Les favoris du Tour 2021

Tour de France 2021 par Baptiste Bouthier, L’inFO militante

© A.S.O. Alex Broadway

Le duel de l’an dernier entre Tadej Pogacar et Primoz Roglic est à nouveau attendu cet été.
Mais d’autres coureurs espèrent s’immiscer dans la lutte entre les deux Slovènes, notamment chez Ineos, sans oublier les chances françaises…

22, revoilà Pogacar

Que peut-on faire à 22 ans quand on a déjà gagné le Tour de France ? En gagner un autre, par exemple. C’est le défi de Tadej Pogacar, devenu en septembre dernier le deuxième plus jeune vainqueur de l’histoire de la Grande Boucle après Henri Cornet en… 1904. Le Slovène, qui découvrait pourtant l’épreuve, avait réussi le coup parfait en s’emparant, à la surprise générale, du maillot jaune la veille des Champs-élysées, dans le contre-la-montre de La Planche des Belles Filles, au détriment de son compatriote Primoz Roglic. Tous deux avaient fait jeu égal dans les Pyrénées puis les Alpes, mais Pogacar avait laissé tout le poids de la course à son rival et sa formation Jumbo. Cette fois, le vainqueur sortant et son équipe, UAE, ne pourront pas se tenir à nouveau tapis dans l’ombre : il va leur falloir assumer la « pancarte », comme on dit dans le peloton, celle qu’aura dans le dos Pogacar avec son dossard n°1. Mais cela change-t-il vraiment quelque chose pour lui ? Surdoué – il avait déjà terminé troisième du Tour d’Espagne à sa première participation, en 2019, remportant au passage trois étapes –, Pogacar ne semble pas avoir de limites et sa formation s’est sensiblement renforcée cet hiver pour mieux l’entourer en juillet, recrutant notamment Marc Hirschi ou Rafal Majka. Le début de saison du Slovène a confirmé son nouveau statut puisqu’il a remporté Liège-Bastogne-Liège, un Tirreno-Adriatico très difficile et l’UAE Tour, ou encore terminé troisième du Tour du Pays basque. Loin d’être rassasié, sans faiblesse apparente, Pogacar fonce sur le mois de juillet tel un ogre, prêt à faire le doublé. Quitte à porter le maillot jaune un peu plus que 24 heures cette fois.

Roglic, maintenant il faut conclure

C’est une blessure toujours ouverte, que seul le Tour 2021 peut refermer. Primoz Roglic ne pouvait pas perdre le Tour de France 2020, dominé de la tête et des épaules pendant trois semaines avec sa redoutable équipe Jumbo-Visma. Douze jours à porter le maillot jaune, une victoire d’étape, aucun moment d’inquiétude dans les Alpes puis dans les Pyrénées, l’affaire était entendue : à 30 ans, le Slovène allait remporter, sans grand panache mais sans trembler non plus, son premier Tour. Hélas, à la veille de la consécration annoncée, une journée moyenne à La Planche des Belles Filles et surtout un contre-la-montre stratosphérique signé de son cadet de compatriote Pogacar, et le rêve volait en éclats, remis à plus tard, à jamais peut-être.

Inconcevable pour Roglic et Jumbo, qui repartent en 2021 exactement comme en 2020. Le plan et les ambitions sont les mêmes, l’équipe quasiment aussi, et Roglic a digéré ce loupé depuis septembre dernier, remportant le Tour d’Espagne et le Tour du Pays basque. Mais il a aussi perdu, en mars, un Paris-Nice dans des circonstances étonnamment similaires : après avoir largement dominé la semaine (trois victoires d’étapes), il a perdu l’épreuve le dernier jour, à la surprise générale. Tant qu’on ne verra pas Roglic en jaune sur les Champs-élysées, un petit doute demeurera donc toujours. Mais cela n’étonnera personne si le Slovène parvient à le lever dès cet été.

Thomas et la force d’Ineos

On l’a cru fini, même son équipe l’avait fait reculer dans sa hiérarchie interne, mais Geraint Thomas est toujours là, et bien là. Le Gallois, vainqueur du Tour en 2018, a de nouveau le droit d’être le leader de la toute-puissante Ineos (ex-Sky) cet été, malgré ses 35 ans. Jusqu’au Tour, on a revu le meilleur Thomas en 2021 (vainqueur impressionnant du Tour de Romandie, troisième du Tour de Catalogne) et les deux contre-la-montre prévus cette année sont un atout non négligeable dans sa quête d’un deuxième sacre. L’autre atout, c’est bien sûr son équipe qui fait la loi presque sans discontinuer sur la Grande Boucle depuis dix ans. à ses côtés il aura des lieutenants de luxe à la pelle, de l’ancien champion du monde Michal Kwiatkowski au troisième du Tour de l’an dernier Richie Porte, reconverti en équipier, en passant par Richard Carapaz et Tao Geoghegan Hart. Ces deux-là, respectivement vainqueurs du Tour d’Italie en 2019 et 2020, pourront aussi servir de leader de rechange au sein de la formation britannique si besoin. Bref, c’est un collectif XXL qui se présente au départ du Tour, ce qui est souvent un préalable pour espérer remporter l’épreuve. De quoi prendre la candidature de Geraint Thomas très au sérieux…

Un renouveau français ?

Pour la première fois depuis dix ans, ni Romain Bardet, ni Thibaut Pinot ne seront au départ de la Grande Boucle, et il faudra pour le public français trouver d’autres chouchous à suivre. Le nom de Julian Alaphilippe revient tout de suite, mais le héros de l’édition 2019 (deux semaines en jaune), qui sera facile à identifier avec son maillot de champion du monde, ne semble pas se destiner à jouer le classement général. Il faudra davantage surveiller les progrès de Guillaume Martin, onzième et douzième des deux dernières éditions, et suivre avec attention les débuts de David Gaudu dans un rôle de leader sur le Tour. Jusqu’ici souvent au service de Pinot au sein de l’équipe Groupama-FDJ, le petit grimpeur breton semble avoir franchi un cap depuis un an (huitième du Tour d’Espagne 2020 en remportant deux étapes, cinquième du Tour du Pays basque, puis troisième de Liège-Bastogne-Liège en 2021).

Mais aussi…

Toujours redoutables quand la route s’élève, les grimpeurs colombiens seront des candidats naturels à un top 10, voire mieux selon les circonstances de course, de l’habitué Nairo Quintana au sixième de l’an passé, Miguel Angel Lopez, en passant par le duo Sergio Higuita-Rigoberto Uran chez Education First. Lopez partagera le leadership chez Movistar avec l’Espagnol Enric Mas, toujours solide sur trois semaines (cinquième l’an dernier), tout comme Wilco Kelderman et Lennard Kämna chez Bora, ou Mikel Landa et Wout Poels chez Bahrain. Tous deux âgés de 36 ans, Vincenzo Nibali et Jakob Fuglsang bénéficient toujours d’un statut de leader au sein de leurs équipes respectives, mais semblent désormais trop âgés pour espérer toucher le graal. Enfin, le plus grand mystère entoure le quadruple vainqueur du Tour Chris Froome (36 ans lui aussi), désormais chez Israël Start-up Nation mais loin de son meilleur niveau depuis sa grave chute sur le Dauphiné 2019.

Baptiste Bouthier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération