Retraites : grèves et mobilisations dès janvier si le gouvernement s’entête

InFO militante par Ariane Dupré, L’inFO militante

En dévoilant avant la fin des concertations syndicales les contours de la réforme des retraites le 2 décembre dans le Parisien, Elisabeth Borne a suscité la colère des syndicats. Le 5 décembre, huit organisations de salariés, dont FO, et cinq organisations de jeunesse, ont appelé à l’issue d’une intersyndicale, à une mobilisation unitaire en janvier si le gouvernement s’arque-boute sur son projet.

Passage en force ? Alors que les concertations avec les syndicats sur la réforme des retraites entrent dans le dur (FO a été reçue en début de soirée le 8 décembre sur le sujet du financement), les décisions du gouvernement semblent déjà actées. Dans une interview au quotidien le Parisien du 2 décembre, Elisabeth Borne confirmait avant même la fin des concertations mi-décembre, le report progressif de l’âge de départ à la retraite de 62 à 65 ans. Une fois de plus, la première Ministre justifie la réforme en usant de l’argument habituel : la réforme arriverait « pour sauver » le système de répartition, face au déficit qui dépassera les 12 milliards d’euros d’euros en 2027 et continuera à se creuser si l’on ne fait rien. Pour Michel Beaugas, négociateur FO, On va vers un dialogue de sourd. Et de rappeler que c’est sous la contrainte du front unanime des syndicats que le gouvernement a dû mener cette concertation.

FO est allée le 8 décembre au ministère du Travail pour réaffirmer son opposition à tout recul de l’âge de départ en retraite : Il n’y a aucune de raison de le faire. Le rapport du Cor l’indique : les dépenses des retraites resteront stables à long terme. Quant au chiffre brandi de 12 milliards par an, c’est 0,5 % du PIB. Autant dire rien, car le PIB en 2021, c’est 2 500 milliards d’euros !. 12 milliards d’euros de « déficit » du système de retraite à combler en 2027 pour un système de retraite qui collecte plus de 300 milliards d’euros par an, justifieraient la réforme ? Et c’est sans compter un paradoxe, relève Michel Beaugas : on ne touche pas aux aides publiques aux entreprises, qui représentent entre 144 et 157 milliards par an avec les exonérations. C’est 9 % du PIB. S’il y avait autant péril sur les retraites que le prétend le gouvernement, ce qui est faux, il serait facile de trouver de l’argent en faisant participer les employeurs. Sans surprise, cette option est exclue par Elisabeth Borne, laquelle déclare ne pas vouloir alourdir le coût du travail par des cotisations supplémentaires.

Impact dès la génération 1961

Dans ce projet dont l’axe central est désormais largement dévoilé, l’étendue des générations de salariés concernés est aussi confirmée. Exit la génération 1966, ou 1967, un temps évoqué, Elisabeth Borne annonce que la réforme des retraites impactera les travailleurs dès la génération 1961. Le gouvernement accélère. Cela signifie que les gens nés en 1961, proche de la retraite, devront travailler quelques mois de plus. C’est scandaleux. Quant à ceux nés en 1966, ils se prendront la réforme de plein fouet et devront travailler trois ans de plus ! fustige Michel Beaugas. Une réforme inique pour FO, qui rappelle qu’un salarié sur deux liquidant sa retraite n’est plus en emploi, mais au chômage, en arrêt-maladie, en invalidité ou aux minimas sociaux…

L’emploi des seniors renvoyé au second plan

Quant à l’emploi (difficile) des salariés âgés, Elisabeth Borne estime que reculer l’âge de la retraite à 65 ans accroitra mécaniquement le taux d’emploi des seniors. Pour que les entreprises ne se séparent pas des seniors et les embauchent, elle renvoie à la responsabilité des entreprises, au dialogue social et dans les branches. Donc, il y aura peut-être des négociations de branche sur les fins de carrière, mais le gouvernement ne lâche rien de sa réforme ! s’agace Michel Beaugas. FO qui a fait des propositions pour le maintien dans l’emploi des seniors, exige l’abandon du projet repoussant l’âge légal de départ à la retraite.

Atteinte des régimes spéciaux

Autre mauvaise nouvelle : la Première ministre a confirmé que les nouveaux embauchés dans les secteurs relevant des régimes spéciaux (RATP, industries électriques et gazières) seront affiliés au régime général d’assurance-vieillesse, comme dans le privé. Le retour de cette clause du grand-père suscite un tollé syndical, FO y est opposée.

Le texte [de cette réforme, Ndlr] sera présenté avant les vacances de Noël a réaffirmé Elisabeth Borne, et passera en conseil des ministres début janvier 2023. Si l’exécutif maintient son projet, l’intersyndicale dont fait partie FO a d’ores et déjà averti d’une possible première date de mobilisation unitaire, avec grèves et manifestations dès janvier.

Ariane Dupré Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération