Les revendications légitimes d’un infirmier urgentiste

Portrait par Valérie Forgeront

Jason Lassalle est infirmier au SMUR de Carcassonne et trésorier adjoint du syndicat FO de l’hôpital, inscrit dans le mouvement national de grogne des personnels.
Il demande davantage de moyens pour l’hôpital afin que celui-ci poursuive sa mission publique et avec qualité.

À  Carcassonne, tous les personnels soignants du SMUR, le service mobile d’urgence et de réanimation rattaché au centre hospitalier, sont des passionnés, et heureusement car il faut colmater les brèches chaque jour. Ces brèches, des risques de dysfonctionnements, sont dues au manque de moyens, notamment en effectifs, d’un service qui tourne à plein, 24h sur 24. La fréquentation de cet hôpital croît sans cesse et cependant il ne reçoit pas de moyens supplémentaires. Les personnels s’élèvent aussi contre l’absence de reconnaissance de leur travail et le manque d’attractivité salariale. Jason Lassalle, 44 ans, infirmier depuis vingt ans et en poste depuis seize ans au SMUR de la cité médiévale de l’Aude, est un de ces personnels. Adhérent à FO depuis cinq ans car l’organisation revendique et obtient des résultats, il est trésorier adjoint du syndicat FO du centre hospitalier (1 700 agents). Comme des milliers de ses collègues en France, Jason peste contre la détérioration des conditions de travail à l’hôpital, dans les services d’urgence notamment. À Carcassonne, l’activité du service ne cesse d’augmenter et cependant il dispose de moins en moins de personnels, la nuit entre autres. L’été, la situation empire car par le tourisme, la population de la ville double. Pour ce Toulousain d’origine, la vie se déroule à 100 à l’heure. Responsabilités énormes, pression d’une charge de travail qui augmente sans cesse, crainte permanente de commettre une bourde malgré le professionnalisme... Voilà son quotidien.

Les pouvoirs publics doivent apporter une solution

Aux urgences, un infirmier peut voir plus de douze patients par heure, indique Jason, pointant le recul de moitié en un an et demi du nombre de médecins urgentistes : il en reste une quinzaine contre plus de trente auparavant, cela alors que 50 % des entrées à l’hôpital se font par ce service. Les agents sont de plus en plus épuisés et beaucoup de personnels font des burn-out, se désole l’infirmier. Le 11 juillet, les agents des urgences de Carcassonne (vingt-trois infirmiers, onze ambulanciers) étaient en grève à l’appel entre autres de FO, syndicat majoritaire de longue date (avec un score de 54 % aux dernières élections). Ils soutiennent le mouvement national de protestation. Le centre hospitalier de Carcassonne, qui souffre d’un déficit de 11 millions d’euros, est soumis à des économies drastiques constituées de moult restructurations et autres fermetures de lits l’été (une cinquantaine cet été sur une capacité de 450 places). Pour la population départementale, ce manque de moyens de l’hôpital couplé à la disparition des services d’accueil de médecine libérale a des conséquences pénibles, voire dangereuses. Les patients doivent souvent faire 50 km et plus d’une heure de route pour venir dans notre service d’urgence. On est loin des recommandations ministérielles, s’indigne le militant. Des patients âgés attendent parfois six, huit, voire dix heures sur des brancards dans les couloirs de l’hôpital. Pour le militant, il faut que les pouvoirs publics apportent une solution aux populations et la réponse doit être ambitieuse. Pour l’instant, celle apportée par le plan gouvernemental Ma santé 2022, annoncé en septembre 2018, constitue un recul pour le système de santé.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante