Une réforme brutale pour tous

InFO militante par Ariane Dupré, L’inFO militante

© F. BLANC

Salariés du privé, fonctionnaires : le recul de deux ans de l’âge légal de départ en retraite frappera tout le monde si la réforme passe. Dès septembre, le gouvernement prévoit de reculer l’âge légal de 62 à 64 ans d’ici 2030. La mesure d’âge sera couplée à une forte accélération de la réforme Touraine. Pour atteindre 43 ans de cotisation à l’horizon 2030, l’âge légal reculera chaque année d’un trimestre par génération, à compter de ceux nés le 1er septembre 1961. Ces salariés proches de la retraite devront travailler trois mois de plus (62 ans et trois mois). À raison d’un trimestre par an, la génération 1964, proche de la soixantaine, ne pourra pas partir avant 63 ans et avec 171 trimestres à valider, soit deux de plus qu’actuellement. Pour ceux nés en 1965 et 1966, ce sera trois trimestres en plus et avec aussi un recul de l’âge de départ, soit à plus de 63 ans. Et en 2030, la réforme touchera de plein de fouet ceux nés en 1968, qui devront travailler au minimum jusqu’à 64 ans. Un recul social inadmissible pour FO : à terme, Tout le monde va se prendre deux ans ferme, résume Michel Beaugas, secrétaire confédéral chargé du dossier des retraites. Il souligne que certains publics en pâtiront particulièrement : les salariés précaires, ceux à temps partiel, (dont les femmes) ou exerçant des emplois pénibles. Et bien sûr les seniors.

Un index seniors hypocrite et cosmétique

Alors que seuls 56,1 % des 55-64 ans étaient en poste en 2021 selon la Dares, les seniors devront paradoxalement travailler deux ans de plus minimum. On verra le nombre de seniors inscrits au chômage ou au RSA augmenter. Les arrêts maladie, voire le risque d’accidents du travail vont croître dans certains métiers, alerte Michel Beaugas. La réforme ne fait rien pour améliorer leur sort. Le projet prévoit la simple création d’un index seniors dans les entreprises à partir de 2023. La non-publication de cet outil donnant lieu à une pénalité de 1 % de la masse salariale. Un gadget pour FO, qui avait demandé lors des concertations des sanctions financières pour les entreprises licenciant des seniors. Pour les salariés encore en poste à 62 ans, le gouvernement prétend revaloriser la retraite progressive. Mais à la marge : si la réforme passe, elle deviendra certes un droit opposable dans le privé pour les salariés souhaitant travailler à temps partiel, en complétant avec une part de pension avant l’âge légal. Le système s’ouvrira aussi à la fonction publique. Mais le dispositif (continuer à cotiser à temps partiel pour la retraite) reste peu avantageux. Et marginal : 12 306 personnes du privé étaient concernées en 2021 selon la CNAV. FO demandait que les retraites progressives se calculent sur la base de cotisations à temps plein pour ne pas pénaliser les salariés. Mais décidément, pas question d’alourdir le coût du travail en augmentant les cotisations, a martelé Élisabeth Borne. Par leur mobilisation, les travailleurs disent ce qu’ils en pensent !

Ariane Dupré Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération