Lutte contre la fraude : en progrès mais peut mieux faire

Fiscalité par Valérie Forgeront

Le montant de la fraude fiscale s’est élevé à près de 19,5 milliards d’euros en 2016, selon la DNLF (Bercy). © HAMILTON / REA

Qu’elle soit fiscale, douanière ou sociale, via notamment le travail illégal, la fraude affiche toujours des montants insupportables et se développe même par endroits. Si la lutte contre ce phénomène s’intensifie, chaque année la fraude induit pour les comptes publics un manque à gagner qui se chiffre en milliards d’euros.

Où en est l’État dans sa lutte contre la fraude, fiscale ou sociale ? La Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF, rattachée à Bercy) affiche les résultats pour 2016. Sur le plan fiscal (impôt sur le revenu, ISF, TVA, impôt sur les sociétés/IS, impôts locaux…), les finances publiques (DGFIP) ont détecté un montant total de fraude de près de 19,5 milliards d’euros (contre 1 milliard d’euros pour la fraude sociale). Ce montant est inférieur à celui de 2015 (21 milliards d’euros), année qualifiée « d’exceptionnelle ». La fraude portant sur l’IS atteint 4 milliards d’euros, celle concernant l’ISF 600 millions d’euros. En 2016, les contrôles et l’action pénale menés par la DGFIP ont permis à l’État d’encaisser 11,1 milliards (contre 12,2 milliards en 2015 et 10,4 milliards en 2014), soit environ la moitié du montant total de la fraude fiscale repérée. Les redressements effectués par les douanes s’élevaient quant à eux à 415,1 millions en 2016, en progression de 10 % sur un an. Plus largement, la lutte contre la fraude s’exerce aussi bien à l’échelon départemental (via les comités CODAF, qui coordonnent les contrôles effectués par les services fiscaux et sociaux) qu’au niveau national et international. En 2016, la France a par exemple formulé plus de 47 000 demandes en matière de TVA et d’impôts directs à des services étrangers contre 7 250 en 2015.

Bientôt une loi anti-fraude ?

415,1

millions d’euros C’est le montant des redressements effectués par les douanes en 2016, en progression de 10 %.

Utilisation renforcée des outils numériques, extension des compétences de l’organisme Tracfin (lutte contre le blanchiment d’argent), développement des échanges de données entre services (DGFIP/douanes/répression des fraudes-DGCCRF), création d’un Plan de lutte triennal contre la fraude (PNLF), coopération européenne et internationale afin d’améliorer la transmission de données fiscales entre États… Si l’organisation de la lutte contre la fraude fiscale s’améliore, il reste beaucoup à faire. Le gouvernement, qui annonce d’ici à cet été un plan anti-fraude voire un projet de loi, a déjà dévoilé quelques nouvelles mesures. Parmi celles-ci : la création d’un service spécialisé dans les enquêtes judiciaires pour fraude à Bercy, la publication du nom des plus gros fraudeurs, le recours aux algorithmes pour détecter les dossiers de fraude, la mise en place d’un guichet de régularisation des situations fiscales à destination des entreprises… Le plan annoncé supprimera-t-il le « verrou de Bercy » ? Pour l’instant, la poursuite judiciaire d’un individu pour suspicion de délit de fraude fiscale n’est possible que si le ministère du Budget a déposé une plainte validée par la Commission des infractions fiscales (CIF).

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

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