Le Comité de suivi des retraites (CSR) voudrait–il inciter, voire forcer la main au pouvoir exécutif, pour l’épure d’un nouveau plan de redressement financier des régimes de retraite ? Les retraités et futurs retraités vont-ils continuer à être la variable d’ajustement de l’équilibre des régimes ?
Ce sont les premières interrogations qui viennent à l’esprit à la lecture de ce quatrième avis remis au Premier ministre et à la ministre des Solidarités, mi-juillet. Ce rapport s’analyse en effet comme un signal d’alerte à l’attention du gouvernement pour un redressement des équilibres financiers du système de retraite, ce qui, ipso facto, induirait toute une panoplie de mesures drastiques sur les pensions et les retraites.
– Chargé, comme chaque année, de rendre un avis public portant sur les objectifs assignés à notre système de retraite et, dans le prolongement des conclusions et des prévisions du dernier rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR), de s’assurer de sa pérennité financière, pour la première fois depuis sa création en 2014, le CSR formule des recommandations au gouvernement pour qu’il prenne les mesures nécessaires afin de ramener le système sur une trajectoire d’équilibre
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L’avis souligne notamment que si les dépenses restent contenues à long terme, le système n’est pas à l’équilibre, contrairement aux précédentes anticipations. Il tient compte en effet de la modification des hypothèses de prévision du COR de retour à l’équilibre financier des comptes de la retraite aux alentours de 2040 au lieu de 2020, comme initialement prévu dans le précédent rapport.
Selon le CSR, dans le scénario économique le plus favorable… le système connaîtrait cependant des déficits durables en dessous d’un taux de croissance de la productivité de 1,5 % et s’éloignerait significativement de son objectif de pérennité financière. Cette dépendance à la croissance est une caractéristique forte du système français
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– Alors qu’une réforme profonde du système de retraite a été annoncée par le gouvernement pour 2018, le CSR avance plusieurs pistes pour la mise en place de mesures correctrices.
Il pourrait être envisagé de procéder à ces ajustements dans le cadre de la réforme annoncée pour 2018, ce qui conduirait à ne pas prendre de mesure à court terme.
A l’inverse, le projet de réforme n’ayant pas été présenté comme visant la couverture de besoins de financement, ces ajustements pourraient intervenir en amont, dans les premières années de la législature. Compte tenu des natures différentes des ajustements possibles, les deux solutions pourraient être combinées.
– Ainsi, à court terme, parmi les mesures de pilotages permettant de freiner la dégradation annoncée du solde financier, la piste d’une mesure telle qu’une sous-indexation des pensions
a été évoquée. Elle permettrait des économies assez rapides et se répercuterait les années suivantes
.
Conscient de l’impact sur le pouvoir d’achat des pensions et des retraites (lesquelles ont été gelées depuis 2013), le CSR a été amené à tempérer cette proposition. Il estime que, sur un plan social, cette mesure pourrait cependant poser des difficultés d’acceptation
au moment même où le gouvernement envisage d’augmenter la CSG. Serait-ce une façon diplomatique de dire aux pouvoirs publics que les retraités ne sont pas des « vaches à lait » et que les gouvernements, quels qu’ils soient, ne disposent pas d’un « droit de tirage » aveugle et continu sur les pensions et les retraites ?
– Parmi les mesures à plus long terme, le rapport invite notamment à tenir compte des évolutions démographiques, considérant qu’elles doivent alerter
. La dégradation du solde causée par l’allongement de l’espérance de vie pourrait justifier des mesures visant à rétablir l’équité entre générations, au regard de la durée de retraite relative à la durée de vie totale
, indique le Comité. Pour autant, cette perspective ne lui apparaît toutefois pas urgente
, d’autant qu’il explique que l’augmentation de l’âge de départ à la retraite pourrait avoir des effets sensibles sur le taux de chômage
. Pour l’UCR-FO, un recul supplémentaire de l’âge de départ à la retraite, serait une mesure inacceptable.
– Le CSR attire aussi l’attention sur le Fonds de réserve pour les retraites (FRR), estimant que la période actuelle est propice à une réflexion approfondie sur son devenir
, soulignant que ses perspectives sont aujourd’hui mal définies alors qu’il dispose de fonds prévus à l’origine pour aider à passer la bosse démographique
. En langage clair, cela signifie que le gouvernement serait inspiré de revenir à la finalité première de ce fonds constitué, faut-il le rappeler, pour « lisser » la démographie du « Papy boum » !
– D’autres pistes d’économies sont citées. La poursuite de l’élévation du taux d’emploi des seniors est envisagée au motif qu’elle pourrait à la fois augmenter la croissance du PIB et générerait des ressources supplémentaires pour les régimes de retraites
. Mais le Comité s’empresse de préciser que la mesure pourrait avoir des effets sensibles sur le taux de chômage
. L’UCR-FO a, en outre, relevé avec intérêt que l’avis du Comité attire aussi l’attention sur l’existence pour l’avenir, d’un risque de pauvreté chez certains retraités
. On sait que le taux de pauvreté tourne autour de 10 % des retraités.
– S’agissant des suites données à l’avis rendu par le Comité de suivi des retraites, le Premier ministre a indiqué que le gouvernement en informera le Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018. Il a également rappelé la volonté du gouvernement de mener à bien la réforme des retraites prévue pour la fin de l’année 2018. Celle-ci fait partie de « l’ambitieux » train de réformes que le Président de la République nouvellement élu, vise pour 2018. Déterminé à maintenir le rythme soutenu du calendrier des réformes qu’il entend mener pour 2018 (dans l’immédiat la loi travail, suivie de la réforme de l’assurance-chômage et de la formation professionnelle), le Président de la République a en effet clairement annoncé une profonde réforme des retraites, dont les axes seront présentés au Parlement durant le premier semestre 2018.
D’ores et déjà, nous savons qu’il souhaite s’orienter vers un régime dit « universel » aux lieu et place des différents régimes actuels en vigueur, tout en en préservant les équilibres financiers. A ce jour, les contours restent donc à préciser et on ne sait pas encore si les préconisations du Comité de suivi des retraites seront prises en compte. Pour l’heure, sur ce sujet, la Confédération Force Ouvrière reste sur sa réserve car tout dépendra de l’issue des discussions sur les objectifs, les modalités, les conditions de mise en œuvre, qui seront menées avec notre organisation.