Ce sont trois débrayages successifs qui signent la détermination farouche des Peugeot Japy à défendre leurs emplois. Le 25 août, à l’appel notamment de FO, syndicat ultra-majoritaire avec 75% des voix aux dernières élections, 180 des 240 salariés de l’équipementier situé à Valentigney près de Montbéliard (Doubs) ont cessé le travail.
L’équipe du matin a lancé le mouvement, de 12 h à 13h, suivie par celle de l’après-midi, de 13h à 14h. L’équipe du soir a embrayé, de 21h à 22h, à l’unanimité de ses 15 membres. « S’il y a des réductions d’effectifs, ils savent qu’ils seront les premiers concernés », rappelle Dany Beugin, élu FO au Comité social et économique (CSE), désigné pour représenter les salariés lors de la procédure de redressement judiciaire engagée depuis la fin juin.
PSA divise de près de moitié son volume de commandes
Et leur inquiétude est grande. Premier client du fabriquant de pièces de boîtes de vitesse, le groupe PSA s’engage, pour 2021 d’après les premiers chiffres communiqués aux quatre candidats à la reprise, sur un volume de commandes de 17 à 20 millions (contre 30 millions attendus cette année).
Cette révélation, qui confirme les rumeurs circulant avant les vacances d’un désengagement partiel de PSA, tient du coup de massue. Car le constructeur automobile sera, fin décembre, le client exclusif de Peugeot Japy. A cette date, en effet, le contrat de l’équipementier avec Bosch (représentant 10% de son activité actuelle) arrive à échéance.
Cet engagement minime de PSA est inacceptable pour FO. Le chiffre d’affaires annoncé ne représente qu’une centaine d’emplois sauvés
, précise Dany Beugin. Autrement dit, il met en péril les offres de reprise les mieux-disantes en matière de préservation d’emplois, telle celle de l’actuel directeur du site, Thierry Chevrier, qui propose de conserver 160 des 240 postes. Les autres offres prévoient de garder uniquement 90 à 100 emplois.
Les salariés demandent à PSA de prendre ses responsabilités
Par ces débrayages, les salariés demandent à PSA de prendre ses responsabilités vis-à-vis de Peugeot Japy
, commente le militant FO, qui rappelle le niveau de qualité (et de productivité) toujours aussi élevé fourni par l’ensemble des salariés, malgré le contexte
, et leur implication inchangée au travail.
Un des candidats à la reprise – le groupe Defta – en a d’ailleurs fait la remarque à FO, qui a déjà rencontré l’ensemble des repreneurs potentiels (hormis Patrick Mermillod, industriel retraité et ancien dirigeant de Peugeot Japy, qui a décliné la proposition).
Tous doivent revoir, cette semaine, le constructeur automobile dont ils espèrent une amélioration des prévisions de commandes 2021, susceptible de leur donner de la visibilité et de faciliter la transition pour Peugeot Japy.
Plus que neuf jours avant le dépôt des offres définitives
Rappelons que le constructeur automobile affiche une très belle solidité financière : PSA a réussi la performance, malgré le choc de la crise sanitaire et le recul de 46% de ses ventes au premier semestre 2020, de rester bénéficiaire, avec un bénéfice net de 595 millions d’euros.
Il a même confirmé son ambition d’une marge moyenne de 4,5% sur la période 2019-2021, grâce à un rebond au second semestre. Et il a bénéficié de nombreux soutiens, dont les récentes mesures gouvernementales d’activité partielle et d’aides à l’achat d’automobile.
Dans ce contexte, personne à Valentigney n’ose imaginer que PSA ne soit pas au rendez-vous du sauvetage de Peugeot Japy, avec qui la famille Peugeot a d’ailleurs eu des liens capitalistiques jusqu’au début des années 2000 et qui fournit actuellement les usines du constructeur à Valenciennes (Nord), à Metz-Trémery (Moselle) ainsi qu’un site Opel situé à Aspen, en Autriche.
Personne, non plus, n’ose croire fondées les rumeurs selon lesquelles le désengagement partiel de PSA s’expliquerait par sa volonté de recourir à un équipementier dans un pays à bas coût.
Nous avons besoin de PSA, mais PSA a aussi besoin de nous
, rappelle la section FO de Peugeot Japy, qui n’exclut pas un nouveau débrayage. La semaine sera décisive. Le temps presse : la date-limite de dépôt des offres définitives de reprise est fixée au 10 septembre.