Le rapport du CNNUm remis mercredi 6 janvier 2016 propose des pistes de réflexions intéressantes au regard des effets induits par la transformation numérique de notre économie. Le développement du numérique remet en cause le rapport classique au travail. Les nouvelles formes de travail s’affranchissent des contraintes de lieu, de temps et questionnent le lien de subordination propre au salariat. Cela pose un réel défi quant à la protection assurée au travailleur quel que soit son statut. FO-Cadres se réjouit de voir certaines de ses analyses reprises dans ce rapport comme l’ouverture de nouvelles négociations sur le télétravail et la nécessité de renforcer le droit d’information syndicale à l’ère du numérique.
Cependant, elle s’étonne de l’absence de recommandation relative à une meilleure protection de la vie privée des salariés, sujet auquel elle prête une attention particulière. En outre elle reste critique quant à la recommandation qui vise à élargir la représentativité syndicale à des collectifs existant dans l’entreprise et à leur conférer une participation dans le but de limiter « l’écart entre les représentants du personnel et les salariés ». Quant aux diverses propositions de nouveaux statuts pour les travailleurs du numérique, dans l’actuel contexte de la réforme du code du travail, l’exigence d’un socle commun de garanties telle que reprise dans le rapport comporte le risque d’un nivellement par le bas des droits sociaux des salariés.
Par ailleurs la vigilance s’impose sur toutes les formes de travail non rémunéré qui produisent de la valeur ajoutée pour certaines entreprises du web notamment. Ce temps passé qui s’apparente à du loisir ou à de la découverte s’accompagne parfois de profits pour ces nouvelles industries, sans donner lieu à rémunération. Le développement de l’économie dite collaborative pose des questions similaires. Dès lors que ces plateformes numériques organisent cet échange, se rémunèrent et prospèrent, en captant la valeur ajoutée, la question de la répartition des richesses et de la fiscalité se pose. La construction d’une économie numérique ne peut advenir sans que la justice fiscale ne prenne en compte la diversité des statuts qu’elle a elle-même générée.
En revanche FO-Cadres reste fermement opposée à l’idée d’une individualisation de l’impôt et de son prélèvement à la source tels que préconisés par le rapport. L’individualisation reviendrait à nier ce que sont, le plus souvent dans la réalité, les couples et les familles au sein desquels la participation aux charges communes se fait en proportion des possibilités de chacun. Quant au prélèvement à la source, il ne facilite pas particulièrement la vie du citoyen mais se traduirait par des suppressions de postes dans la fonction publique.
Enfin puisque notre société devient une économie de l’innovation basée notamment sur l’intelligence des réseaux, la protection sociale et son financement solidaire doivent demeurer une priorité. Le numérique est au service de l’innovation et du progrès et non un cheval de Troie pour assiéger la citadelle des garanties et protections collectives indispensables à tout à chacun.