Pour sauver leur emploi, les salariés d’Odéolis ne réparent plus les bornes PMU

Emploi et salaires par Clarisse Josselin

Photo : F. Blanc (CC BY-NC 2.0)

A l’appel d’une intersyndicale, les salariés d’Odeolis n’assurent plus la maintenance des bornes et terminaux du PMU depuis mi-juin. Ils s’opposent à la perte des contrats passés avec le géant des paris hippiques au 1er janvier 2019, ce qui condamnerait une centaine d’emplois et risquerait même de mettre toute l’entreprise en péril.

Depuis deux mois, les techniciens d’Odéolis, prestataire chargé de la maintenance des bornes et terminaux PMU notamment dans les cafés et chez les buralistes, ne réparent plus les machines tombées en panne. Mobilisés à l’appel d’une intersyndicale FO-CGT-Unsa-CFDT-CFTC-CFE-CGC, ils retiennent également les pièces défectueuses pour empêcher leur remplacement par les fabricants. La quasi-totalité des 200 techniciens ont répondu à l’appel. Normalement, nous traitons 3 500 pannes par mois, c’est plutôt 4 actuellement , précise Jean-Louis Chaix, délégué FO chez Odéolis. Selon lui, 1 500 points de vente sont désormais en attente d’une intervention.

À la source du conflit, la volonté du géant du pari hippique de ne pas renouveler au 1er janvier 2019 ses contrats de maintenance passés avec Odéolis, ancienne filiale de la Française des Jeux (FDJ), avec qui il travaille pourtant depuis 2002. Ils prétendent que nous sommes 30 à 40 % trop cher et qu’ils n’ont pas les moyens financiers de nous garder, dénonce le délégué FO. Suite à un appel d’offres, ils ont choisi la société Tibco qui travaille avec beaucoup d’auto-entrepreneurs. Leurs frais ne sont pas les mêmes, c’est l’esprit Uber. Chez nous les salariés sont en CDI. Pour rappel, en 2017, le PMU a enregistré près de 800 millions d’euros de bénéfices.

Un dialogue au point mort

Pour Odéolis, les contrats passés avec le PMU représentent près de 11 millions d’euros, soit 30% de son chiffre d’affaires. Leur perte entraînerait de 80 à 100 licenciements, selon Jean-Louis Chaix. Mais il craint aussi une réaction en chaîne qui pourrait mettre l’entreprise et ses 310 emplois en péril. Ce départ nous fragilise vis-à-vis de nos autres clients, poursuit-il. L’intersyndicale demande à PMU de revoir sa position. Sinon, on voudrait un geste de PMU pour financer un PSE correct, poursuit le délégué FO. Malgré une rencontre le 4 juillet entre l’intersyndicale et la direction du géant du pari hippique, le dialogue reste au point mort.

Un autre menace pèse sur le devenir des contrats de maintenance passés avec FDJ, actuellement deuxième client d’Odéolis. Une charte précise que FDJ ne peut pas avoir un prestataire dépendant d’elle à plus de 25%, explique Jean-Louis Chaix. Or la perte de PMU ferait remonter ce taux de dépendance à 50% pour Odéolis, selon l’intersyndicale. Dans un tract, cette dernière demande à FDJ, qui appartient à 72% à l’État, de prolonger le contrat actuel de 5 ans fermes, ce qui permettra à Odéolis de développer les activités avec nos autres clients et de convaincre les nouveaux prospects.

On peut tenir dans la durée

Pour l’instant, selon FO, FDJ serait prête à prolonger seulement d’un an le contrat actuel. Pourtant ce sont eux qui nous ont mis dans cette galère, poursuit Jean-Louis Chaix. Il rappelle que FDJ avait externalisé sa maintenance en 1991, puis revendu sa filiale –devenue Odéolis– à un fonds de pension américain en 1998. Passée entre plusieurs mains, la société, dont les effectifs sont montés jusqu’à 900 salariés, a connu un redressement judiciaire en 2011. Elle appartient désormais à un actionnaire privé.

Fin juillet, le combat s’est déplacé sur le terrain judiciaire. Sous la pression de PMU, les constructeurs de machines Idemia et PMC nous ont attaqués en référé au tribunal de commerce de Paris, explique le délégué FO. Ils n’ont pas obtenu une astreinte financière de 15 000 euros par jour mais le juge nous a ordonné de restituer le matériel avant le 27 août. Mais si on renvoie les pièces, la mobilisation n’aura servi à rien. Les salariés restent déterminés à se battre pour l’emploi. La grève ne concerne que le PMU, les interventions se poursuivent chez nos autres clients, on peut tenir dans la durée, prévient Jean-Louis Chaix.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante