[Livre] Le travail m’a tué - Les diktats de la performance

Idées par Corinne Kefes

Un jeune ingénieur brillant est embauché dans l’entreprise de ses rêves. Un avenir radieux semble tout tracé pour lui, et pourtant…

Voici une bande dessinée frappante, d’abord par le sujet qu’elle aborde mais aussi par l’impact du dessin qui donne à voir sans ambages la réalité crue, sans pouvoir se cacher derrière les mots.

Avec beaucoup d’intelligence, elle met en scène les étapes qui aboutissent à l’issue fatale. Et on a beau se dire quand même, on devrait voir les choses venir et résister à cet enchaînement, se révolter…, on comprend comment elles peuvent nous échapper car la mise en place d’un système de harcèlement se fait dans la durée, par paliers et accumulations, avec un discours positiviste de façade.

La question du suicide au travail est prise en compte aujourd’hui dans les entreprises.

Mais malgré la recherche de solutions, on s’attaque rarement à l’origine du mal : l’organisation du travail. On sait pourtant que les conditions de travail (open space, cloisonnement des tâches, changement récurrent de responsable ou de méthode de travail) associées à d’autres facteurs (objectifs inatteignables, surcharge de travail, tyrannie de la rentabilité et du chiffre, évaluation individuelle, déni des difficultés rencontrées) mènent à une souffrance éthique, à une sorte de déshumanisation qui peut broyer l’individu.

Il est à espérer que les consciences se réveillent et que le management retrouve son sens premier : la gestion de l’humain.

 

Le travail m’a tué, Arnaud Delalande, Grégory Mardon et Hubert Prolongeau, Éditions Futuropolis, 120 pages – 19 euros.