Voici dix-huit récits de vie au travail, un état des lieux sur le terrain, exempt de grandes théories. On y retrouve toutes sortes de métiers, d’âge, de sexe, d’origine, de parcours de vie. Mais un point les rassemble : leur constat sur l’évolution du monde du travail.
Tous observent une détérioration manifeste des conditions de travail : baisse des effectifs mais plus d’activité, imposition de la flexibilité, course aux résultats et à la rentabilité immédiate, distance accrue entre salariés et direction, étiolement du collectif… Cela entraîne de la pression, de la violence, des inégalités et de l’injustice ; une perte d’énergie, d’identité, de sens, de légitimité.
Car voici venu le temps des moins : moins de temps, de qualité, de savoir-faire, d’autonomie ; moins de pouvoir d’achat, d’initiative, de réflexion ; moins de respect, de dialogue social, de relations humaines ; moins de contestation, de rapport de force pour les syndicats.
L’emprise des multinationales et des grands groupes, la numérisation et l’automatisation, l’accélération de la production, la privatisation de certaines activités ont profondément transformé le travail et la notion de métier : l’humain a laissé la place aux chiffres, il est devenu une marchandise comme une autre, une variable d’ajustement remplaçable dont l’optimisation va jusqu’à sa négation.
Malgré les différentes lois qui ont mis à mal la représentation syndicale, il semble pourtant que le syndicat soit un dernier rempart contre la démobilisation absolue du salariat : parce qu’il a la connaissance des métiers et des lois, il a les moyens de la lutte pour entrer en résistance.
Attention aux risques de surchauffe : la paix sociale n’est pas une possession, elle ne s’achète pas mais se construit et s’entretient.