Le Medef veut démolir le Code du travail

Rapports de forces par Clarisse Josselin

La remise en cause des 35 heures et du Smic, la suppression de deux jours fériés et l’explosion des seuils sociaux font partie des recettes empoisonnées proposées le 24 septembre par le patronat pour lutter contre le chômage. Des propositions inacceptables et dangereuses pour FO.

Encouragé par les largesses du gouvernement, le Medef n’a plus peur de rien. Lors d’une conférence de presse, son chef de file Pierre Gattaz a présenté ses propositions pour créer un million d’emplois. Son plan, en quatre axes, attaque tous azimuts les acquis sociaux, estimant que « notre modèle économique et social a vécu ».

Pour le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, ces propositions sont « inacceptables » et « ne sont pas à l’ordre du jour des négociations » avec les syndicats, alors que l’agenda social de l’année à venir a déjà été fixé. Comme il y a dix jours, lorsqu’un projet similaire avait fuité dans la presse, ce programme a été rejeté par tous les syndicats.

Pierre Gattaz veut « débattre sans tabou », et sans contreparties pour les salariés. Anticipant les critiques qui commencent déjà à pleuvoir, il dénonce « la culture d’opposition systématique que l’on connaît dans notre pays », sans regarder dans son propre camp.

Pour Jean-Claude Mailly, interrogé par l’AFP, les chiffrages du Medef ne sont pas crédibles. Il estime par exemple que la suppression de deux jours fériés par an permettrait de générer 0,9% du PIB, soit près de 100 000 emplois supplémentaires. Ce calcul est jugé « totalement fantaisiste » par Philippe Askenazy, directeur de recherche au CNRS, cité par l’AFP, qui en attend un résultat « qui se promène autour de zéro ».

Perte de la couverture minimale conventionnelle

Sur les 35 heures, le patronat voudrait fixer la durée du travail à l’échelle de l’entreprise. Le principe d’une « durée légale imposée à toutes les entreprises » ne s’appliquerait plus qu’à celles « ne pouvant pas ou ne souhaitant pas négocier ».

Il suggère aussi d’intervenir sur les seuils sociaux ou de reculer encore l’âge de départ à la retraite. Pour les chômeurs de longue durée, il réclame la mise en place de « contrats aidés », permettant de recruter en dessous du Smic. Quant aux contrats de travail, il voudrait généraliser le « contrat de projets » existant dans le BTP, un CDI limité dans le temps.

Pour le secrétaire général de FO, la proposition « de donner la priorité aux accords d’entreprise sur les accords de branche et les accords nationaux » est « la plus dangereuse », car dans les petites entreprises où les syndicats ne sont pas présents « il n’y aura pas d’accord et il n’y aura pas non plus la couverture minimale conventionnelle » pour les salariés.

Il propose plutôt à Pierre Gattaz de « prendre une nationalité anglo-saxonne », car « il y a un côté thatchériste dans ces propositions ». Il lui suggère aussi « que tous les 1er janvier soient un lundi ou un vendredi […] pour éviter les phénomènes de ponts ».

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

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