On a été trahis mais on n’est pas résignés, on va continuer à se battre comme on le fait depuis plus d’un an, notre projet tient la route
, assure Frédéric Mazars, délégué FO chez Scopelec. Ce groupe coopératif spécialisé dans le déploiement de réseaux télécoms avait été placé en redressement judiciaire fin septembre, menacé d’un plan de cession, après avoir perdu d’importants contrats de sous-traitance avec Orange, son principal donneur d’ordre.
Les six candidats à une reprise totale ou partielle de Scopelec SA et de sa filiale Setelen ont été auditionnés le 8 décembre par le tribunal de commerce de Lyon, qui rendra sa décision le 28 décembre. Parmi eux figure Newscope, une nouvelle société coopérative et participative (Scop) portée par une majorité de salariés de Scopelec, qui l’ont déjà abondée à hauteur d’un million d’euros. C’est le projet de reprise le mieux disant, avec 1 600 emplois préservés sur un effectif actuel de 2 300 salariés. Il est aussi le seul à conserver le statut de coopérative de l’entreprise.
Les salariés pensaient pouvoir compter sur le soutien d’Orange. Le groupe, indique ainsi le délégué FO, s’était engagé par écrit à fournir une aide de 14 millions d’euros à Newscope pour lancer son activité. Mais coup de théâtre, le 7 décembre, à la veille de l’audience au tribunal, le géant des télécoms a fait savoir que cet engagement n’était pas exclusif à Newscope, fragilisant de fait la candidature portée par les salariés. Cette volte-face est un véritable coup de poignard dans le dos
pour Carlos Verkaeren, président du directoire de la Scopelec.
500 salariés supplémentaires sur le carreau ?
Comment Orange, entreprise de référence en France et dans le monde, peut-elle opérer un revirement aussi improbable à quelques heures de l’examen des offres de reprise de Scopelec par le tribunal de commerce de Lyon ?
a dénoncé le dirigeant dans un communiqué. Il juge cette décision d’autant plus incompréhensible que le 2 décembre, le géant des télécoms informait la direction de Scopelec qu’il allait apporter son soutien au projet de reprise Newscope
.
Selon l’AFP, Orange assure de son côté n’être associé à aucun projet. Le groupe a rappelé avoir émis des avis sur les capacités opérationnelles de chaque candidat
, ce qui, selon lui, ne vaut pas soutien. Il n’empêche qu’il a fait part au tribunal de ses doutes sur le financement de Newscope, et s’est déclaré, selon La Tribune, favorable à une reprise commune par trois autres candidats (Circet, Solutions 30 et Foliateam).
A l’issue de l’audience qui s’est tenue à huis clos, c’est le projet porté par Circet qui a la faveur des deux administrateurs et des deux mandataires judiciaires, ainsi que du parquet, selon Ralph Bindauer, avocat du CSE de Setelen cité par l’AFP. Circet, groupe français racheté récemment par le fonds de pension britannique ICG, ne reprendrait que 1 100 salariés. Moins de la moitié de l’effectif, donc.
Frédéric Mazars est lui aussi indigné par l’attitude d’Orange, d’autant plus que le géant des télécoms s’était selon lui montré plutôt bienveillant envers Scopelec ces derniers mois. Notre projet tient la route, notre business plan a été validé par un cabinet financier reconnu, nous avons le soutien des salariés, de la région Midi-Pyrénées et des élus locaux et malgré tout, 500 personnes supplémentaires vont se retrouver sur le carreau, c’est incompréhensible,
Soutenir la Scop, une solution triplement gagnante selon les élus locaux
Il rappelle que Newscope a aussi prévu de diversifier son activité, en développant l’installation de bornes de recharge pour les voitures électriques. Nous sommes prêts, nous avons déjà 7 millions d’euros de commandes
, assure le militant.
La nouvelle Scop bénéficie du soutien de nombreux élus locaux. Dans un communiqué publié avant l’audience du 8 décembre, une quinzaine d’entre eux, dont une dizaine de députés, avaient appelé l’État à prendre ses responsabilités pour sauver la première Scop de France. Une solution triplement gagnante
à leurs yeux, notamment en termes d’emploi, mais aussi pour maintenir la souveraineté nationale dans le secteur des télécommunications.
Le tribunal doit ainsi choisir entre deux sortes de projets diamétralement opposés,
Pour le militant FO Frédéric Mazars, pas question de baisser les bras, même si certains salariés sont en train de craquer. Des appels à la mobilisation pourraient être lancés. L’urgence est aussi de trouver à nouveau de l’argent. Les administrateurs judiciaires ont tous dit que nous avions un super projet mais pas assez de fonds propres,
Orange n’en est malheureusement pas à sa première trahison
dans ce dossier. En septembre déjà, malgré ses engagements, l’opérateur historique avait refusé au dernier moment de soutenir financièrement Scopelec, ce qui avait provoqué la chute de la Scop et son placement en redressement judiciaire.