[Livre] Avicenne ou l’islam des Lumières

Culture par Corinne Kefes

Le chercheur de vérité

La figure d’Avicenne est incontournable pour qui s’intéresse à l’histoire de la pensée. Sa place toute particulière tient à l’héritage qu’il laisse dans ce domaine. Considéré comme le fondateur de la philosophie islamique, il n’aura de cesse dans ses écrits de faire le lien entre raison et foi.

Il naît à la fin du Xe siècle dans ce qui est aujourd’hui l’Ouzbékistan, dans une ville prospère, au carrefour des cultures, dans une famille aisée et cultivée d’origine perse. Il bénéficie ainsi d’une bonne éducation : lecture du Coran, droit canon, poésie, médecine et surtout les philosophes grecs. Sa soif de savoir s’allume alors et ne le quittera jamais.

Ce qui est au cœur de ses réflexions, c’est son besoin de comprendre le monde qui l’entoure et de partager son savoir pour lutter contre l’obscurantisme, faire grandir l’Homme et lui assurer les moyens de son salut.

Sa pensée s’élabore sur la raison comme outil de la foi, le doute comme moteur de la réflexion, la logique comme méthode : c’est en questionnant le texte qu’on peut en extraire l’essence et ainsi se rapprocher de Dieu.

C’est une personnalité remarquable à plusieurs titres :

C’est un esprit brillant, précoce, curieux, éloquent et engagé, empreint d’une immense culture, qui assimile les théories avec le filtre de son propre instinct philosophique.

C’est un savant aux talents multiples : médecin, psychologue, philosophe, humaniste, mystique, poète, homme d’État.

C’est un écrivain prolixe qui produira plus de deux cents ouvrages avec une volonté d’encyclopédiste, dont les deux plus connus sont Le Livre de la guérison et Le Canon de la médecine.

C’est un homme d’action, n’hésitant pas à exposer sa vie pour vérifier le bien-fondé de ses concepts par l’expérimentation, un homme pressé aussi, inquiet de ne pas terminer son œuvre, qui se considère comme un guide, un passeur.

C’est un intellectuel discrédité en son temps car il défend la philosophie, mal considérée dans une culture régie par le droit canon, qui mêle religion et État, car elle empiète sur le sacré en cherchant à révéler ce qui doit rester caché.

Ce philosophe de l’être n’aura de cesse de faire coexister religion musulmane et philosophie pour démontrer ainsi la vérité de la révélation.

Cette biographie se lit comme un roman dans lequel on découvre la vie d’Avicenne, personnalité ancrée dans son temps, entre les aléas de son existence et l’émergence de sa pensée.

Avicenne ou l’islam des Lumières de Omar Merzoug. Éditions Flammarion, 415 pages, 25 euros ;