Retraites : en réponse au déni démocratique, une douzième journée d’actions pour le retrait de la réforme, le 13 avril

Les articles de L’InFO militante par Valérie Forgeront, L’inFO militante

Eric TSCHAEN/REA

Et de onze. Ce 6 avril a donc eu lieu la onzième journée de mobilisation contre la réforme des retraites. Une manifestation à Paris (des Invalides à la place d’Italie) rassemblant 400 000 personnes, quelque 360 cortèges sur le territoire, toujours très garnis eux aussi... Au total, près de deux millions de manifestants ont une nouvelle fois battu le pavé. Ce jour était marqué aussi par des grèves, nouvelles ou qui se poursuivent dans de nombreux secteurs professionnels, des actions de blocage d’axes routiers et de sites... A l’évidence, les travailleurs restent déterminés dans la lutte contre cette réforme injuste, adoptée à coup de 49.3. Une détermination qui se confirme depuis le 19 janvier, soit près de trois mois. Une détermination qu’a confirmée l’intersyndicale réunie à l’issue de cette journée d’actions interprofessionnelle. Elle appelle à une journée de mobilisations et de grève le 13 avril et soutient toutes les actions et initiatives intersyndicales de mobilisations, y compris le 14 avril, pour gagner le retrait de cette réforme. L’intersyndicale qui considère que cette loi devrait être déclarée contraire à la Constitution se réunira à l’issue de la décision du Conseil constitutionnel le 14 avril.

La mesure de recul de deux ans de l’âge légal de départ en retraite, à 64 ans, ne passe pas. Pas plus que l’accélération du calendrier de la réforme Touraine. Pas plus que la suppression des régimes existants,... Cette réforme que l’exécutif voudrait mettre en œuvre dès septembre prochain est rejetée par les trois-quarts de la population et autour de 95% des travailleurs. Les sondages d’opinion, d’où qu’ils viennent, ne cessent de montrer un soutien solide au mouvement. L’intersyndicale -huit organisations de salariés dont FO et des organisations de jeunesse- conteste la réforme et en demande son retrait. Nombre d’économistes la critiquent et eux aussi avec arguments chiffrés à l’appui... Mais le gouvernement s’entête, lui qui n’a pu obtenir une majorité suffisante au Parlement pour faire voter la réforme sans un passage en force. Plus largement l’exécutif campe dans une attitude de surdité totale, laissant les travailleurs estomaqués.

A quelques jours (le 14 avril) de la décision du conseil constitutionnel sur la conformité, ou non, de la réforme et au lendemain du rendez-vous (le 5 avril) entre l’intersyndicale et la Première ministre -rencontre qui a tourné court, l’agacement des manifestants était particulièrement palpable ce 6 avril dans les cortèges. Il faut rester mobilisés, déterminés. Il faut aller jusqu’au retrait de cette réforme indiquait dans la manifestation parisienne un militant de FO-Com, indigné du profond mépris du gouvernement. On ne peut pas discuter de quoi que ce soit tant que la réforme des retraites n’est pas retirée martèle-t-il souhaitant qu’il y ait une censure totale du texte par le conseil constitutionnel, solution la plus adéquate pour tout le monde. Et de dire sa stupéfaction de la réaction de la Première ministre, le 5 avril, à l’issue de sa rencontre avec l’intersyndicale. Une rencontre au cours de laquelle chaque organisation syndicale, dont le secrétaire général de FO, Frédéric Souillot, a fait une déclaration puis a posé à son issue la même question à Mme Borne : Mme la Première ministre, vous devez retirer cette loi. Allez-vous retirer cette loi ? La réponse de la Première ministre fut Non.

Cela a conduit les représentants de l’intersyndicale à mettre fin à la rencontre et à s’en expliquer sur le perron de Matignon. Quelques minutes plus tard, la première ministre sortait elle aussi et faisait une déclaration devant la presse. Même si nos désaccords sur l’âge n’ont pas permis de discuter de façon approfondie, je pense que cette réunion marque néanmoins une étape importante indiquait Elisabeth Borne. Et d’assurer que Les organisations syndicales, (...) sont disponibles pour travailler ultérieurement sur ces sujets et je leur ai dit ma disponibilité et celle de mon gouvernement parce que je n’envisage pas d’avancer sans les partenaires sociaux. Les organisations relataient tout autrement cette rencontre en forme d’échec...

Frédéric Souillot : Le chaos social et le chaos démocratique, c’est l’exécutif qui en porte la seule responsabilité

Le secrétaire général de FO qui le 5 avril participait en fin d’après-midi à un rassemblement organisé par l’UD-FO de Paris devant l’Opéra Garnier, -soit pas très loin du conseil constitutionnel où étaient auditionné le même jour les organisations syndicales - est ainsi revenu sur son intervention devant la Première ministre. Frédéric Souillot a rappelé à Elisabeth Borne le refus de FO d’un recul de l’âge légal de départ en retraite, comme son refus d’une accélération du calendrier Touraine sur l’allongement de la durée de cotisation. Et nous avons été la seule organisation syndicale à le rappeler : la revendication est aussi le maintien de tous les régimes existants, soulignait-il indiquant qu’il avait aussi signifié à la Première ministre que ces revendications sont le préalable à toute discussion. Et ajoutait-il : j’ai expliqué à la Première ministre que le chaos social et le chaos démocratique, c’est l’exécutif qui en porte la seule responsabilité depuis plus de deux mois, et pas les organisations syndicales. Et de stigmatiser l’invraisemblance : la Première ministre a indiqué que la priorité de ce gouvernement était le dialogue social, tout en disant Non au retrait de la réforme. Donc il n’y a aucune écoute des travailleurs et de leurs organisations syndicales.

Face à cette attitude, la mobilisation continue. On ne peut pas s’arrêter là, nous devons gagner, nous allons gagner appuyait Frédéric Souillot qui ce 6 avril a participé au cortège de Chalon sur Saône (Saône et Loire) où l’UF-FO organisait son congrès.

Nous on ira jusqu’au bout et on sera là, en manif’

Dans la même journée, le 5 avril, rapportait l’AFP, l’entourage du président de la République, actuellement en visite d’État en Chine, assurait qu’il n’y a pas de crise démocratique. Et d’indiquer encore qu’Emmanuel Macron prendrait contact avec les syndicats, pour les voir, après la décision du conseil constitutionnel. Depuis la Chine, il fait dire par son cabinet qu’il recevra les syndicats dans les semaines à venir ?! Ca dénote un mépris des organisations et une attitude déconnectée de la réalité fulminait le lendemain, 6 avril, un militant FO dans le cortège parisien. Alors que l’intersyndicale avait adressé un courrier début mars à Emmanuel Macron, pour demander à être reçue en urgence, le président de la République avait répondu le 10 mars par une fin de non-recevoir. Et depuis, c’est le silence radio. Juste, le président nous parle indirectement et de l’étranger !, relevait choqué un manifestant dans le cortège FO. Dans sa déclaration ce 6 avril, l’intersyndicale souligne que Le contexte est inédit. Dans ce climat de fortes tensions que l’on peut qualifier de grave crise démocratique et sociale, l’exécutif s’arc-boute et porte seul la responsabilité d’une situation explosive dans l’ensemble du pays.

L’exécutif n’écoute pas les Français, c’est du mépris indiquaient deux militants FO, personnels de l’AP-HP, l’une aide-soignante et l’autre, agent de restauration. Tous les deux ont fait plusieurs manifestations et grèves depuis janvier. On y va, on y est, pour nous, pour nos collègues qui ne peuvent faire grève, pour nos enfants, leur avenir. Cet exécutif n’écoute pas les gens, ne les comprend pas, notamment pourquoi ils sont dans la rue, pourquoi ils continuent les manifs’. Nous c’est notre onzième manifestation indiquait Leonel Duarte da Costa délégué syndical accompagné de son collègue Patrice Peyratout, tous deux travaillant chez Stellantis à Poissy.

Et les deux militants, travaillant en atelier, d’évoquer la pénibilité de ce travail, de son rythme. Nous on se lève à 2h30 du matin depuis 32 ans. C’est très dur. Moi j’ai commencé à l’âge de seize ans. Alors deux ans de plus à travailler ? Mais ils croient que l’on va prendre le bus, avec une canne pour aller travailler ?!, lançait avec colère Leonel Duarte da Costa. Et il n’y a aucun travail qui est facile, que ça soit pour quelqu’un qui travaille dans un bureau ou quelqu’un qui a un travail plus manuel. Alors l’exécutif devrait comprendre ce que pense le peuple, les travailleurs. Pourquoi nous refusons cette réforme. Et que l’exécutif touche aux plus riches... tiens, à l’ISF par exemple !.

Dans sa déclaration ce 6 avril, l’intersyndicale rappelle que Cette réforme est perçue, à juste titre, comme brutale et injuste par les travailleurs et travailleuses et la jeunesse qui ont tous et toutes bien compris qu’ils et elles devront travailler plus longtemps sans que jamais le patronat, ni les employeurs publics ne soient mis à contribution. Comme des millions d’autres, les deux salariés de Stellantis ne camouflent pas leur colère face à la réforme et à l’entêtement de l’exécutif à la maintenir. Nous on ira jusqu’au bout et on sera là, en manif’ ». Le prochain rendez-vous est donc ce 13 avril. Ce sera la douzième journée nationale de mobilisation.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération