Les inégalités devant l’impôt

Histoire par Christophe Chiclet

 
Article publié dans l’action Dossier fiscalité

En 2018, la première décision « fiscale » du gouvernement a été de supprimer l’ISF. Désormais, il prépare une énième réforme de l’impôt qui pourrait ressembler à un miroir aux alouettes. Historiquement en France, les riches paient peu !

Les impôts écrasant le peuple (1789).

E n 2011-2012 le gouvernement d’alors avait raboté l’ISF. En 2018 celui-ci a été carrément supprimé. Dans le petit royaume de France, les premiers impôts ne sont levés qu’en 1147. Louis VII prélève alors 20 % des richesses des roturiers sans contreparties. En 1296, Philippe le Bel, qui a un grand besoin d’argent pour agrandir son royaume, impose le centième sur le revenu des marchands. En 1355, le roi instaure un impôt qui frappe tout le monde et touche plus durement les masses paysannes : la gabelle, l’impôt sur le sel. Une sorte de TVA avant l’heure. Mais il faut centraliser tout cela. C’est François Ier qui s’en charge en organisant la première administration fiscale, optimisée plus tard sous

Colbert. Sous l’Ancien Régime ce sont donc les paysans, les artisans et les commerçants qui paient, alors que les nobles et le clergé en sont exemptés et en sont de surcroît les bénéficiaires. Il faut bien payer leur oisiveté et les guerres dispendieuses ! C’est la Révolution de 1789 qui met à bas ce régime fiscal injuste, proclamant le principe de l’égalité des citoyens devant l’impôt.

L’impôt républicain

En 1791, les impôts indirects sont supprimés et au XIXe siècle la fiscalité est fondamentalement axée sur le patrimoine, faisant abstraction des revenus de l’activité. L’impôt sur le revenu n’est voté qu’en juillet 1914, alors que la guerre semble inévitable. Ce système ne sera modifié par décret que le 9 décembre 1948, instituant un impôt sur le revenu des personnes physiques. Impôt qui deviendra annuel et unique dès le 1er janvier 1960. Quant au quotient familial, il date de 1945. L’impôt sur les sociétés est enfin voté en décembre 1948. La TVA est instaurée en avril 1954, son taux normal est actuellement de 20 %. Il s’agit de l’impôt le plus inégalitaire puisque le taux est le même pour les pauvres comme pour les nantis. Quant à la patente commerciale, elle devient taxe professionnelle en 1975. Cette dernière ayant été supprimée il y a quelques années, cela aggrave les difficultés des collectivités locales. La CSG est introduite en 1991 et la CRDS en 1996. L’ISF, touchant enfin les plus riches, est introduit en 1982 (IGF), supprimé en 1986, rétabli en devenant ISF en 1989 et de nouveau supprimé en 2018 !

Bref, alors que les revenus des travailleurs français sont largement imposés, les entreprises du CAC 40, par de nombreux subterfuges légaux ou illégaux, ne sont imposées qu’à 14 %-15 %, voire encore moins pour les Gafa. Ne serait-ce pas s’éloigner de l’esprit de la nuit du 4 août mettant fin aux inégalités de l’Ancien Régime ?

 

L’évolution de la Contribution sociale généralisée
La CSG voit le jour en 1991 pour participer au financement de la protection sociale. En 2018 elle est étendue au financement de l’Assurance chômage à la place des cotisations prélevées sur les salaires. Son taux et son assiette ont constamment augmenté. Au départ elle était de 1,3 % pour les revenus d’activité, de remplacement et du patrimoine. Deux ans plus tard elle passait à 2,4 %, puis à 3,4 % en 1997, 7,5 % en 1998 et enfin 9,2 % en 2018.

Christophe Chiclet Journaliste à L’inFO militante