour avoir soi-disant mal répondu à son chef d’équipe, motif monté de toutes pièces pour masquer la véritable raison de son licenciement. Ce jeune employé a osé revendiquer l’application du Code du travail et des conventions collectives concernant le paiement des trajets de l’agence aux chantiers, que notre employeur refuse de compter en temps de travail effectif. »

L’employeur a invoqué un « abus de la liberté d’expression » et un « manquement du salarié à son obligation de loyauté ». En effet, selon la jurisprudence, « l’exercice de la liberté d’expression des salariés en dehors de l’entreprise ne peut justifier un licenciement que s’il dégénère en abus ». Mais le juge a refusé de reconnaître l’abus, car celui-ci ne peut être caractérisé que lorsque les termes utilisés par le salarié sont injurieux, diffamatoires ou excessifs. Il a également souligné que le site Internet revêtait un « caractère quasiment confidentiel ».

Et sur les réseaux sociaux ?

Qu’en serait-il si un salarié s’exprimait de la sorte sur un réseau social de type Facebook ? La Cour de cassation n’a encore jamais tranché cette question. La cour d’appel de Rouen a estimé, dans un jugement de 2011, que « ce réseau [Facebook, NDLR] peut constituer soit un espace privé, soit un espace public, en fonction des paramétrages effectués par son utilisateur ». En n’activant pas les paramètres de confidentialité, le titulaire semble accepter que ses propos tombent dans la sphère publique. En conséquence, lorsque le compte n’est pas « bloqué », il semblerait que l’employeur dispose du droit de le consulter et de se prévaloir des propos y figurant pour fonder une sanction disciplinaire, mais à la condition, là encore, de démontrer l’abus à la liberté d’expression. Affaire à suivre… 


Rappel : Liberté fondamentale
Le salarié jouit dans et hors de l’entreprise de la liberté d’expression, qui est une liberté fondamentale reconnue par de nombreux textes (art. L 2281-3 du Code du travail, Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789).

Evelyne Salamero Ex-Journaliste à L’inFO militante

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