Rentrée sociale : FO reçue à Matignon

Protection sociale par Clarisse Josselin, Karen Gournay, Serge Legagnoa

Une délégation FO, composée de Pascal Pavageau, Secrétaire général de FO, Karen Gournais, Serge Legagnoa et Cécile Potters était reçus le jeudi 30 août 2018 par M. Édouard Philippe, Premier ministre, avec Mme Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé et Mme Muriel Pénicaud, ministre du Travail. Photographie : F. Blanc (CC BY-NC 2.0)

Une délégation FO menée par Pascal Pavageau était reçue ce 30 août 2018 à Matignon, pour évoquer les prochaines réformes sociales, notamment sur l’Assurance chômage et la santé au travail. Pour FO, qui a redonné ses positions, ce n’est pas tout de recevoir les interlocuteurs sociaux, il faut aussi les écouter.

Un irréductible Gaulois attaché au système social et qui lutte contre les régressions organisées grâce à la potion magique qu’est le collectif, c’est ainsi que Pascal Pavageau, secrétaire confédéral FO, s’est présenté face à la presse à sa sortie de Matignon dans la matinée du 30 août 2018. Il faisait allusion aux propos du président de la République qui, depuis le Danemark, avait qualifié l’avant-veille les Français de Gaulois réfractaires au changement.

Cette réunion en bilatérale avec le Premier ministre, accompagné des ministres du Travail et de la Santé, faisait suite à la rencontre le 17 juillet 2018 entre Emmanuel Macron et les interlocuteurs sociaux.

Tous les chefs de file syndicaux et patronaux sont reçus à tour de rôle à Matignon du 29 août au 4 septembre. Selon la lettre d’invitation, l’objectif est de tracer les contours du programme de travail de l’année à venir en matière sociale. Au programme, l’Assurance chômage, la santé au travail et l’indemnisation des arrêts maladie.

Les interlocuteurs sociaux doivent aussi pouvoir être forces de proposition

Sur ces différents sujets, la délégation FO, composée du secrétaire général Pascal Pavageau, de Karen Gournay, secrétaire confédérale chargée de la négociation collective et des rémunérations, de Serge Legagnoa, secrétaire confédéral chargé de la protection sociale collective, et de Cécile Potters, chef de cabinet, a rappelé les positions et revendications de la confédération.

Pascal Pavageau a rappelé que FO était demandeur depuis quelques mois d’une reprise du dialogue entre le gouvernement et les interlocuteurs sociaux. S’il s’est satisfait d’avoir été reçu, il a expliqué au gouvernement qu’il souhaitait aussi être écouté et entendu.

La méthode ne peut pas consister simplement à se voir régulièrement pour nous dire on a décidé de faire ci, de vous interroger comme ci, et il y aura un diagnostic partagé au final, a-t-il prévenu. Il faut que les interlocuteurs sociaux puissent également être force de proposition sur un certain nombre de sujets permettant réellement du progrès social.


Sur l’Assurance chômage :

En juillet dernier, à la surprise générale, Emmanuel Macron avait annoncé sa volonté de lancer une nouvelle réforme de l’Assurance chômage, la troisième en moins de deux ans. L’exécutif souhaite une « remise à plat » des règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi.

La délégation FO a précisé qu’elle n’était pas demandeuse d’une négociation supplémentaire, alors que la loi Avenir professionnel, adoptée par le Parlement le 1er août 2018, possède déjà un volet consacré sur l’Assurance chômage et que le Conseil constitutionnel ne s’est pas encore prononcé sur les différentes mesures imposées.

Une phase de diagnostic est prévue en septembre. FO y participera et demande qu’elle s’appuie sur des données de l’Unédic. La confédération défendra ses positions et revendications, notamment la mise en place d’un bonus-malus sur les cotisations patronales, pour lutter contre l’augmentation des contrats courts.

A l’issue de ce diagnostic, le gouvernement doit proposer un document de cadrage de la négociation.

En matière de méthode, FO a demandé que la négociation ne se fasse pas sur la base d’une lettre de cadrage fermée mais plutôt d’une « lettre d’orientations proposées à la négociation ».

Sur sa participation à la négociation interprofessionnelle, FO se positionnera en fonction des propositions du gouvernement dans le document élaboré à la fin de la concertation, en lien avec le CCN qui se réunit également fin septembre. Si cette lettre nous demandait d’en finir avec le principe assurantiel du régime, le tout dans un cadre contraint sur un plan budgétaire, nous ne pourrions pas accepter d’instrumentaliser la négociation collective en demandant aux interlocuteurs sociaux de se retrouver pour faire hara-kiri à l’assurance chômage et au paritarisme, a-t-il prévenu.

Sur la santé au travail :

FO avait demandé dès le mois de mai 2018 que le thème de la santé au travail puisse faire l’objet d’une négociation interprofessionnelle. Si nous avons une phase de concertation en septembre qui permette d’écouter tout le monde, on est bien partis pour avoir une négociation qui puisse débuter vers octobre ou novembre, a ajouté Pascal Pavageau face à la presse.

Les sujets de négociation à bâtir lors de la concertation pourraient être soit issus du rapport Lecoq rendu le 28 août, qui préconise une simplification à l’extrême du système, soit proposés par les interlocuteurs sociaux. FO portera ses revendications afin que cette négociation corresponde à ses demandes et aux attentes des travailleurs, notamment en matière de prévention.

Sur l’indemnisation des arrêts maladie :

Ce sujet a également été imposé par le gouvernement, qui estime que le système actuel coûte trop cher et que les arrêts maladies augmentent trop. Durant l’été, l’exécutif avait suggéré de transférer la charge des indemnités journalières aux entreprises. Le 26 août, le Premier ministre a également comparé, dans le JDD, les arrêts maladie à des jours de congés. Autant d’annonces fustigées par la délégation FO, qui a rappelé qu’il était hors de question de réduire les droits ou indemnisations des salariés en arrêt maladie, que le gouvernement décide d’une journée de carence supplémentaire ou qu’un transfert s’organise de l’Assurance maladie vers les employeurs.

Le gouvernement veut un diagnostic partagé avec les interlocuteurs sociaux sur le sujet et des propositions, a expliqué Pascal Pavageau à la presse. Pour lutter contre l’augmentation du nombre d’arrêts de travail, FO a fait une proposition concrète : le retour de la retraite à 60 ans et 37.5 annuités de cotisations, ce qui règlerait le problème.

C’est bien la contre-réforme de 2010 et les précédentes qui conduisent à augmenter l’âge des actifs, ils sont contraints de faire 42.5 annuités voir plus pour avoir une retraite à taux plein, et ils sont encore en activité à 65 ou 66 ans, a-t-il ajouté. C’est sur ces âges-là qu’il y a une augmentation tout à fait naturelle des arrêts maladie.

En matière de diagnostic, pour FO, le cadre ne doit pas être de faire des économies mais de faire en sorte qu’il y ait moins d’arrêts de travail pour maladie ou d’accidents du travail. Il faut s’attaquer aux causes réelles, arrêter la dégradation des conditions de travail, travailler sur la réduction concrète de la pénibilité pour les métiers difficiles, a-t-il ajouté. Autant de revendications et d’analyses que FO portera durant la phase de concertation à venir.


Sur la retraite :

Même si la concertation en cours sur la réforme des retraites se déroule dans un autre cadre, FO rappelé qu’elle était opposée à la mise en place d’un système unilatéral par points et d’une uniformisation des régimes. Jusqu’à présent, seules des dispositions générales sur de grands principes ont été évoqués. La délégation FO a réitéré sa demande au gouvernement d’une traduction concrète de ces propositions, afin de permettre la mise en place de simulations des changements induits par la réforme.

 

Dans la soirée du 30 août, FO a invité les autres organisations syndicales et de jeunesse au siège de la confédération afin de construire le rapport de force par la mobilisation interprofessionnelle pour bloquer cette casse organisée du modèle social sur tous ses pans par les différentes politiques menées depuis plus d’un an, a ajouté Pascal Pavageau à la presse.

 

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

Karen Gournay Secrétaire confédérale au Secteur de la négociation collective et représentativité

Serge Legagnoa Ex-Secrétaire confédéral au Secteur de la Protection Sociale Collective