Le Conseil d’État vient de rendre, le 21 septembre 2016, une décision importante mais pas favorable aux salariés (CE, 21-9-16, n°383940).
Elle précise quand doit avoir lieu la mise en œuvre pratique de l’obligation de reclassement, en cas de licenciement économique d’un salarié protégé.
L’affaire est simple. L’inspecteur du travail refuse, le 7 avril 2009, le licenciement économique du salarié protégé en raison d’un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement, celui-ci n’ayant pas porté ses recherches de reclassement sur l’ensemble des entreprises du groupe.
L’employeur décide alors de faire un recours hiérarchique auprès du Ministre du travail. Le Ministre du travail autorise, le 28 septembre 2009, le licenciement économique du salarié protégé.
Le salarié saisi le tribunal administratif qui fait droit à sa demande et annule l’autorisation de licenciement.
La cour administrative d’appel, saisie par l’employeur, annule le jugement du tribunal administratif.
Le salarié forme alors un pourvoi devant le Conseil d’État.
Pour le Conseil d’État, lorsque le Ministre du travail est saisi, suite au refus de l’inspecteur du travail d’autoriser un licenciement économique en raison d’un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement, celui-ci peut tenir compte, pour se prononcer, des recherches de reclassement postérieures au refus de l’inspecteur du travail.
En l’espèce, il relève que postérieurement au refus de l’inspecteur du travail, mais avant que le ministre ne statue sur le recours hiérarchique dirigé contre cette décision, l’employeur a procédé, dans l’ensemble des autres entreprises du groupe, à la recherche des possibilités de reclassement du salarié sur des fonctions comparables à celles qu’il occupait.
Ainsi, l’employeur a satisfait à son obligation de reclassement et pouvait licencier le salarié pour motif économique.
Traditionnellement, le Conseil d’État juge que l’offre de reclassement doit être faite, au plus tôt, à compter du moment où le licenciement est envisagé et, en tout état de cause, avant que l’administration ne statue.
Le Conseil d’État avait déjà eu l’occasion de juger que les offres postérieures à la décision de l’administration ne peuvent être prises en compte (CE, 18-1-96, n°162142).
Par la décision du 21 septembre 2016, le Conseil d’État assouplit « quelque peu » sa position.
Sa décision entre en contradiction avec une précédente décision dans laquelle il avait considéré que si le ministre prend en compte des éléments survenus après la décision de l’inspecteur du travail, il entache sa décision d’illégalité, sauf s’il est établi qu’il aurait pris la même décision s’il avait pris en compte les seuls faits en fonction desquels l’inspecteur du travail s’était prononcé (CE, 1-4-92, n°113324 ; CE, 5-4-06, n°276156).