Nokia : mobilisation à Lannion contre le plan social

InFO militante par Valérie Forgeront

Quelque 5000 personnes, des salariés et des habitants de la ville et de ses alentours, ont manifesté le samedi 4 juillet à Lannion (20 000 habitants/Côtes-d’Armor) contre le plan de restructuration annoncé le 22 juin dernier par le groupe de télécoms Nokia. Ce plan prévoit la suppression de 1233 emplois en France dont 831 sur le site de Nozay (Paris-Saclay) dans l’Essonne (sur 2895 emplois) et 402 à Lannion (sur 772 emplois). Ce 6 juillet, des réunions à propos du plan devaient avoir lieu entre la direction et les syndicats à Paris-Saclay. Une nouvelle manifestation est prévue à Paris, le 8 juillet, devant l’ambassade de Finlande, pays d’origine de la multinationale.

Le 4 juillet, l’Union locale FO de Lannion, pointant les milliards d’euros de dividendes que Nokia a versé ces dernières années à ses actionnaires, avait appelé tous ses adhérents et plus largement tous les salariés, jeunes et retraités, à se mobiliser aux côtés des salariés de Nokia pour obtenir l’abandon pur et simple de ce plan de licenciements.

Si FO n’est pas implantée sur le site Nokia de Lannion, l’Union locale et l’Union départementale FO se sont impliquées dès le 22 juin, notamment en prenant part à l’intersyndicale, dans le combat contre ce plan social. La suppression de 402 emplois ouvre la voie à la fermeture totale du site de Lannion. Les salariés se mobilisent pour l’abandon du plan, ils ont raison. Nous le savons tous, ce plan aurait des conséquences lourdes sur tous les secteurs d’activité de la région, nous ne pouvons pas laisser faire réagissait l’UL-FO dans un communiqué dès le 30 juin.

Délocalisations en vue

Le plan annoncé par la direction à l’occasion d’un CSE extraordinaire le 22 juin va impacter quasi exclusivement l’activité de Recherche et Développement. Ainsi explique Sandra Briand, secrétaire adjointe de l’UL FO 380 ingénieurs seraient licenciés, mais aussi des techniciens.... Selon la militante, les salariés titulaires des contrats de travail les plus récents, dont quelque deux cents contrats signés il y a trois ans par de jeunes ingénieurs, sont particulièrement visés. La direction semble vouloir le lancer son plan dès le mois d’août, date d’arrivée d’une nouvelle direction sur le site indique la militante fustigeant l’absence de dialogue, le flou artistique des annonces et une direction finlandaise qui ne répond pas.

Ce qui est tout à fait limpide en revanche, c’est la volonté du géant finlandais, arguant d’une rationalisation de ses activités en France, d’en délocaliser une partie vers l’Inde, les États-Unis, la Finlande, le Canada ou encore la Pologne. Pour l’UD-FO, ces délocalisations seraient d’autant plus inadmissibles que Nokia, engagé entre autres dans le développement de la 5G ou encore des technologies de lutte contre la cybercriminalité, a bénéficié depuis des années des aides publiques : de la Région, de l’État mais aussi de l’Europe. Dès lors, l’Union départementale, par la voix de son secrétaire général, Éric le Courtois, estime qu’il faut évoquer la possible nationalisation de la Recherche et du Développement lorsqu’en France, un tel secteur est mis à mal par une restructuration.

Treize restructurations en dix ans

C’est le 4e plan de restructuration engagé par le groupe finlandais depuis le rachat, en 2016, d’Alcatel-Lucent. En amont de ce rachat, Nokia avait cependant promis de préserver les emplois pendant deux ans... Plus largement, en dix ans, d’Alcatel devenu en 2006 franco-américain via la fusion Alcatel-Lucent puis finlandais avec Nokia, le site de Lannion aura subi au total 13 plans de restructuration, assortis d’une perte sévère d’emplois. Depuis la fin des années 1980, les effectifs sont passés en effet de 2000 salariés environ à moins de 800 actuellement. Et le projet de Nokia vise à réduire de moitié cet effectif.

Dans la ville et ses alentours, terre d’industrie de hautes technologies, notamment en matière de télécommunications, depuis les années 1960, l’inquiétude est de mise quant à l’impact de ce nouveau plan social sur le bassin d’emplois. Nokia est le 3e employeur de la ville, après l’hôpital et Orange. Par ailleurs souligne Sandra Briant, cette forte réduction de voilure chez le Finlandais impacterait y compris le secteur de l’Enseignement supérieur. Lannion compte une école d’ingénieur, l’Enssat et un IUT et tous deux proposent certaines formations débouchant sur des stages ou des embauches chez Nokia. Que vont devenir ces formations ?, interroge Sandra Briand.

Le 28 juin, dans un communiqué, le syndicat FO de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (FO-ESR) des Côtes d’Armor réagissait à ce plan de suppressions d’emplois, s’inquiétant notamment pour l’attractivité du pôle universitaire de Lannion. FO-ESR appelait les étudiants et personnels de l’IUT et de l’Enssat à participer à la manifestation du 4 juillet. Le syndicat soulignait aussi que d’anciens étudiants sont devenus des salariés de Nokia tout comme le sont aussi beaucoup de proches du personnel de l’Université. Or, tous risquent d’être impactés directement par cette restructuration s’indignait FO-ESR.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante