Le véritable enjeu est celui de l’après rentrée scolaire, estime Franck Antraccoli (ID-FO)

InFO militante par Chloé Bouvier, L’inFO militante

© Mathilde MAZARS/REA

Franck Antraccoli, secrétaire général de ID-FO (syndicat des personnels de Direction de l’Éducation nationale) et proviseur du lycée Guist’hau à Nantes (44) revient sur la mise en place du protocole pour la rentrée scolaire.

Franck Antraccoli
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Le 21 août, Jean-Michel Blanquer a annoncé dans les colonnes du Journal du Dimanche que la rentrée se ferait au niveau 2 du protocole sanitaire. Comment ces dispositions sont mises en place dans les établissements scolaires du second degré ?

Franck Antraccoli : Le niveau 2 du protocole est moins contraignant puisqu’il nous permet de faire une rentrée dans des conditions correctes, notamment en accueillant tous les élèves en présentiel. Quant à sa mise en place, nous sommes rodés puisque depuis mars 2020, les établissements scolaires ont connu une trentaine de modifications de ce protocole, avec les élèves à distance, les demi-jauges ... Il n’y a pas d’inquiétudes sur le 2 septembre, jour de la rentrée. En revanche, le véritable enjeu est celui de l’après rentrée dans les prochaines semaines où l’on risque de voir des cas positifs dans nos classes.

Le protocole prévoit notamment qu’au collège et au lycée, s’il y a un cas positif dans une classe, les élèves non vaccinés devront suivre les cours à distance pour une semaine au moins. Qu’est-ce que cela implique pour les enseignants ?

Franck Antraccoli : Seuls les élèves non vaccinés qui sont cas contact d’un élève qui sera testé positif au Covid-19 seront concernés. Quant à l’enseignement à distance, nous avons demandé au ministère de communiquer clairement auprès des parents : les professeurs ne pourront pas se dédoubler en faisant cours en classe et à distance en même temps. Les cours en visio nécessitent du matériel et de l’équipement, mais surtout, ils ne sont pas adaptés à la pédagogique actuelle. Lors du cours, l’enseignant échange avec ses élèves, se déplace dans la classe … Faire un cours visio en direct à distance, c’est un mythe. La solution pour ces élèves, ce sera sans doute de mettre les cours en ligne via les environnements numériques de travail, avec les exercices à faire.

Comment les tracing de cas contact se feront au sein des établissements ?

Franck Antraccoli : Nous savons déjà comment faire et allons continuer sur cette voie. Mais cela reste une charge très importante de travail : un cas positif dans une classe nécessite au moins une demi-journée de travail. Les 1 700 médiateurs Covid dans nos établissements nous permettrons de gérer au mieux ces situations sans que nos personnels administratifs se retrouvent sous l’eau.

Avec la rentrée, se pose aussi la question des capteurs de CO2 dans les salles, notamment la cantine. Quelle est la position de ID-FO sur ce sujet ?

Franck Antraccoli : C’est une question prégnante qui est aux mains des collectivités territoriales. On constate que celles-ci avancent en ordre dispersé : les établissements d’Île-de-France commencent à être équipés de ces capteurs tandis que nous, en Pays de la Loire, nous n’en avons pas du tout pour le moment. Ce que souhaite ID-FO c’est une position claire de l’État, des régions et des départements pour que les établissements soient équipés de manière homogène. Le ministre a exprimé son souhait de voir se généraliser ces équipements mais pour l’instant, cela reste du déclaratif.
Sur le sujet de la cantine, le protocole nous permet de fonctionner à pleine jauge, en respectant dans la mesure du possible les distances sociales et les gestes barrières. Selon les établissements, cela est plus ou moins facile à mettre en place.

L’un des gros chantiers de ce début d’année pour l’Éducation nationale sera d’organiser la vaccination des plus jeunes. Comment allez-vous procéder ?

Franck Antraccoli : À ID-FO, nous ne sommes pas opposés à organiser la vaccination dans les établissements scolaires mais à la condition sine qua non que cela soit fait par des personnes extérieures. Autrement dit, nous pouvons prêter nos locaux, pas mobiliser nos personnels. Pour la mise en place de cette mesure, cela dépend des territoires : dans les écoles de centre-ville ou de milieu urbain denses, les élèves pourront être conduits dans des centres pré-existants, où ils auront des créneaux réservés. Dans les écoles plus loin de ces infrastructures, il sera possible d’implanter des centres éphémères dans les établissements pour vacciner les élèves.

Le protocole reste aussi flou sur la question des sorties scolaires. Quelles sont les questions qui demeurent ?

Franck Antraccoli : Tout n’est pas encore éclairci sur ce sujet. On sait que le Passe sanitaire sera demandé aux jeunes dans des lieux qui ne seront pas réservés uniquement aux scolaires. Mais cela pose des questions, par exemple pour les sorties dans le cadre des cours de sport. Sur la piscine par exemple, les élèves ont des lignes réservées mais nagent avec d’autres personnes dans le bassin. Nous avons demandé des précisions au ministère qui nous a fait savoir qu’une circulaire serait publiée sur ce sujet avant le 30 septembre.

Vous aviez également demandé des précisions autour des 26 millions d’autotests distribués dans les établissements au printemps dernier. Combien en reste-t-il et qu’allez-vous en faire ?

Franck Antraccoli : On estime qu’il reste environ 60 % des tests que nous avions reçu l’année dernière. À ID-FO, nous nous étions opposés à ce dispositif car il ne nous paraissait pas pertinent dans le cadre des lycées et collèges. Nous allons sans doute redistribuer ceux qui restent aux enseignants et élèves qui en feront la demande.

Globalement, quel est l’état d’esprit des proviseurs en cette rentrée scolaire ?

Franck Antraccoli : À mes yeux, il n’y a pas d’appréhension sur la rentrée mais une grande fatigue due à la charge importante de travail des deux dernières années. Avec le Covid, nous avons beaucoup travaillé dans l’urgence : nous regrettons un manque d’anticipation sur certains sujets. Le fait que les consignes arrivent tardivement et doivent être appliquées tardivement rends les choses d’autant plus difficiles. De plus, outre le Covid, nous avons aussi d’autres chantiers à mener de front, je pense notamment à la réforme du Bac pour 2022 qui prévoit d’introduire 40 % des notes en contrôle continu.

Propos recueillis par Chloé Bouvier

Chloé Bouvier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération