Police municipale : à Strasbourg, une grève illustre la colère de tout un secteur

InFO militante par Chloé Bouvier, L’inFO militante

© Frederic MAIGROT/REA

Vent debout contre le projet de réforme des retraites, exigeant la reconnaissance de leurs missions par le salaire et une amélioration de l’indemnitaire : les policiers municipaux de Strasbourg étaient en grève pendant près de 24h le 25 février, à l’appel notamment de FO, syndicat leader chez ces personnels territoriaux. Le mouvement de protestation illustre l’humeur de l’ensemble des agents d’un secteur las d’être le « parent pauvre de la sécurité ».

Grands oubliés de la réforme des retraites, les policiers municipaux sont aujourd’hui lassés d’être les parents pauvres de la sécurité. indiquait un tract de l’intersyndicale de la police municipale de Strasbourg, à laquelle participe FO, les syndicats appelant à une journée de grève le samedi 25 février. Le mouvement a duré 24h et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a bien marché, se félicite Ludovic Durand, secrétaire national de FO Police Municipale. Pour preuve, alors que le commissariat compte 150 agents et fonctionne en continu, il n’y a eu aucun agent sur le terrain de 9h du matin à 22h le soir. Seuls trois collègues ont été maintenus en service au poste de commandement pour répondre aux appels urgents.

Les fonctionnaires de la police municipale de Strasbourg ne sont pas les seuls à être en colère et d’ailleurs d’autres actions sont en préparation, comme à Toulouse ou Marseille. Pas forcément sur le modèle de la grève de 24h, précise Ludovic Durand.

Si, le syndicat n’appelle pas à un mouvement plus global car le calendrier est complexe du fait de la mobilisation contre la réforme des retraites, nous appellerons prochainement à une action nationale, indique-t-il. Pour l’instant, rendez-vous est donné aux militants le 7 mars, dans les manifestations et avec un signe distinctif pour montrer notre présence.

L’enjeu des salaires et des primes

Le 25 février, les revendications étaient spécifiques à la police municipale. Des revendications statutaires et indemnitaires. Les agents, fonctionnaires territoriaux, demandent ainsi le passage en catégorie B. Pour l’instant, ils sont bloqués en catégorie C. Cette montée nous permettrait d’être sur la même échelle que la gendarmerie, souligne le secrétaire national. Alors qu’il y a des difficultés de recrutement dans notre métier, le passage en catégorie B permettrait de faire jouer l’attractivité du secteur tout en préservant l’exigence requise pour nos postes.

Les revendications portent aussi sur l’indemnitaire. Nous demandons la revalorisation de la prime de risque au taux de 25 % pour les catégories C et 32 % pour les catégories B, explique Ludovic Durand. FO demande aussi une indemnité de responsabilité pour les agents assurant une mission d’encadrement.

Ce n’est pas facile de courir après un voleur après 60 ans !

A l’image de l’ensemble de la fonction publique, le syndicat FO police municipale demande aussi l’intégration des primes dans le calcul de la retraite. Cette non prise en compte pour l’instant a un véritable impact sur nos pensions : on voit des collègues qui gagnaient 2 200 euros partir avec seulement 1 100 euros de retraite. FO insiste par ailleurs sur la nécessaire reconnaissance de la pénibilité des missions de police municipale et demande la mise en place d’une bonification quinquennale. Cette bonification spéciale, dont bénéficient les policiers nationaux, apporte une annuité de cotisation (soit 4 trimestres) tous les 5 ans d’exercice. Elle est plafonnée à cinq annuités et, pour y être éligible, le fonctionnaire doit avoir exercé 27 ans.

Plus largement et à l’instar d’une très large majorité de travail, qu’ils exercent dans le public ou dans le privé, FO Police municipale est vent debout contre le projet de réforme des retraites présenté par le gouvernement. Le militant fustige la philosophie de la réforme avec son axe central : le décalage de l’âge de départ à la retraite. Travailler deux ans de plus avant de pouvoir partir à la retraite, c’est énorme. Ce n’est pas facile de courir après un voleur après 60 ans ! De plus, dans certains cas, la mission implique des rapports de force avec des usagers, cela demande beaucoup de calme et de patience. Or, quand on est usé par le métier, c’est bien moins facile. Et prendre une mauvaise décision ou perdre son calme, dans notre secteur, cela a des conséquences. Pour lui, ces deux ans supplémentaires de travail risquent avant tout de faire exploser les arrêts maladies. En police municipale, c’est difficile de recycler à d’autres postes des collègues qui sont fatigués car âgés. Forcément, ceux-là devront s’arrêter de travailler et ça va faire exploser les dépenses de la sécurité sociale.

La police municipale toujours mise à l’écart

Dans la police municipale, le projet sur les retraites est venu exacerber une colère, qui date. Et pour cause. La dernière loi, dite Chevènement, date de 1999. Depuis, plus rien n’a été fait en faveur de la police municipale. Au contraire, on l’a décousue et aujourd’hui, les agents ne reconnaissent plus leur métier, souligne Ludovic Durand. Il pointe notamment la mise en place de missions supplémentaires, mais qui ne font l’objet d’aucune reconnaissance au plan du salaire.

Paradoxe souligne FO municipale alors que les questions de sécurité sont régulièrement évoquées par les politiques. Mais la police municipale demeure à l’écart. Par exemple, lors du Beauvau sur la sécurité, le ministère avait promis de nous recevoir. Il ne l’a jamais fait, illustre le secrétaire national. Il pointe aussi la difficulté d’avoir de multiples interlocuteurs, la police municipale relevant de l’autorité des maires. Sur la négociation des grilles salariales, c’est avec eux que ça coince, souligne-t-il notant là encore un paradoxe. Par sa présence sur le terrain et la connaissance des administrés, la police municipale est un atout de poids dans le cadre des politiques locales. Nous sommes un plus, mais il faut que cela se paye, que le travail que nous effectuons soit valorisé.

Chloé Bouvier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération