Satisfaction : la Cour des Comptes prône le nirvana numérique pour La Poste

Le Mot par Michel Pourcelot

© Richard DAMORET/REA

En brandissant le taux de satisfaction des clients, la Cour des Comptes n’a pas résisté à son plaisir récurrent de s’en prendre à La Poste dans son rapport annuel 2020 publié le 25 février dernier. Pour les « sages » de la rue Cambon, « bien qu’étant la cause de l’attrition des volumes du courrier, les technologies numériques représentent pour La Poste une opportunité pour trouver des relais de croissance et améliorer la satisfaction des clients ». L’enquête de satisfaction a d’ailleurs principalement été effectuée par… mail.

Arguant de la baisse en volume du courrier, la Cour des Comptes, expert épistolaire, a derechef proposé dans son rapport de diminuer les jours de distribution en citant les exemples danois et néerlandais et, bien sûr, de tailler un peu plus dans la mission de service public : « des ajustements sur les modalités de mise en œuvre du service universel postal pourraient être envisagés (prestations incluses dans le service universel, notamment la place du courrier J+1, services électroniques qui leur sont associés, localisation des boîtes aux lettres) pour assurer l’équilibre économique du courrier », bref, sa profitabilité.

Boites à lettres et boites à outils numériques

Et qui dit moins de courriers et de boites aux lettres, veut dire pour la Cour des Comptes moins de ces personnels qui sont pourtant déjà au four et au moulin (le nombre de colis, lui, explose) et dont beaucoup sont cadencés à la centiminute près. Dans les cinq recommandations que propose la Cour des Comptes dans ce rapport annuel « pour face à la baisse du courrier » figure celle de « développer des outils numériques d’assistance sur le terrain visant à simplifier et accélérer les tournées des facteurs ». Au rythme effréné des algorithmes. Autre solution avancée par les « sages » : « adapter le nombre de boîtes aux lettres de rue au regard de l’évolution du courrier postal », soit en clair continuer à en réduire le nombre. Ce qui devrait pousser un peu plus les usagers vers le courriel d’autant que les tarifs des timbres ont pratiquement doublé en six ans. Cette évolution ne satisfera guère ceux qui ne maîtrisent pas suffisamment l’informatique (13 millions de Français en état « d’illectronisme ») ou/et ceux qui résident dans une zone où la couverture électronique est médiocre, soit 75% des communes de France et 15% de la population, selon le rapport 2019 du Défenseur des Droits). Plus de numérique, plus d’économies, mais moins de service public.

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante