Hôpitaux : malades d’un Ondam toujours plus insuffisant
Tombola, appels aux dons par des enfants, emprunt citoyen… L’hôpital public mérite mieux que la charité !
, s’indignait, le 15 octobre, la branche santé de la SPS-FO au lendemain de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. De la solidarité à la charité, nous assistons à un retour en arrière inacceptable et sans précédent
, fulminait la fédération FO. Et de citer les hôpitaux de Saint-Nazaire, Évreux, Nantes et Georges Pompidou à Paris, sites où l’appel au public a été activé pour ouvrir des lits, payer un scanner ou encore pour fournir du matériel aux équipes soignantes
, et pour des projets de recherche qui sauvent des vies
. Ces pratiques, que conteste FO, se sont développées à la faveur d’une situation hospitalière plus que dégradée et qui ne doit rien au hasard. Depuis des années FO dénonce ainsi un Objectif national des dépenses d’Assurance maladie (Ondam) qui étrangle financièrement les établissements de santé
. Avec pour conséquences des fermetures de lits, des restructurations, privatisations, mutualisations, externalisations et suppressions de postes
. En vingt-cinq ans, 100 000 lits ont été fermés dans les hôpitaux.
Un budget dramatiquement en dessous des besoins réels
Cette pénurie de moyens risque de perdurer en 2026. L’Ondam (créé en 1996 par le gouvernement Juppé) prévu par le PLFSS serait ainsi de 1,6 % (soit une économie de 7,1 milliards d’euros sur la santé) avec un sous-Ondam hospitalier affiché à 2,4 %. Les économies infligées aux hôpitaux seraient de 1,8 milliard d’euros. Selon les professionnels de santé, l’évolution des dépenses hospitalières, en tenant compte de divers paramètres, serait plutôt de 2,1 % (111,8 milliards d’euros contre 109,6 en 2025). Et même plus rude. En intégrant le paiement à la CNRACL de la hausse du taux de cotisation employeurs (en vigueur depuis cette année), cet Ondam hospitalier serait en réalité de 1,6 %, s’alarment entre autres les fédérations hospitalières, notant que c’est le taux le plus bas depuis une dizaine d’années, hors période Covid. Et de s’indigner : Il manque 1,1 milliard d’euros, ce qui correspond à 20 000 postes d’infirmiers.
Pour la SPS-FO, c’est un budget de destruction, dramatiquement en dessous des besoins réels : il ne compensera même pas l’inflation et condamnera les établissements à poursuivre les restrictions, au détriment de la qualité des soins comme des conditions de travail
. Pour couvrir a minima les besoins des établissements, l’Ondam hospitalier devrait être au moins de 5 %, soulignent depuis des années les acteurs de la santé. FO aussi.
Fonction publique : de plus en plus une variable d’ajustement budgétaire
Le budget Lecornu est une saignée pour la fonction publique
, fulminait le 15 octobre la Fédération générale des fonctionnaires FO. Les dépenses de l’État baisseront en 2026
, martèle de son côté le gouvernement. Et cela va se traduire par une baisse en valeur des crédits ministériels, dont ceux affectés au financement des opérateurs. Cet effort exemplaire requiert un pilotage resserré de la masse salariale de l’État et une maîtrise de son train de vie, une rationalisation et un recentrage des dépenses des opérateurs ainsi que de certaines aides. La mise en place de la mission
La FGF-FO liste les mesures austères concernant, spécifiquement ou non, les 5,7 millions d’agents publics, fonctionnaires et contractuels, et les pensionnés du public. Ainsi est décidé une État efficace
contribuera également au respect de cet objectif en 2026.une troisième année blanche
. En clair, comme depuis 2024, aucune revalorisation générale des salaires indiciaires. FO ne cesse de demander cependant une hausse immédiate du point d’indice à hauteur de 10 % et une revalorisation de la grille des trois catégories (A, B et C). Cela entre autres pour contrer le phénomène de Smicardisation des salaires dans le public. Le pouvoir d’achat du point a ainsi reculé de 31,5 % en vingt-cinq ans.
Attaques tous azimuts
Les effectifs publics sont aussi impactés avec la suppression annoncée de 3 119 postes en 2026 dont 1 735 postes ETP chez les opérateurs. À l’Éducation nationale, souligne la FNEC FP-FO, si 5 400 emplois supplémentaires sont annoncés, ce n’est qu’un trompe-l’œil. Par la réforme des concours d’enseignants, les élèves fonctionnaires de master 1 ne seront pas dans les classes et les besoins en enseignants ne seront donc pas comblés. Le manque de postes se chiffre à plus de 4 000, soit pire qu’en 2025. L’austérité appliquée au public vise aussi les retraités avec un gel des pensions. Est maintenue aussi la baisse de 10 %, déjà en vigueur, de l’indemnisation des arrêts maladie de moins de trois mois. La FGF-FO note aussi la baisse de 15 % des crédits de l’action sociale interministérielle
, alors que l’appauvrissement des agents est patent. Par ailleurs, la taxation des cotisations de mutuelle, à hauteur d’un milliard d’euros
, risque d’avoir rapidement une répercussion sur les tarifs des contrats signés par les ministères avec les opérateurs, dans le cadre de la réforme de la protection sociale complémentaire (PSC). Illustration encore de l’austérité, la mise en place de la PSC dans l’hospitalière est repoussée à 2028.
Les retraités, cœur de cible de mesures injustes
Le gouvernement s’acharne sur les retraités
, cinglait l’Union confédérale des retraités FO (UCR-FO) le 23 octobre, réagissant à la cascade de mesures décidées par le gouvernement Lecornu (dont certaines proposées déjà par le gouvernement Bayrou), et qui menacent les retraités (plus de 17 millions en France). Dans le cadre de l’année blanche
, les pensions de base seraient gelées en 2026, non indexées à l’inflation (estimée par les observateurs entre 1,1 % et 1,3 %). Ce blocage viendrait après les péripéties de la revalorisation de 2025, finalement acquise à 2,2 %, mais qui, initialement, était prévue minime et décalée de six mois par le gouvernement Barnier (censuré le 4 décembre 2024). Depuis janvier 2017, les pensions n’ont augmenté que de 13,6 % pour une inflation à 19,5 %
, rappelaient fin 2024 les unions de retraités. Autre mesure prévue pour 2026, le gel du barème de l’impôt sur le revenu (l’Assemblée a voté contre le 25 octobre). Il entraînerait une hausse d’impôt pour les retraités imposables et l’entrée dans l’impôt pour les plus modestes. La Drees indiquait l’été dernier que le montant brut moyen mensuel d’une pension de droit direct était de 1 666 euros (1 541 euros net) fin 2023, en recul de 1,2 % en euros constants sur un an. Les retraités n’ont donc rien de nantis.
L’UCR-FO s’adresse aux parlementaires
En 2026 encore, l’abattement fiscal de 10 % serait supprimé (en commission, les députés ont voté contre le 21 octobre), remplacé par un forfait individuel de 2 000 euros. Or, cela augmenterait le revenu fiscal de référence, lequel détermine l’octroi et le niveau de certaines aides, ou encore fixe le taux de CSG, notamment. Cette suppression aurait donc une incidence sur la pension. Cerise sur le gâteau, les retraites complémentaires ne connaîtront aucune hausse au 1er novembre prochain, apprenait-on le 17 octobre à l’issue du conseil d’administration de l’Agirc-Arrco. FO a dénoncé l’obstruction des organisations patronales pour la revalorisation de la valeur du point
. Sans même évoquer les mesures prévues en 2026 dans le domaine de la santé et qui impacteraient aussi les retraités, un nouvel affront vient de leur être fait à travers le mécanisme de compensation
, prévu dans le cadre de la suspension
ou du décalage
de la réforme 2023 des retraites. Il est ainsi annoncé une hausse de la taxe sur les mutuelles (2,25 % contre 2,05 % actuellement), ce qui se répercuterait sur les tarifs des contrats. Par ailleurs, la sous-indexation des pensions de base prévue en 2027 et initialement annoncée à 0,4 point serait réhaussée à 0,9 point. L’UCR-FO a décidé de s’adresser aux parlementaires pour leur demander de rejeter ces dispositions, de maintenir l’abattement de 10 %, de revaloriser toutes les pensions a minima selon l’inflation
.
Santé : des économies aux conséquences dangereuses
Pour économiser 7,1 milliards d’euros dans le domaine de la santé en 2026, le gouvernement compte mettre les assurés sociaux sévèrement à contribution. Le PLFSS 2026, qui reprend nombre de mesures envisagées par l’ex-Premier ministre François Bayrou, vise entre autres une baisse du nombre des arrêts maladie. La très forte progression des dépenses liées aux arrêts de travail, qui ont connu une hausse annuelle moyenne de 6 % entre 2019 et 2023 contre 3 % sur la période 2010-2019, n’est pas soutenable
, argumente le gouvernement. Pour maîtriser
les dépenses d’indemnités journalières, le PLFSS prévoit de réduire la durée initiale des arrêts à quinze jours lorsqu’ils sont prescrits par un médecin de ville, et à un mois à l’hôpital. Idem pour les prolongations. Sauf dérogations justifiées par le médecin, les arrêts de travail seraient prolongés, mais dans la limite de deux mois seulement à chaque fois. Le régime de l’affection de longue durée (ALD) dite non exonérante
, soit ouvrant droit à des arrêts maladie de plus de six mois pour des pathologies (TMS, dépression légère) n’entrant pas dans le cadre d’une ALD, verrait quant à lui sa portée restreinte. Ainsi, note le PLFSS, les assurés atteints d’une affection qui nécessite une interruption de travail d’au moins six mois, mais qui n’est pas reconnue comme une ALD exonérante, se verront appliquer les règles de droit commun en matière d’indemnités journalières
Pour FO, toutes ces mesures qui remettent en cause les droits des personnes malades
sont inadmissibles.
Un risque de renoncement aux soins
Dans ce PLFSS pour 2026, le gouvernement maintient aussi le doublement du plafond des franchises médicales et des participations forfaitaires payées par les assurés sociaux (consultations, transports sanitaires) de 50 euros à 100 euros par an. Des décrets en ce sens, dont FO demande le retrait, ont déjà été présentés début septembre au Conseil de la CNAM. Le montant des franchises serait aussi multiplié par deux concernant les boîtes de médicaments et les dispositifs médicaux. Ces mesures contestées pourraient générer une recette de 2,3 milliards d’euros, selon le gouvernement. Ce projet, qui entraînerait une augmentation des restes à charge pour les usagers, est inacceptable pour FO, qui pointe le risque d’accentuer le renoncement aux soins, notamment pour les ménages les plus modestes.
Gel des prestations sociales : les plus modestes sévèrement impactés
Alors que selon l’Insee, le taux de pauvreté en France a atteint 15,4 % en 2023, son plus haut niveau depuis le début de ce suivi en 1996, le gel des prestations sociales prévu par le PLFSS 2026 aggraverait la situation des plus modestes. Visant l’abaissement massif des dépenses publiques l’an prochain, le gouvernement programme, entre autres, une absence de revalorisation pour toutes les prestations sociales (RSA, allocations familiales, prime d’activité, APL…). Elles ne seraient donc pas relevées, en avril 2026, de l’inflation constatée sur les douze derniers mois. Le gouvernement argue d’un effort modéré
pour les bénéficiaires, un ralentissement de l’inflation étant attendu sur l’année 2025 (à 1,3 % selon les estimations de l’Institut des politiques publiques/IPP et de l’Observatoire français des conjonctures économiques/OFCE). Par cette non-revalorisation des prestations sociales ainsi que des pensions de base, il vise surtout la réalisation d’une économie de 3,6 milliards d’euros en 2026, dont 2,5 milliards d’euros pour la Sécurité sociale et 1,1 milliard pour l’État.
Une baisse du revenu disponible...
Geler les prestations sociales est inadmissible pour FO, qui appelle à revaloriser notamment les minima sociaux, les allocations familiales et les aides personnalisées au logement, pour faire face à l’inflation et lutter contre la pauvreté. Pour FO, il faut s’attaquer aux exonérations massives de cotisations sociales accordées aux entreprises et non pas aux revenus des plus modestes. Ce gel des prestations a aussi suscité une levée de boucliers des associations de lutte contre la pauvreté, qui s’alarment du décrochage
du RSA et des APL par rapport au coût de la vie et au prix des loyers. Selon une étude de l’OFCE publiée en juin, en pourcentage du niveau de vie, ce sont bien les plus pauvres qui seraient les plus affectés par ce projet de gel ou d’année blanche globale. Les 5 % de ménages les plus modestes perdraient 1 % du revenu disponible comparativement à une situation de revalorisation usuelle
, souligne l’OFCE.
