[Peinture] Exposition immersive de Klimt et Klee

Culture par Christophe Chiclet

Pour voir les grandes peintres il faut aller dans les grands musées de par le monde. Ce n’est pas à la portée de toutes les bourses. Avec les nouvelles technologies des expositions immersives, c’est l’art qui se rapproche du public.

Depuis le 10 juin et pendant dix mois, l’ancienne base de sous-marins de Bordeaux présente en vidéo-projection et scénographie musicale, les œuvres de l’Autrichien Gustav Klimt (1862-1918) et de l’Allemand Paul Klee (1879-1940). Un joli pied de nez à ce site conçu pour la mort et la destruction et non pour la culture et l’art.

En effet, pour gagner la bataille de l’Atlantique et couler tous les convois américains qui ravitaillent la Grande Bretagne et à terme préparent la reconquête, les nazis ont besoin de bases sous-marines sur l’Atlantique, repères de leurs U-boot, ces petits sous-marins qui chassent souvent en bande et qui ont tué des dizaines de milliers de marins jusqu’à ce que les alliés cassent le code Enigma de leurs messages secrets.

Les Allemands commencent la construction de cette énorme base dès septembre 1941, pour la finir en juillet 1943. 15 sous-marins pouvaient s’y cacher dans 42.000 m2, protégés par un toit de 6 mètres d’épaisseur de béton armé. 6.500 ouvriers s’y sont éreintés dont 3.000 prisonniers républicains espagnols. Aujourd’hui, une stèle rappelle que 70 d’entre eux y ont perdu la vie.

Mais après-guerre, Bordeaux tourne le dos à son fleuve et les hangars, les bassins à flot et la base sous-marine deviennent des friches industrielles. Depuis une vingtaine d’années, la mairie a réhabilité cet espace et la base a été dédiée à l’activité culturelle. 14 millions d’euros ont été investis par l’opérateur Culturespaces, pour en faire un site de première importance en Gironde avec nombre d’expositions et d’animations.

Projection des œuvres sur les murs et les plans d’eau

Cette exposition sur 12.000 m2 utilise quatre des onze bassins où les sous-marins se cachaient. 98 vidéoprojecteurs et 120 kilomètres de fibre optique déployés pour faire circuler le son et l’image, permettent aux visiteurs (1) de voir les tableaux des deux artistes sur les murs, avec leurs reflets dans l’eau des bassins car les cales sont restées à flot lors de la restauration du site.

Les reproductions, démesurées par rapport aux œuvres originales (sur huit mètres de haut), s’insèrent sur fond de Tannhaüser de Wagner lors des premiers pas du visiteur de cette exposition intitulée « Gustav Klimt, d’or et de couleurs ». La déambulation « klimtienne » dure trente minutes, suivie d’un programme de quinze minutes consacré à Paul Klee. C’est ainsi que la base sous-marine devient « bassins de lumière » et permet aux organisateurs de revendiquer le titre de « plus grand centre d’art numérique au monde ». En effet, à ce jour, ce type d’exposition-projection n’a eu lieu qu’à Paris, aux Baux de Provence et en Corée du sud, mais dans des espaces moins imposants.

Le jour de l’inauguration, 1.300 personnes ont pu admirer cet exploit technologique. 32.000 places ont déjà été réservées et l’organisation attend 400.000 entrées pour les dix prochains mois.

(1) Pour des raisons de sécurité sanitaire, seulement 385 personnes peuvent entrer en même temps pour une visite de 45 minutes.

Base sous-marine, Boulevard Alfred Daney, Bordeaux. Exposition juin 2020-avril 2021 : du lundi au jeudi et dimanche 10h-19h ; vendredi et samedi 10h-21h ; tarif : de 9 à 13,50 €. Contact : 05 35 00 00 90 ; www.bassins-lumieres.com

Christophe Chiclet Journaliste à L’inFO militante