La Cour de cassation avait jugé que seul un délégué du personnel titulaire pouvait être désigné comme délégué syndical, car il disposait d’un crédit d’heures (Cass. soc., 30 octobre 2001, n°00-60313).
Dans cette espèce, un salarié membre suppléant du CSE avait été désigné délégué syndical dans une entreprise employant trente-trois salariés.
L’employeur avait été débouté de sa demande d’annulation de désignation en première instance au motif que, dans la mesure où il n’y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas, l’article L 2143-6 ne faisant pas de distinction entre membre titulaire et membre suppléant, la désignation est validée.
L’employeur forme un pourvoi en cassation et la Haute Cour lui donne raison et rappelle les règles qu’elle a développées en la matière :
Vu les articles L 2143-6, L 2314-7, L 2314-37, L 2315-2 et L 2315-9 du Code du travail :
(Cass. soc., 9 novembre 2022, n°21-19263).
Il résulte de ces textes que seul un membre suppléant du comité social et économique disposant d’un crédit d’heures de délégation en application, soit des dispositions de l’article L 2315-9 du Code du travail, soit des clauses du protocole préélectoral tel que prévu à l’article L 2314-7 du même code, soit du fait qu’il remplace momentanément un membre titulaire en application des dispositions de l’article L 2314-37 de ce code, soit enfin en application d’un accord collectif dérogatoire au sens de l’article L 2315-2, peut être désigné, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, en qualité de délégué syndical.
Pour rejeter la demande d’annulation de la désignation du salarié en tant que délégué syndical, le jugement retient qu’il n’y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas et que force est de constater que l’article L 2143-6 du Code du travail n’apporte aucune distinction entre titulaire et suppléant.
En statuant ainsi, le tribunal a violé les textes susvisés.
Par cet arrêt, la Cour de cassation confirme la position qu’elle a toujours eue, bien que la loi n’opère pas de distinction selon que la personne désignée dispose d’un crédit d’heures ou non.
En effet, n’est-ce pas au délégué désigné de savoir s’il peut exercer son mandat, même sans crédit d’heures ?
Quand la Cour de cassation veut faire le bien du DS au détriment de la liberté syndicale…
L’article L 2143-6 du Code du travail dispose :
Dans les établissements qui emploient moins de cinquante salariés, les syndicats représentatifs dans l’établissement peuvent désigner, pour la durée de son mandat, un membre de la délégation du personnel au comité social et économique comme délégué syndical.
Sauf disposition conventionnelle, ce mandat n’ouvre pas droit à un crédit d’heures. Le temps dont dispose le membre de la délégation du personnel au comité social et économique pour l’exercice de son mandat peut être utilisé dans les mêmes conditions pour l’exercice de ses fonctions de délégué syndical.