C’était la première grève depuis trente-sept ans chez Lafarge Bétons, l’une des branches du géant du bâtiment Lafarge-Holcim. Fin février, les salariés, demandant 3,5% d’augmentation, ont débrayé pour les salaires, pendant deux à cinq jours selon les sites, et cela à l’appel notamment de FO. Partie du Sud, la grève a gagné trois autres régions, dont la Bretagne. Un mouvement qui avait de quoi surprendre la direction, car si la division Lafarge Ciment a déjà eu recours plusieurs fois à la grève, les mouvements sont rares dans les deux autres secteurs : Lafarge Bétons et Lafarge Granulats (c’est-à-dire les carrières). La surprise pouvait être importante encore car FO n’est pas le syndicat leader dans l’entreprise : Le mouvement est parti du bout du monde, (le Sud, Ndlr) et de deux délégués syndicaux d’une organisation minoritaire,
Comme souvent, le manque de reconnaissance a constitué le déclencheur de la mobilisation. La direction accordait 3% d’augmentation générale, mais à partir du mois de février et non de janvier
, expose Jean-Maurice Valon, délégué FO à Yffiniac. Si deux autres syndicats ont accepté cette proposition, FO a senti monter le malaise : C’était un manque de considération, les gens ont trouvé ça petit qu’on rogne un mois d’augmentation après tout ce qu’ils ont donné à l’entreprise !
De plus, le groupe se porte bien : Il y a de l’argent pour désendetter la société et en racheter d’autres,
Un rythme de travail saisonnier difficile
Les cimentiers vont très bien à présent,
Eric Le Courtois souligne de son côté une préoccupation plus globale : Ce sont des gens dont les femmes sont aides-soignantes, travaillent dans la restauration etc., donc dans des secteurs où les salaires sont faibles. Ils se battent donc aussi pour améliorer les revenus de leurs familles
, explique-t-il.
Pour l’instant, la direction n’a pas répondu favorablement mais a créé un comité de réflexion sur les problématiques soulevées, dont celle du rythme de travail, difficile, explique Jean Maurice Valon. Lié à l’activité saisonnière du béton, ce rythme est au plus haut l’été, jusqu’à 48 heures de travail par semaine, et cela entraîne un épuisement physique
mais aussi d’ordre social, les salariés, harassés par le travail pendant ces périodes, n’ont pas le loisir de profiter entre autres de leur univers familial et amical, insiste le militant. Or les salaires, annualisés (sur une base de 1 607 heures, avec trois semaines de travail et une de repos), intègrent le lissage d’heures supplémentaires, ce qui induit une baisse globale de la rémunération des salariés. Pour le militant FO, alors que la direction n’a rien voulu accorder sur les salaires, la motivation des salariés risque fort de diminuer. Certains feront moins d’heures,