La Cour de cassation, dans un arrêt en date du 26 février 2025 (Cass. soc., 26-2-25, n°23-15427), précise les conséquences d’une information donnée tardivement à un salarié sur la priorité de réembauche en cas d’adhésion à un contrat de sécurisation professionnelle (CSP).
En l’espèce, est envisagé le licenciement économique d’un salarié. L’employeur lui propose un CSP. Le salarié accepte quelques temps plus tard le dispositif. Le jour où le salarié adhère au CSP, l’employeur lui adresse une lettre qui précise qu’il bénéficie d’une priorité de réembauche durant un an à compter de la date de la rupture du contrat de travail. Le salarié conteste la rupture de son contrat en saisissant à cet effet, la juridiction prud’homale.
En appel, le licenciement est considéré comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, au motif que l’information sur la priorité de réembauche n’a pas été donnée avant l’acceptation du CSP par le salarié. L’employeur forme alors un pourvoi en cassation. A l’appui de celui-ci, il argumente que le défaut d’information du salarié ayant adhéré à un CSP, du bénéfice de la priorité de réembauche ne prive pas le licenciement d’une cause réelle et sérieuse. Selon l’employeur, cette omission permet uniquement au salarié de demander des dommages-intérêts à condition de prouver un préjudice.
Se posait devant la Cour de cassation, la question de savoir si le défaut d’information du salarié sur la priorité de réembauche, au plus tard au moment de son adhésion à un CSP, a pour conséquence de rendre le licenciement subséquent sans cause réelle et sérieuse.
La Haute juridiction répond à cette question par la négative. Elle affirme d’une part, que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’un contrat de sécurisation professionnelle, la priorité de réembauche dont il bénéficie doit être mentionnée dans le document écrit énonçant le motif de la rupture du contrat de travail, et donc être portée à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation, d’autre part que le défaut d’information du salarié ayant adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle sur la priorité de réembauche ne prive pas la rupture du contrat de travail de cause réelle et sérieuse, mais permet seulement au salarié qui justifie d’un préjudice d’obtenir des dommages-intérêts
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Le défaut d’information du salarié sur la priorité de réembauche n’étant pas de nature à remettre en cause la rupture du contrat de travail, l’arrêt de la cour d’appel est cassé.
L’arrêt du 26 février 2025 apporte deux informations essentielles : d’une part, l’information d’un salarié quant à la priorité de réembauche peut être donnée, au plus tard, au moment de l’adhésion au CSP.
Elle n’a donc pas nécessairement à être donnée durant le délai de réflexion dont dispose le salarié pour adhérer ou non au dispositif (21 jours calendaires à compter de la proposition d’adhésion, art. 4 convention Unédic 26 janvier 2015). D’autre part, quand bien même l’information n’aurait jamais été donnée, la rupture du contrat n’est pas invalidée. Le salarié peut uniquement prétendre à des dommages-intérêts à condition de prouver l’existence d’un préjudice.
Cet arrêt est l’occasion de rappeler les cas dans lesquels un salarié bénéficie d’une priorité de réembauche durant un an à compter de la rupture de son contrat pour motif économique.
Tout d’abord, peu importe le motif, tout licenciement économique permet au salarié de bénéficier de cette priorité (art. L 1233-45). La jurisprudence a ensuite étendu cette faculté, aux salariés ayant adhéré à un CSP (Cass. soc., 30-11-11, n°09-43183), ceux ayant bénéficié d’un congé de reclassement (Cass. soc., 11-12-19, n°18-18653) et enfin ceux ayant accepté un départ volontaire négocié dans le cadre d’un accord collectif (Cass. soc., 13-9-05, n°04-40135).
Afin de bénéficier de cette priorité de réembauche, le salarié doit, soit se manifester auprès de l’employeur dans le délai d’un an à compter de la date de rupture du contrat, soit répondre à une sollicitation de l’employeur, à condition qu’elle soit suffisamment claire (Cass. soc., 11-4-12, n°11-11037).
Le défaut d’information du salarié, de la part de l’employeur, sur la priorité de réembauche n’est pas considéré comme causant nécessairement un préjudice au salarié (Cass. soc., 30-1-19, n°17-27796), ce qui n’a pas toujours été le cas (Cass. soc., 16-5-13, n°11-28831). Il lui revient de prouver l’existence d’un préjudice, qui doit être distinct de celui résultant de la rupture de son contrat.
L’arrêt du 26 février 2025 confirme cette position jurisprudentielle. Bien qu’il ne s’agisse pas, en l’espèce, d’une omission mais d’un problème de temporalité de l’information donnée, la Cour de cassation applique la même règle. En l’absence d’information donnée par l’employeur sur la priorité de réembauche, ou en cas de retard dans la transmission de cette information, pas de préjudice automatique, au salarié de prouver un préjudice, et pas de remise en cause de la rupture du contrat de travail.
La théorie du préjudice nécessaire, en la matière, ne semble donc qu’un lointain souvenir…