Prison : la fermeture de Clairvaux ne semble plus totalement irréversible

Emploi et salaires par Clarisse Josselin

Dominique Perchet, secrétaire générale de l’UD FO 52 ; Dominique Bruneau, directeur de la centrale de Clairvaux ; Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO ; Emmanuel Gauthrin, secrétaire général du syndicat national FO pénitentiaire. Photographie : Clarisse Josselin / FO Hebdo

Le ministre de la Justice, qui avait annoncé le 27 avril la fermeture de la maison centrale de Clairvaux pour vétusté, s’est finalement rendu sur place le 23 mai. Il a pu voir les lieux et rencontrer le personnel. Les surveillants, qui ont également reçu la visite de Jean-Claude Mailly, continuent à se battre pour obtenir le maintien du site.

« C’est la première fois que je visite une prison aussi sereine, on ne ressent aucune tension parmi les détenus comme parmi les personnels, a réagi Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de FO, à l’issue de sa visite d’une heure trente, le 23 mai. Il faudrait certes quelques rafraîchissements, mais Clairvaux est viable et pourrait servir d’exemple aux établissements plus modernes. »

Cette maison centrale de haute sécurité, située à Ville-sous-la-Ferté, a ouvert en 1804 au sein de l’abbaye de Clairvaux. Elle accueille 128 détenus pour 198 places, essentiellement pour de très longues peines. Prétextant la vétusté des bâtiments, le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas avait annoncé sa fermeture le 27 avril, sans concertation préalable.

Un premier recul du ministre

Un « coup de massue » pour les 200 personnels, dont 152 surveillants, qui dès le lendemain bloquaient le site à l’appel du syndicat national pénitentiaire SNP-FO, très largement majoritaire. Le 14 mai, 1300 habitants et élus locaux ont marché à Bar-sur-Aube pour s’opposer à cette fermeture et inviter le ministre à venir constater par lui-même l’état des locaux.

Jean-Jacques Urvoas a réalisé une visite surprise sur les lieux le 23 mai, quelques heures avant Jean-Claude Mailly. « Il ne remet pas en cause sa décision pour le moment, mais il nous a dit qu’il attendait une étude de l’agence publique pour l’immobilier de la justice et referait un point mi-juin, explique Clément Mathieu, secrétaire général du syndicat SNP-FO de Clairvaux. Il nous a invités à lui fournir des éléments. C’est un premier recul qui nous montre que la porte n’est pas complètement fermée, nous allons continuer à faire pression pour laisser le site ouvert ».

11 millions d’euros de travaux selon FO

Le ministre avait annoncé que la remise en état des locaux nécessiterait 70 millions d’euros de travaux, en se basant sur une étude réalisée en 2010. Des chiffres « qui semblent un peu farfelus », selon Jean-Claude Mailly. Le syndicat SNP-FO ne nie pas la nécessité de faire des travaux, notamment sur la toiture, mais chiffre la note à 11 ou 12 millions d’euros.

La décision de fermeture semble d’autant plus étonnante que des investissements ont été réalisés récemment. Des travaux d’illumination sont en cours. Dans l’unité de soin, le cabinet dentaire est flambant neuf et les détenus bénéficient d’un service d’imagerie médicale relié directement à l’hôpital de Troyes. Une salle de vidéoconférence, qui sent encore la peinture fraîche, permet de mener des jugements à distance, pour l’outremer ou pour les détenus les plus dangereux.

Une région économiquement sinistrée

Une fermeture de cette prison hautement symbolique serait lourde de conséquences. D’un point de vue pénitentiaire, il faudrait trouver des places dans d’autres établissements, alors que la plupart sont déjà surpeuplés. Et Clairvaux accueille une vingtaine de détenus très difficiles, dont les autres prisons ne veulent plus. Par ailleurs, c’est à Clairvaux que sont fabriquées les chaussures de l’ensemble des surveillants de prison.

Sur le plan économique, une fermeture entraînerait la suppression de 200 emplois directs et 1000 emplois indirects, dans une région déjà sinistrée. Elle menacerait aussi le maintien de la gendarmerie. « La Cristallerie Royale de Bayel va fermer, tout comme le site des sanitaires Allia, et Cauval, qui emploie 450 personnes, est en cours de rachat, réagit Arnaud Marchal, secrétaire général de l’union départementale FO de l’Aube. L’annonce du ministre, basée sur de fausses informations, a été la goutte d’eau. »


Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante