Les langues étrangères, ce n’était pas le fort de Laure Beyret. Je baragouine en anglais !
avoue-t-elle volontiers. Mais la nouvelle conseillère confédérale FO Mission-Handicap avait une autre corde à son arc, plus rare et donc précieuse. J’ai tout de suite été très à l’aise avec la langue des signes française.
Lors de ses études d’Histoire à Bordeaux, à la fin des années 2000, Laure Beyret file sur ses pauses de midi à l’Institut national des jeunes sourds (INJS) local pour y apprendre à « signer ». Là-bas, elle découvre aussi qu’on manque d’enseignants spécialisés. La suite ne fait plus de doute : c’est auprès des enfants et adolescents malentendants qu’elle s’engage comme professionnelle. C’est une de mes grandes fiertés : avoir appris à écrire et à lire à des jeunes sourds, qui sont donc autonomes dans la vie et pourront tout affronter.
Un parcours qui prend sa source dans l’histoire familiale de Laure Beyret. Je viens d’un petit village de Dordogne qui, pour l’anecdote, s’appelle La Force,
C’est là que naît la sensibilité de la conseillère de 42 ans pour les questions de handicap. Issue d’une famille pas politisée ni engagée syndicalement, on est plutôt introvertis sur les questions de militantisme
, l’engagement syndical viendra plus tard, à l’occasion de sa titularisation à l’INJS de Bordeaux et pour laquelle se bat une collègue syndiquée à FO. Je lui ai fait la promesse que je continuerai à militer.
FO majoritaire depuis les dernières élections
La nouvelle fonctionnaire de l’enseignement spécialisé ne prend pas sa promesse à la légère. Lorsqu’elle arrive à l’INJS de Paris en 2012, il n’existe pas de section FO. Qu’à cela ne tienne, elle la crée, et passe les dix années suivantes à favoriser le développement de sections FO à l’INJS de Chambéry et à l’Institut national des jeunes aveugles (INJA), ainsi que leur coordination à l’échelle du pays. Aux dernières élections professionnelles en 2022, on présentait des listes dans les cinq instituts, et on est devenus majoritaires avec 21 sièges sur 32.
Dans les cinq instituts que regroupe le pays et qui auparavant communiquaient peu, l’action collective a permis aux agents de peser dans le rapport de force. Nous appartenons au versant de l’État de la Fonction publique, et cela fait des années qu’on est menacés de transfert vers le versant hospitalier. Sans FO, on y serait déjà
, assure Laure Beyret. Depuis 2018, les INJS n’ouvrent plus de concours, voie de titularisation des agents. Ils essayent d’éteindre les corps spécialisés de fonctionnaires. Sachant que les contractuels ont un statut trop précaire pour monter au créneau et faire grève, les instituts seraient alors plus faciles à transférer.
Un régime dérogatoire permet pourtant d’obtenir des titularisations sans ouverture de concours. Ça repose sur de la négociation, et on en obtient. On y arrive !
L’implication forte de toute l’organisation
Les cinq instituts emploient à eux tous 1 000 agents de la Fonction publique. On ne pèse rien au niveau national, mais FO s’est toujours soucié de tous ces petits syndicats,
En particulier cette question du handicap, enjeu de société. C’est un sujet qui concernera tout le monde à l’avenir, expose la militante. On connaît tous une personne en situation de handicap dans notre entourage, et avec le recul de l’âge de départ à la retraite, il se peut qu’on le devienne nous-mêmes. Il s’agit d’un vrai sujet de société : comment arriver à la retraite sans être en situation de handicap ?
Chaque année à la confédération se tient la journée Travail et Handicap, où tous les référents se retrouvent autour d’un thème – cette année, autour des jeunes et des cadres en situation de handicap, le 27 novembre. On fait venir des intervenants extérieurs : des rapporteurs du Sénat, des membres d’associations, la mission locale… Ils viennent partager leur expérience et donner des clés de compréhension aux camarades.
La Mission-Handicap de FO participe également au Duoday, événement ministériel qui donne à des personnes en situation de handicap l’opportunité de visiter certains lieux de travail.
Pour Laure Beyret, la force de FO repose surtout sur le maillage territorial unique de référents handicap : un par union départementale et un par fédération, parfois aussi dans certaines grosses entreprises. On est le seul syndicat à avoir un tel réseau.
Négocier un accord handicap, éviter les licenciements pour inaptitude, faire titulariser des personnes hors concours dans la fonction publique : On obtient plein de petites victoires, qui n’ont pas de prix.
