Les ponts français après Gênes : on y roule, on y roule….

Revue de presse par Michel Pourcelot

Le pont autotoutier Morandi s’est effondré à Gênes le 14 août 2018. Photo : Arata/Fotogramma/ROPI-REA

L’effondrement d’un pont autoroutier à Gênes le 14 août, faisant au moins 39 morts, a conduit les médias français à s’interroger sur l’état des infrastructures de ce type. Aperçus dans la presse.

Le Journal du Dimanche
« Les secours sont toujours à pied d’œuvre dans les décombres du pont Morandi à Gênes, dont une partie s’est effondrée mardi faisant au moins 39 morts, mais une partie de l’Italie cherche déjà à connaître qui est responsable de ce drame. Difficile à dire puisque les causes de l’effondrement d’un pilier (…) n’ont pas été encore établies. Cependant, le pont a toujours connu un défaut dans sa structure et ce, depuis sa conception. En outre, de nombreux édifices de la même époque connaissent aussi des détériorations et des investissements importants auraient dû être entrepris ». Auraient dû…

Courrier International
« Malheureusement, le cas du pont Morandi, qui s’est écroulé le 14 août, faisant des dizaines de morts, s’inscrit dans une longue liste d’effondrements de ponts ou d’échangeurs, que dresse le Huffington Post Italia. L’état des routes et autoroutes italiennes "est le miroir du pays", déplore le site. Un pays incapable de prendre soin de ses biens et de son territoire, de programmer et de prévoir à l’aide des technologies à sa disposition, tout juste capable de passer d’une urgence à une autre". Un pays, fustige encore l’article, "qui confie de plus en plus l’entretien de ses infrastructures – via des appels d’offres ou des concessions – à des entreprises privées qui cherchent à maximiser leurs profits, bien plus qu’à assurer la sécurité » ». Un pays qui n’est pas le seul.

Le Monde
De ce côté-ci des Alpes, « plus on attend pour réaliser ces travaux de maintenance, plus il y aura urgence et plus ça coûtera cher », estime Jean-Michel Torrenti, ingénieur des ponts, spécialiste du béton, et directeur du département matériaux et structures de l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (Ifsttar). Il ajoute : « Aujourd’hui il y a un arbitrage difficile à faire sur fond de budget limité : faut-il réparer un peu tous les ponts qui présentent des problèmes, ou se concentrer uniquement sur les plus dégradés en remettant l’entretien des autres à plus tard ? ». Le budget est limité mais la durée de vie de certains ponts aussi.

Le Dauphiné
« Un récent audit sur les ponts français est alarmant, surtout après la catastrophe de Gênes. On y apprend qu’en France, 30% des 12000 ponts que compte le réseau routier non concédé à des sociétés privées sont à réparer. De plus, 7% d’entre eux présentent même un "risque d’effondrement" à terme ». Les autres ne sont pas concernés par une politique à court terme, le respect des 3% de PIB étant sans doute plus important à restaurer. Mais ce rapport est « d’autant plus préoccupant qu’en moyenne, un pont "n’est réparé que 22 ans après l’apparition des premières dégradations" relève le document ». Et il y a longtemps que les missions de service public se dégradent…

Le Point
En effet, « si l’État français investit dans son réseau routier plus que ses voisins du sud de l’Europe, c’est nettement moins, toujours selon l’audit, que ses voisins du Nord (Pays-Bas, Autriche, Suisse, Grande-Bretagne…). Ainsi, le Royaume-Uni consacre 80 000 euros par kilomètre et par an à son réseau, alors que la France se situe à un niveau proche de 50 000 euros. À titre d’exemple, la somme consacrée à l’entretien des ouvrages d’art représente en moyenne 0,2 % à 0,25 % de la valeur à neuf des ouvrages. Selon certains experts internationaux (Suisse, OCDE), il faudrait un effort d’entretien quatre à sept fois supérieur (0,8 à 1,5 %) pour préserver un ouvrage ». Un fric de dingue...

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante