Quels fondements et rôles économiques pour le SMIC : Intervention de Henri Sterdyniak Économiste à l’OFCE

Actes du colloque « Regards pluridisciplinaires sur le SMIC et le pouvoir d’achat des salariés en France »

Henri Sterdyniak, directeur du département Économie de la mondialisation de l’OFCE. © Bertrand Clech

Laurent Mauduit interroge Henri Sterdyniak : faut-il se battre face à un monde qui est de plus en plus dérégulé et défendre le Smic ou un Smic européen ? Ou est-ce l’horloge même de ce capitalisme qu’il faudrait corriger ? S’il y a une relation capital/travail qui est au détriment du travail, au sein même des profits, il y a un partage de plus en plus à l’avantage des dividendes que de l’investissement. Est-ce que la vieille revendication syndicale de défense du Smic suffit toujours dans ce monde très « anglo-saxonnisé » ou est-ce l’horlogerie même de ce capitalisme qui mérite d’être de nouveau régulée et de quelle façon ?

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Quand j’étais jeune, j’ai participé à la rédaction du programme d’un parti politique et nous y avions fait figurer l’objectif : pas de salaire supérieur à 7 fois le Smic. Maintenant, dans le programme du même parti politique, l’objectif est : pas de salaire supérieur à 20 fois le Smic. Nous avons dû nous résigner au creusement des inégalités.

La France est dans un monde mondialisé où, dans chaque pays, se creusent des inégalités. D’un côté, une couche étroite de la population bénéficie de la mondialisation et de la victoire du capital sur le travail ; et de l’autre côté, dans les pays développés, les travailleurs dits non qualifiés sont menacés par la concurrence des pays émergents comme par le progrès technique.

À partir de là, grosso modo, trois stratégies sont possibles. La première, c’est la résignation : il vaut mieux avoir un salaire faible que ne pas travailler ; il faut accepter le creusement des inégalités de revenus et de statuts, cela passe par la remise en cause du niveau du Smic (et plus généralement des prestations sociales et du droit du travail).

La deuxième solution, qui aujourd’hui frise l’utopie, serait de remettre en cause le capitalisme financier, de retrouver le discours socialiste productif ; les travailleurs doivent prendre en charge la production à la place de capitalistes peu soucieux de produire en France, qui préfèrent investir dans les pays à bas salaires et jouer sur les marchés financiers. Il faut modifier la manière dont sont conduites les entreprises, pour qu’elles se préoccupent moins de rentabilité financière et plus du développement de l’emploi et de la qualification des travailleurs.

Enfin, la troisième solution, sociale libérale, consiste à prendre aux riches pour donner aux pauvres. Il s’agit de récupérer les gains que la mondialisation apporte aux plus riches pour aider les plus pauvres. C’est la stratégie choisie en France puisque notre particularité est d’avoir maintenu le salaire minimum à un niveau relativement élevé, d’avoir développé massivement les exonérations bas salaires qui ont réduit le coût du Smic pour les entreprises et, par ailleurs, d’avoir maintenu et développé, le RSA, la prime pour l’emploi et les prestations familiales qui font que le niveau de vie des travailleurs en bas de l’échelle ne s’est pas trop dégradé. Ainsi, la France est l’un des pays où les taux de pauvreté ont le moins augmenté. Progressivement les taux de pauvreté des autres pays européens atteignent et dépassent les taux de pauvreté en France, c’est en particulier le cas pour l’Allemagne et même pour la Suède. La France, comme les Pays-Bas n’ont pas eu de fortes hausses de leur taux de pauvreté.

Par ailleurs, la France est un des rares pays où, avant la crise, les salaires n’ont pas eu de décrochage important par rapport aux gains de productivité. Ce n’est pas le cas de beaucoup de nos partenaires, en particulier l’Allemagne. Jusqu’à présent, la France a maintenu son État social et a résisté mieux que les autres à la croissance des inégalités. Cela place la France dans une situation fragile parce que les plus riches en France sont plus taxés que dans beaucoup de pays, donc elle doit lutter contre la tentation des plus riches d’aller se faire imposer ailleurs. Elle doit lutter aussi contre les entreprises qui ont la tentation d’aller produire et d’aller se faire taxer ailleurs. La France apparait comme le mauvais élève de la mondialisation libérale comme de la soumission aux contraintes européennes de réduction du déficit public, de baisse des dépenses publiques et sociales, de mise en cause du droit du travail, de mise en place de réformes structurelles, sans que le gouvernement français ose dire clairement : non, nous ne sommes pas le mauvais élève ; nous refusons cette stratégie ; nous proposons une autre stratégie, celle du maintien du modèle social européen. La France a dissocié complètement le niveau du Smic du pouvoir d’achat dont disposent les travailleurs pauvres et du coût du travail grâce aux mécanismes que sont d’un côté les exonérations de cotisations sociales et de l’autre le RSA, la PPE, les prestations familiales (y compris les allocations logement).

Du coup, la question du bon niveau du Smic devient ambiguë parce que cela dépend de façon importante de ce qu’on fait d’un côté des exonérations de cotisations sociales employeurs et de l’autre de ce qu’on fait du côté du RSA. Le système français a beaucoup d’instruments. Dans ce cadre, le Smic a un rôle particulier, celui de garantir une valeur minimum au travail, quel que soit le rapport de force local entre le travailleur et l’entreprise. Ainsi, tout travailleur a-t-il droit à un niveau de vie satisfaisant, supérieur au seuil de pauvreté, sans avoir à recourir à un mécanisme spécifique d’assistance.

Effectivement, la situation économique, conjoncturelle ou structurelle, fait qu’il y a beaucoup de personnes en situation difficile. Ces personnes doivent être aidées, à la fois financièrement et par des mécanismes d’insertion, donc il est normal que la France dispose d’un RSA. Par ailleurs, il serait nécessaire que soit mis en place un revenu minimum qui ne soit pas lié à l’obligation d’insertion pour un certain nombre de personnes qui sont très loin de l’emploi, temporairement ou définitivement. Par contre, la personne qui travaille normalement doit avoir un salaire qui lui permet de vivre de manière décente sans avoir besoin de recourir à ces mécanismes d’assistance.

« Dans une société qui fonctionne correctement, le précariat doit être extrêmement faible ... »

En même temps, se posent deux problèmes. D’une part, le précariat s’étend en France comme dans beaucoup de pays développés. Le nombre de travailleurs précaires augmente parce que de nombreuses entreprises ont choisi de sous-traiter certaines activités. Un certain nombre de tâches sont faites maintenant par des travailleurs précaires, qui sont souvent des femmes ou des travailleurs fraîchement immigrés, qui ne bénéficient pas des statuts des travailleurs normaux de l’entreprise. Le fait d’avoir des mécanismes d’assistance réduit la pauvreté de ces travailleurs et, en même temps, permet à ce phénomène de perdurer, donc il y a un arbitrage difficile. Le précariat n’est pas, à mon avis, une situation acceptable ; on ne peut accepter d’avoir en permanence des travailleurs précaires qu’on aide par le RSA, par une prime d’activité. Dans une société qui fonctionne correctement, le précariat doit être extrêmement faible. Le travail à temps réduit, sans garantie, doit être limité à des cas extrêmement particuliers (étudiants, par exemple). On ne va pas dans ce sens-là.

Le deuxième point délicat, vous en parlerez sans doute plus longuement cet après-midi, est que le salaire est individuel, que le niveau de vie est familial et que se pose l’articulation entre les dispositifs salariaux et sociaux. En France, actuellement, le Smic (et la PPE et les allocations logement) assure à un Smicard célibataire un niveau de vie de l’ordre de 77% du revenu médian, donc au-dessus du seuil de pauvreté. Par contre, se posent des problèmes de pauvreté, pour les personnes à temps partiel, pour les familles monoparentales et pour les familles mono-actives.

Le problème qui se posera l’année prochaine est celui de la réforme du système, d’un côté, la prime pour l’emploi a été supprimée alors qu’elle apportait 7,5% de pouvoir d’achat aux Smicards et, de l’autre côté, on va remettre en chantier le RSA activité, dont le barème était bien pensé pour accompagner la transition entre le RSA-socle et le Smic, mais qui est un échec, compte tenu de son taux élevé de non-recours.

Ce que nous avons préconisé à l’OFCE c’est de compenser la suppression de la prime pour l’emploi par une revalorisation du Smic, quitte éventuellement à augmenter les exonérations de cotisations bas salaires. C’est précisément le rôle du Smic que tous les salariés aient un niveau de vie satisfaisant et soient incités à l’emploi : il n’y a pas de raison qu’il y ait deux dispositifs avec le même objectif, d’un côté le Smic et, de l’autre, la prime pour l’emploi. Donc, si on supprime la prime pour l’emploi, il faut augmenter le Smic.

Par ailleurs, il faudrait repenser le complément familial, l’attribuer aux familles de travailleurs pauvres avec un ou deux enfants, pour que les familles avec un ou deux enfants, dont un des parents gagne le Smic n’aient pas besoin d’avoir recours au RSA.

Le RSA-activité doit être maintenu, puisqu’il permet que toute activité se traduise effectivement par une hausse du revenu disponible mais son rôle serait réduit et, grâce à l’extension du complément familial et la hausse du Smic, le non-recours aurait moins de conséquences pour les familles avec enfants. Par ailleurs, il faudrait créer une allocation d’insertion, du montant du RSA, pour les jeunes à la recherche d’un emploi, n’ayant pas de droit à l’indemnité chômage, allocation validant des trimestres pour la retraite.

Du point de vue des entreprises, les exonérations de cotisations sociales, qui se sont massivement développées, ont réduit fortement le coût du Smic. Bien sûr, ces exonérations sont extrêmement discutables. L’évaluation de leurs effets est sujette à caution.

Il n’y a pas de spécificité française liée au niveau du Smic ...

Contrairement à ce qu’on lit trop souvent, le fait qu’il existe en France un Smic relativement élevé n’a pas d’effet dramatique sur les taux d’emploi des travailleurs dits non qualifiés. Certes, le taux de chômage par niveau d’éducation est beaucoup plus élevé pour les travailleurs sans diplôme que pour les travailleurs avec un diplôme élevé, mais l’écart existe dans tous les pays de l’OCDE. L’écart est de 8,7 point en France, de 11,3 points aux États-Unis, de 11,5 points en Allemagne ; Quand on regarde les différences de taux d’emploi entre diplômés et non diplômés, l’écart pour la France est de 28 points. C’est un peu moins qu’aux États- Unis (29 point) et qu’en Allemagne (31 points), un peu plus qu’au Royaume- Uni (27 points). Il n’y a pas de spécificité française liée au niveau du Smic.

En ce qui concerne la situation des jeunes de 25 à 30 ans, la part de ceux qui ne sont ni en emploi, ni en formation, est de 14% contre 15% au Royaume-Uni et 16% dans la zone Euro, même si les pays germaniques ou scandinaves font mieux. Le niveau du Smic n’a pas, compte tenu de l’ensemble des dispositifs mis en place en France, d’effet dramatique sur l’emploi des jeunes ou des non qualifiés.

Il y a périodiquement un débat entre ceux qui préconisent de cibler les exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires pour maximiser l’effet sur l’emploi (sans tenir compte de la qualité des emplois ainsi crées) et ceux qui proposent plutôt d’aider l’industrie, tant les entreprises de main d’œuvre, que les entreprises innovantes et les entreprises qui cherchent à monter en gamme. La seule réponse qu’on peut faire, c’est : il faut faire les deux. On ne peut pas, dans l’état actuel du marché du travail, sacrifier l’un ou l’autre objectif.

Il y a de nombreuses études sur l’impact du salaire minimum qui sont finalement peu concluantes. Cela vient de la difficulté de définir ce qu’est une hausse du salaire minimum : est-elle compensée ou non par des exonérations de cotisations sociales employeurs ? Comment joue-telle par rapport au RSA ?

Naturellement, la hausse du salaire minimum, provoque un effet demande puisqu’elle augmente le revenu de personnes qui ont une très faible propension à épargner. Cet effet demande est réduit, si on prend par ailleurs des mesures de réduction des dépenses publiques pour compenser la hausse des dépenses d’exonération de cotisations employeurs. La hausse du salaire minimum augmente théoriquement l’incitation au travail des salariés non qualifiés, ce qui joue sans doute très peu en France mais est très important dans les études américaines selon lesquelles la hausse du salaire minimum incite un certain nombre de personnes à aller travailler et augmente les performances au travail. C’est la théorie du salaire d’efficience.

Du côté des entreprises, une hausse du salaire minimum peut toujours être compensée par une augmentation des exonérations de cotisations sociales employeurs, de sorte que l’impact sur le coût des entreprises peut être nul.

« Certains travaux faits en France partent de l’hypothèse absurde selon laquelle le salaire est toujours égal à la productivité du travail ... »

Certains travaux faits en France partent de l’hypothèse absurde selon laquelle le salaire est toujours égal à la productivité du travail. Donc, quand on augmente le salaire minimum, le salaire d’aucun salarié n’augmente, mais les entreprises licencient toutes les personnes dont la productivité est inférieure au nouveau niveau du salaire minimum.

C’est bien sûr une hypothèse sans fondement. Prenez le cas des femmes qui remettent en état les chambres dans les hôtels. Même si on augmente le niveau du Smic, l’hôtel ne va pas se priver de ces personnes ; le salaire de ces personnes n’a rien à voir avec une quelconque productivité du travail qui serait indépendante du salaire. Ce qui se passe c’est que, naturellement, l’entreprise qui nettoie les chambres qui, souvent, maintenant, n’est pas la chaîne hôtelière, mais un sous-traitant, facture le coût du Smic à l’hôtel, qui, éventuellement, va augmenter un peu le prix des chambres, donc l’effet de la hausse du Smic sur l’offre de travail des entreprises est extrêmement limité.

Selon certains, il existe des substitutions importantes entre facteurs de production ; quand on augmente le Smic, les entreprises seraient incitées, au lieu d’utiliser des travailleurs non qualifiés, à utiliser des travailleurs plus qualifiés ou du capital. Dans l’industrie, une partie importante des emplois non qualifiés ont déjà disparu du fait de la concurrence des pays à bas salaires. Dans un grand nombre d’activité de services, ce genre de substitution n’est simplement pas possible.

Par contre, effectivement, il peut y avoir des substitutions entre entreprises, c’est-à-dire que la baisse du coût du Smic incite les entreprises à choisir la technique de production consistant à utiliser massivement du personnel précaire sous-payé et à concurrencer les entreprises qui ont un souci plus grand du niveau de salaire et de la compétence de leur personnel. Donc, on peut dire, en sens inverse : la hausse du Smic renverse ce phénomène de déqualification de certains postes de travail.

Enfin, le dernier effet est un effet de substitution au niveau de la demande ; la hausse du coût du Smic augmente le prix des produits à forte quantité de travail non-qualifié, donc peut décourager leur emploi par les ménages. Ceux-ci vont hésiter à avoir une femme de ménage ou ils ne vont plus la déclarer. Donc, l’impact de la hausse du Smic passe sur des mécanismes complexes.

Le débat aux États-Unis, centré sur le problème des employés dans les fast-foods, n’a pas abouti à des conclusions nettes. Selon certaines études, augmenter le salaire minimum augmente un peu l’emploi dans les fast-foods ; selon d’autres, cela le diminue très légèrement. Certains travaux ont interrogé les responsables d’entreprises qui disent : quand le salaire minimum augmente, nous ne réagissons pas car les salaires ne sont qu’une petite part des coûts. Réagir en modifiant la façon de travailler serait trop coûteux. Le fait d’augmenter les salaires nous permet d’avoir des travailleurs plus motivés, avec moins de turn-over et d’absentéisme, donc ce n’est pas si mauvais pour nous.

L’OFCE a publié une étude d’Éric Heyer et Mathieu Plane qui prend en compte un grand nombre d’effets pour arriver à un bilan négligeable, légèrement négatif, de l’impact de la hausse du Smic sur l’emploi.

Le Smic européen est une très bonne idée. Dans chaque pays, un salaire minimum devrait représenter au moins un certain pourcentage du salaire médian, pourcentage décidé en commun. Cela participerait de la lutte contre le dumping salarial en Europe. Ce serait l’esquisse d’une coordination des politiques salariales.

Reste que cela peut être une bonne chose comme une mauvaise chose. C’est une bonne chose si cela s’inscrit effectivement dans une coordination satisfaisante des évolutions salariales. Les salaires, dans chaque pays, doivent augmenter comme la productivité globale du pays ; il faut du rattrapage dans les pays où les salaires n’ont pas augmenté comme la productivité du travail, en particulier dans les pays du Nord. Mais cela suppose que l’Europe renonce à la thèse dominante actuellement, selon laquelle les pays de la zone Euro ne sortiront que de la crise par des gains de compétitivité, donc par des salaires qui progressent moins vite que la productivité. En même temps, le salaire minimum ne peut être le seul outil de la politique salariale (puisqu’il servirait alors de variable d’ajustement). On le voit, il faut mettre en place dans chaque pays des objectifs nationaux pour l’évolution des salaires.

Cela suppose aussi que le niveau du salaire minimum soit fixé à un niveau satisfaisant. Il se trouve que la France est le seul pays d’Europe où le salaire minimum représente plus de 60% du salaire médian. Compte tenu des exonérations de cotisations sociales, cela ne fait que 50%. Mais il y a beaucoup de pays où le salaire minimum n’est que de l’ordre de 45% du salaire médian et donc, ce n’est pas forcément gagné d’avoir un Smic européen qui ne soit pas un recul pour les salariés français.

« La grande idée contre laquelle il faut lutter, c’est contre l’idée du Smic sectoriel, différent dans l’industrie et dans les services ... »

La grande idée contre laquelle il faut lutter, c’est contre l’idée du Smic sectoriel, différent dans l’industrie et dans les services. C’est une idée absurde parce que la notion de productivité n’a pas de sens au niveau sectoriel. Prenez par exemple deux baby-sitters en France et à Bamako, elles font le même travail. En France, elle va être payée 15€ de l’heure, à Bamako, 2€ de l’heure. On ne peut pas dire que c’est une différence de productivité. Le niveau des salaires reflète l’état de développement d’un pays ; la notion de productivité en volume n’a pas de sens ; la productivité en valeur dans les services reflète le niveau de développement du pays. Il n’y a aucune valeur de la productivité en soi du travail d’une caissière ou d’une personne qui remet en état les chambres dans les hôtels, indépendamment du salaire dont elle bénéficie. Le prix relatif des services augmente au cours du temps même si les progrès techniques sont réalisés dans les secteurs industriels. On ne peut pas rompre cette logique. Il y a un grand nombre de secteurs dans lesquels, au cours du temps, il n’y a aucun gain de productivité.

Par ailleurs, le Smic doit assurer un niveau de vie suffisant à chaque travailleur. Donc si, effectivement, on estime qu’il y a un certain nombre de travailleurs dont l’emploi pose problème, que ce soient les plus jeunes, les chômeurs de longue durée, les seniors, cela doit passer par des aides spécifiques à l’emploi et non pas par la baisse du Smic. En même temps, les aides spécifiques à l’emploi posent problème si on ne remet pas en cause la gestion de la main d’oeuvre par les entreprises. D’une part, elles risquent d’encourager le développement du précariat. D’autre part, elles risquent d’encourager la pratique consistant à embaucher à titre précaire des jeunes qui ne bénéficieront pas des conditions des travailleurs déjà en place. Enfin, elles risquent d’encourager une pratique des entreprises consistant à licencier à un certain âge les seniors en se disant : ils retrouveront ailleurs un travail aidé.

Il est important que les travailleurs et leurs syndicats se battent pour restaurer l’unité du salariat, ce qui signifie que, tout en luttant pour le niveau du Smic, il faut aussi se battre pour éviter au niveau des entreprises le développement du précariat, de la sous-traitance, du fait qu’un certain nombre de fonctions sont maintenant assurées par des personnes qui ne bénéficient pas de la protection accordée aux travailleurs de l’entreprise, personnes qui sont souvent payées en dessous du Smic parce que le personnel d’entretien dans les hôtels ou dans les d’entreprises, le personnel précaire, peuvent être payés en dessous du Smic en sous estimant le temps nécessaire pour effectuer leurs tâches.