Plus d’un mois après la journée de grève conduite mi-avril par les salariés pour protester contre la très faible hausse des salaires, la direction d’AG2R-La Mondiale n’entend toujours pas raison. La mobilisation était pourtant exceptionnelle à bien des égards : menée par une intersyndicale de tous les syndicats représentatifs – une entente rare –, la grève a rassemblé 15% des salariés. Et encore, on ne sait pas s’ils ont compté les télétravailleurs
, souligne Claire Guelmani, secrétaire de la section fédérale Organismes sociaux divers et Divers (OSDD) de la Fédération employés et cadres (FEC-FO).
Un taux quoi qu’il en soit conséquent au vu de la culture de la branche : Les groupes de protection sociale ne se mettent pas facilement en grève, poursuit Claire Guelmani, car jusqu’à présent les accords sur les salaires tenaient à peu près la route.
On ne peut pas en dire autant de la proposition de la direction lors des dernières NAO : 1,2% d’augmentation générale – un chiffre déjà faible comparé à l’inflation – et seulement pour les salaires en-dessous de 35 000 euros annuels, soit environ un tiers des salariés. Très loin des 4% de hausse générale demandés par l’intersyndicale.
Pour des augmentations collectives plutôt qu’individuelles
La FEC-FO, qui a rassemblé 12,5% des voix aux dernières élections au sein de l’AG2R-La Mondiale, dénonce une bien maigre enveloppe – 0,17% de la masse salariale – dédiée aux augmentations collectives. Depuis deux ou trois ans, le recours aux augmentations individuelles se développe, au détriment des accords généraux
, s’insurge Claire Guelmani. Le résultat net du groupe s’établissait pourtant en 2021 à 273 millions d’euros, en progression de 22,9% par rapport à l’année précédente. Il y a donc bien un aspect idéologique, estime la secrétaire fédérale : le groupe a de l’argent, mais préfère les augmentations individuelles. Il prétend que le pouvoir d’achat est maintenu de cette manière, en calculant des moyennes. Mais dans les faits tout le monde ne perçoit pas d’augmentations.
Pour toute réponse à cette mobilisation exceptionnelle, la direction d’AG2R-La Mondiale a proposé d’augmenter la prime d’intéressement de 500 euros. Un dilemme pour la FEC-FO, selon laquelle cette offre n’est pas appropriée, mais représente tout de même une compensation immédiate de l’inflation pour les salariés. Plutôt que de l’intéressement, on préfère du salaire avec un salaire différé qui alimente la protection sociale, expose Claire Guelmani. Mais il faut aussi répondre à la demande urgente des salariés, qui concerne la baisse de leur pouvoir d’achat.
Une nouvelle mobilisation envisagée en septembre
L’intersyndicale a lancé une grande consultation de l’ensemble des salariés, afin de déterminer les suites à donner au mouvement. Sur les 1 500 répondants au sondage, près de 1 300 se sont prononcés en faveur d’un débrayage de quelques heures, voire d’une nouvelle journée de grève.
Pour le moment, il a été décidé de différer la reprise du mouvement à l’automne, après la période estivale, qui ne se prête guère à la mobilisation. Si l’intersyndicale considère que les 500 euros d’intéressement supplémentaires accordés ne valent pas arrêt des négociations, elle aura ainsi le temps de s’assurer que la somme sera bien versée en juin. Redémarrer les NAO en septembre présente aussi l’avantage de prendre de vitesse le cadrage budgétaire décidé en conseil d’administration, et donc d’éviter qu’une enveloppe fixe soit dédiée aux augmentations sans que les syndicats aient leur mot à dire.