Le temps de trajet entre deux clients correspond à du temps de travail effectif

Veille Juridique du Secteur Juridique du 1er au 12 septembre 2014 par Secteur des Affaires juridiques

La chambre sociale de la Cour de cassation a déjà répondu à la question de la qualification des temps de trajet entre deux lieux d’exécution du travail. Selon les Hauts magistrats de cette chambre, il s’agit de temps de travail effectif qui doit ouvrir droit à rémunération (Cass. soc., 16-6-04, n°02-43685 ; Cass. soc., 12-1-05, n°02-47505).

La chambre criminelle de la Cour de cassation suit le même raisonnement dans son arrêt du 2 septembre 2014 (n°13-80665) en écartant le régime des temps de pause pour les déplacements entre deux lieux de travail.

En l’espèce, l’inspection du travail a constaté, lors d’un contrôle au sein d’une société d’aide à domicile, qu’au regard des bulletins de paie et des plannings des auxiliaires de vie ou aides à domicile, les temps de déplacement des salariés entre les domiciles des clients n’étaient pas pris en compte dans le calcul de leur salaire.

Seules étaient prises en compte comme temps de travail effectif les heures réalisées chez les clients. Ainsi, les temps de trajet entre deux clients d’environ 30 minutes à chaque fois, soit environ 11,49% du temps de travail total, équivalaient à du temps de pause pour l’employeur. Ce dernier ne s’est jamais conformé aux rappels de l’inspection du travail. En effet, celui-ci estimait que les salariés ne se trouvaient pas à sa disposition et pouvaient vaquer à leurs occupations personnelles.

La cour d’appel ne suit pas le raisonnement de l’employeur et le condamne pour travail dissimulé.

L’employeur forme alors un pourvoi en cassation en s’appuyant sur l’article L 3121-4 du code du travail : « le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif ». L’employeur soutient la position selon laquelle cet article ne fait aucune distinction selon la nature des déplacements professionnels. Selon lui cet article devait s’appliquer aussi bien aux temps de déplacement entre le domicile et le lieu de travail qu’entre deux lieux de travail.

Pourtant, le Conseil constitutionnel avait déjà eu l’occasion d’indiquer que cette règle ne concerne que les déplacements pour se rendre du domicile au lieu de travail (Cons. const., 13-1-05, n°2004-509 DC).

La chambre criminelle de la Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel en affirmant que « le temps de déplacement professionnel entre le domicile d’un client et celui d’un autre client, au cours d’une même journée, constitue un temps de travail effectif et non un temps de pause, dès lors que les salariés ne sont pas soustraits, au cours de ces trajets, à l’autorité du chef d’entreprise ».

Les Hauts magistrats précisent que l’article L 3121-4 du code du travail ne devait pas recevoir application dans cette espèce puisque ses dispositions ne concernaient que les trajets entre le domicile et le lieu de travail.

La Cour de cassation confirme donc la condamnation pour travail dissimulé prononcée par les juges d’appel.

En effet, cette infraction était bien caractérisée par la réunion cumulative de :

l’élément matériel (dissimulation des temps de déplacement sur les bulletins de paie, art. L 8221-5 2° du code du travail), et de l’élément intentionnel (refus persistant de l’employeur).

 Voir en ligne  : Veille Juridique du Secteur Juridique du 1er au 12 septembre 2014 [PDF]

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