Salaires et conditions de travail : les salariés déterminés à défendre leurs droits

Les articles de L’InFO militante par Clarisse Josselin, L’inFO militante

Inflation galopante ses effets sur le pouvoir d’achat, salaires en berne et refus de les augmenter, conditions de travail, les conflits se multiplient. Les salariés, qui pour certains se mettent en grève pour la première fois, se montrent déterminés à se faire entendre avec FO. Ambulances Kéolis-Santé de Brest, laiterie Laïta d’Ancenis, centre de rééducation des Capucins à Angers ou atelier Sevarome d’Yssingeaux en Haute-Loire, quelques exemples de mobilisations.

Chez Sevarome, les salariés refusent la suppression des RTT

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Sevarome, entreprise spécialisée dans les colorants et arômes alimentaires basée à Yssingeaux, en Haute-Loire, a sa notoriété. C’est elle qui avait fourni le colorant vert utilisé dans la cuve de chewing-gum du film Rabbi Jacob. Ici, les mobilisations aussi sont extrêmement rares. La grève lancée le 7 novembre avec le soutien de l’union départementale FO est la seconde depuis la création de la société en 1964. Et elle a été largement suivie : la quasi-totalité des salariés de l’atelier de production ont cessé le travail pour exiger des hausses de salaire et le maintien des acquis. Le site d’Yssingeaux ne compte qu’une trentaine de salariés. En 2001, l’entreprise familiale a été rachetée par le groupe Nactis Flavours, lui-même racheté il y a près de trois ans par le groupe italien Aromata. Et depuis l’arrivée de ce dernier, détenu en majorité par un fonds de pension américain, les salariés subissent une chasse aux avantages acquis et aux usages.

L’an dernier, grâce à l’aide de FO, la tentative de mettre en place une annualisation du temps de travail sur les trois sites français du groupe a échoué. La direction tente désormais de remettre en cause l’organisation du travail mise en place en 2001 par accord sur le site d’Yssingeaux. Actuellement, les salariés y travaillent sur un cycle de 32 et 39 heures par semaines, avec 3,5 jours de RTT. La direction voudrait les faire travailler 38 heures au lieu de 39 les semaines longues pour supprimer les RTT. Après des augmentations salariales au rabais de 3% pour les salariés à moins de 2000 € nets, sans clause de revoyure, c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase , explique Pascal Samouth secrétaire général de l’union départementale FO de Haute-Loire. Dans le contexte d’inflation, les salariés demandent aussi une revalorisation salariale pour faire face dignement au coup de la vie.

Une nouvelle rencontre a été organisée le 10 novembre avec le directeur de production. Les seules avancées sont l’avancement des NAO d’avril à janvier 2023 et la promesse orale du versement d’une prime exceptionnelle , poursuit Pascal Samouth. Les salariés devaient se prononcer en fin de journée sur la suite à donner à la mobilisation.

Grève victorieuse chez Laïta

Chez Laïta, coopérative laitière implantée dans l’Ouest de la France, la grève massive lancée le 25 octobre pour les salaires a payé. Sur le site d’Ancenis en Loire-Atlantique, où FO, majoritaire, avait appelé les équipes à débrayer deux heures par jour, la mobilisation a été suivie par 90% des salariés des ateliers de production. Après deux semaines de mobilisation, un accord a été trouvé le 7 novembre. Les salariés ont obtenu une nouvelle augmentation générale de 1,5% applicable dès ce mois de novembre, ainsi qu’une prime Macron de 700 euros. Au total, pour l’année 2022, les salaires auront augmenté de 6% grâce aux clauses de revoyure négociées dans le cadre des NAO : +1,8% en mai, +1,2% en septembre, + 1,5% en octobre et donc +1,5% en novembre. Nous avions besoin de cette augmentation, dans le secteur agroalimentaire les salaires se font talonner par le Smic , se félicite Christophe Viau, délégué syndical central FO chez Laïta.

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Grève inédite au centre de rééducation des Capucins d’Angers

Kinés, cuisiniers, agents des admissions, secrétaires... de mémoire de salarié, c’est la première fois que l’ensemble du personnel du centre de rééducation et de réadaptation des Capucins, à Angers, se mobilise pour exprimer un ras-le-bol général. L’appel à une grève reconductible a été lancé le 7 novembre par FO, unique syndicat implanté dans l’établissement. Le 8 novembre, 150 salariés sur 450, intérimaires compris, ont cessé le travail. Une nouvelle journée d’action est prévue le 14 novembre. Les revendications portent sur les salaires et les conditions de travail. L’inflation exceptionnelle de l’année 2022, la stagnation du point d’indice depuis de nombreuses années, le fait que 70 métiers de la convention collective CCN 51 sont actuellement sous le Smic, dont les aides-soignants, ont poussé les salariés à s’organiser , explique le syndicat dans un communiqué. Par manque d’attractivité salariale, les embauches sont difficiles et les conditions de travail se dégradent. Près de 10% des postes sont vacants, déplore Evie Lahouille, déléguée FO. Et les recrutements sont d’autant plus difficiles que nous sommes situés à côté d’autres établissements de soins, comme le CHU, qui versent de meilleurs salaires .

Les négociations sont au point mort. Une nouvelle rencontre avec la direction est prévue le 14 novembre. Nous faisons partie du secteur de la santé privée à but non lucratif et la direction s’appuie là-dessus pour ne rien lâcher en prétextant que nous ne faisons pas de bénéfices, dénonce la déléguée. Le versement d’une éventuelle prime dont nous ne connaissons même pas le montant a été évoquée. Mais nous ne voulons pas de prime, nous exigeons une hausse de salaire. Les salariés décideront suite à cette rencontre des suites à donner à la mobilisation.

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Les ambulanciers de Brest en colère

La colère gronde aussi chez les ambulanciers du groupe Jussieu-Keolis Santé de Brest et de Saint-Renan. L’appel à la grève reconductible lancé le 4 novembre par FO, seul syndicat de l’entreprise, a été suivie par 90% du personnel. Les revendications portent notamment sur une augmentation générale des salaires pour faire face à l’inflation, une harmonisation du paiement des heures supplémentaires entre les salariés et une gestion humaine des plannings. Si le travail a repris partiellement le 9 novembre pour des raisons financières, les salariés restent déterminés à se faire entendre. Un nouvel arrêt de travail était prévu le 10 novembre dans l’après-midi Faire grève coûte cher, on réfléchit à des moyens d’actions moins coûteux , admet Hoël Drot, délégué FO.
Les négociations sont au point mort et les échanges restent très limités avec la direction qui ne veut faire aucun effort selon le militant. La situation s’est dégradée depuis la fusion des sociétés Jussieu Secours et Keolis-Santé en 2021, explique-t-il. Les demandes que nous formulons depuis huit mois ne sont pas entendues, on nous a refusé par trois fois la tenue d’un CSE exceptionnel. La direction refuse nos revendications Plus globalement, Keolis a une vision de notre métier très axée sur le transport, sans voir le volet sanitaire qui pourtant est essentiel. Selon Hoël Drot, dix-huit personnes ont démissionné depuis le début de l’année sur 105 salariés, soit plus de 10% des effectifs.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération