C’est un mouvement social historique au sein de l’enseigne de bricolage Leroy-Merlin. Il aura fallu près de deux semaines d’une grève très suivie et dix heures de négociations le 30 novembre pour que la direction accepte enfin de desserrer les cordons de sa bourse. Les syndicats ont obtenu une hausse de salaire de 65 euros par mois.
L’appel à la grève illimitée lancé le 17 novembre par une intersyndicale incluant FO avait été massivement entendu par les salariés. Blocage des principaux entrepôts, débrayages dans de très nombreux magasins… c’était du jamais vu dans l’enseigne détenue par la famille Mulliez, et qui compte aussi dans sa galaxie Decathlon, Auchan, Boulanger ou encore Flunch.
A l’origine du conflit, l’échec des négociations annuelles obligatoires (NAO) sur les salaires le 9 novembre. Pour 2022, la direction avait proposé une hausse générale de 2% avec un talon à 40 euros brut. Cette augmentation ne permettait même pas de compenser l’inflation puisque selon l’Insee, sur les douze derniers mois, les prix à la consommation ont grimpé de 2.6%. FO ni aucun autre syndicat n’avaient signé le protocole d’accord.
La direction ne veut pas comprendre que des salariés qui se démènent pour leur travail s’appauvrissent en travaillant pour une entreprise qui fait des bénéfices record et qui les redistribue à quelques privilégiés
, avait dénoncé Bernard Vigourous, délégué central FO chez Leroy-Merlin.
800 millions d’euros de bénéfices en 2021
Le syndicat FO pointait les bénéfices engrangés par l’enseigne et réclamait un meilleur partage des richesses. Les salariés relevant de la catégorie de ceux qu’on a appelés de la deuxième ligne, sont restés mobilisés durant la crise sanitaire. Leroy-Merlin, dont l’activité a été boostée par les confinements, a enregistré un chiffre d’affaires record en 2020, à près de 7.9 milliards d’euros, en hausse de 5%.
Selon Mediapart, ce chiffre d’affaires grimpe à 9 milliards d’euros pour 2021, avec des bénéfices atteignant 800 millions d’euros. L’AFP, citant les syndicats et Mediapart, précise qu’en 2019, le personnel s’est partagé 57 millions d’euros de participation, des primes octroyées en fonction des niveaux de salaires aux salaires, mais 31 millions supplémentaires ont été distribués au sommet de l’échelle, sous forme de revenu variable, de stock-options et d’actions gratuites.
La direction de l’enseigne a finalement reçu l’intersyndicale le 30 novembre au matin, après avoir demandé une levée des blocages. Un protocole d’accord a été signé tard dans la soirée, suite à de longues heures de négociations. L’augmentation générale sera de 65 euros au 1er janvier 2022, pour les 23 000 employés et agents de maîtrise. Cela correspond pour les premiers niveaux de salaire à une augmentation de 4%, soit 845 euros sur 13 mois comme le souligne la direction. Par ailleurs, rendez-vous est pris mi-avril pour effectuer une éventuelle revalorisation des salaires si l’inflation dépasse les 3%.
Le protocole d’accord acte également le doublement de la prime inflation versée par l’État, qui va passer à 200 euros comme négocié en NAO. Et les pertes financières liées à la grève pourront être aménagées, avec notamment un étalement sur douze mois.