Un salarié, agent de sécurité et d’incendie d’une entreprise, est transféré dans une autre entreprise en raison d’un transfert de prestataire de marché.
La nouvelle société licencie le salarié pour faute grave parce qu’il refuse de passer d’un horaire de nuit à un horaire de jour.
Le salarié saisit la juridiction prud’homale pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtient gain de cause devant la cour d’appel, laquelle condamne l’employeur au paiement de diverses indemnités : indemnité compensatrice de préavis, de rappel de salaire pour les mois d’octobre et novembre 2016, de congés payés afférents à ces condamnations, d’indemnité légale de licenciement et de dommages-intérêts.
L’employeur forme un pourvoi en cassation sur les circonstances de l’espèce, et notamment sur le fait, d’une part, que la convention collective prévoyait que les salariés assurent un service indistinctement soit de jour, soit de nuit, soit alternativement de nuit ou de jour ; d’autre part, qu’il avait proposé plusieurs postes au salarié que ce dernier avait refusés, et qu’enfin, les contraintes personnelles n’étaient pas positivement opposables à l’employeur.
La Cour de cassation, par un arrêt du 29 mai 2024, appelé à être publié (n°22-21814), rejette le pourvoi de l’employeur :
« 4. La cour d’appel a constaté, d’une part, que le salarié, qui produisait la notification au 12 janvier 2016 du versement de l’allocation d’éducation spécialisée pour sa fille âgée de sept ans et handicapée à 80 % pour laquelle la MDPH avait reconnu la prise en charge par les parents d’au moins 20 % des activités de l’enfant par une adaptation des horaires de travail, justifiait d’un motif lié au respect de la vie personnelle et familiale nécessitant un maintien de ses horaires de nuit et, d’autre part, que l’entreprise ne justifiait pas de ce qu’elle ne disposait pas de poste de nuit.
5. De ces constatations et énonciations dont il ressortait que le passage d’un horaire de nuit à un horaire de jour portait une atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale et était incompatible avec ses obligations familiales impérieuses, la cour d’appel a exactement déduit que le refus du salarié ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement. »
Lorsque la modification du contrat de travail portant une atteinte à la vie privée du salarié s’avère être excessive, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme dispose :
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. »
L’article L 1121-1 du Code du travail dispose :
« Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »