Les mesures du gouvernement pour réformer la formation professionnelle

Interlocuteurs sociaux par Clarisse Josselin

La ministre du Travail Muriel Pénicaud a dévoilé à la presse, le 5 mars 2018, les grandes lignes de la réforme de la formation professionnelle. Si FO se satisfait que les droits nouveaux des salariés issus de l’accord interprofessionnel soient repris, elle s’inquiète de plusieurs dangers potentiels.

« Liberté individuelle », tel est le mot qui semble avoir guidé la ministre du Travail Muriel Pénicaud dans sa réforme de la formation professionnelle. Elle en a détaillé les grands axes le 5 mars 2018, lors d’une conférence de presse. Au menu, douze mesures et une simplification forte de la gouvernance.

Elle a tout d’abord estimé avoir «  totalement repris l’esprit de l’accord » interprofessionnel du 22 février 2018 négocié par les interlocuteurs sociaux, et d’ores-et-déjà signé par FO. Elle a salué le travail des interlocuteurs sociaux, avant de préciser vouloir « aller plus loin en le complétant pour une transformation du système ». « Cette réforme systémique aurait été difficile à faire dans le cadre d’un accord  », a-t-elle ajouté.

Cette réforme s’inscrit dans le projet de loi «  pour la liberté de choisir son avenir professionnel », réformant également l’apprentissage et l’Assurance chômage, qui doit être présenté en conseil des ministres mi-avril 2018. La ministre a précisé que les modalités allaient encore être discutées durant tout le mois de mars avec les interlocuteurs sociaux et les régions.

Garantir collectivement les droits individuels

Sur plusieurs points comme la monétisation du CPF, la collecte des cotisations par l’Urssaf et le rôle futur de l’interprofessionnel, FO attend « des éclaircissements compte-tenu de leur danger potentiel ». « FO entend poursuivre avec détermination les discussions avec le gouvernement pour voir si ces inquiétudes peuvent être levées et afin de s’assurer que les droits individuels sont bien garantis collectivement », poursuit le bureau confédéral.

La première modification d’ampleur concerne le compte personnel de formation (CPF). Il ne sera plus crédité en heures mais en euros, ce à quoi les interlocuteurs sociaux s’étaient opposés. Dans une déclaration, le bureau confédéral de FO s’inquiète de cette monétisation qui « risque de faire perdre des droits aux salariés  ».

Les salariés recevront 500 euros par an pour alimenter leur CPF, avec un plafond à 5000 euros. Pour les personnes les moins qualifiées, l’abondement sera de 800 euros par an, dans la limite de 8000 euros. Pour les salariés en CDD, le compte sera crédité proportionnellement au temps de travail. En revanche, pour les salariés à temps partiel, qui sont principalement des femmes, l’abondement du CPF se fera à taux plein. Les entreprises pourront abonder le CPF de leurs salariés au-delà de ce plafond, soit de manière individuelle, soit collectivement.

Une application numérique pour s’inscrire et payer en ligne sa formation

Pour les formations longues, le congé individuel de formation (CIF) est remplacé par le CPF de transition, comme le prévoit l’accord interprofessionnel du 22 février. Il permettra aux salariés porteurs d’un projet mais qui ne disposent pas de crédits suffisants de bénéficier d’un abondement après validation d’une commission paritaire. Autre évolution, les acquis seront pris en compte pour adapter la durée de la formation aux besoins réels du bénéficiaire.

Une application numérique permettra aux salariés et aux demandeurs d’emploi de connaître leurs droits, de découvrir les formations disponibles et leurs caractéristiques, de s’inscrire et de payer en ligne. L’organisme sera réglé directement par la Caisse des dépôts et consignations.

Pour être accompagnés dans leurs projets d’évolution professionnelle, les salariés auront accès gratuitement, sur l’ensemble du territoire, au conseil en évolution professionnelle (CEP), conformément à l’accord signé par les interlocuteurs sociaux.

Une cotisation patronale unifiée

Autre réforme d’ampleur, la collecte de la cotisation patronale à la formation professionnelle ne se fera plus par les organismes paritaires collecteurs agréés (Opca) mais par l’Urssaf, qui les transmettra ensuite à la Caisse des dépôts et consignations. Les conséquences de ce recouvrement par l’Urssaf est également source de « danger potentiel » par FO.

Il n’y aura plus qu’une seule cotisation unifiée. Le taux reste inchangé (1,68% pour les entreprises de plus de 11 salariés et 1,23% pour celles de moins de 11 salariés). Les TPE-PME auront plus de moyens dédiés à la formation professionnelle grâce à un système de solidarité des grandes entreprises.

FO va signer l’ANI relatif à la réforme de l’Assurance chômage

Le «  rôle futur de l’interprofessionnel en matière de formation professionnelle  » inquiète également FO. Les Opca sont remplacées par des « opérateurs de compétences ». Ces organismes partiaires seront notamment chargés de financer les centres de formation d’apprentis (CFA), appuyer les branches dans la co-construction des diplômes et aider les branches à anticiper les métiers de demain. L’objectif du gouvernement est que ces nouvelles structures soient opérationnelles au 1er janvier 2020.

Par ailleurs, la gouvernance sera assurée par une agence nationale baptisée « France compétences  » où siègeront l’État, les interlocuteurs sociaux et les régions. Elle sera notamment chargée de réguler la qualité et les prix des formations.
Dans son communiqué, le bureau confédéral de FO annonce qu’il va signer l’ANI relatif à la réforme de l’Assurance chômage, qui prévoit la mise en place d’un système de bonus-malus. Il reste en revanche opposé à la création d’un statut particulier pour les travailleurs des plateformes.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante